Toute ma vie, l'on n'a eu de cesse de me demander de m'adapter et à bien y réfléchir, c'est ce que je sais faire de mieux, m'adapter. Avant tout, je commence par observer le milieu. J'ai toujours donné une importance prépondérance à la théorie avant de me lancer à corps perdu dans la pratique et de surcroît l'observation. Ne dit-on pas que tout est dans le détail ? Ainsi présenté, ça simple, si facile et ça l'était. Mais voyez-vous lorsqu'il est question de cet être que nous sommes et de ce qui nous touche au plus profond de nous-même, l'adaptation me fait soudainement défaut. Lorsqu'il est question de sentiment, au pluriel comme au singulier, nous n'avons le contrôle sur rien. Kassandra était mon amie et j'étais prêt à tout pour pouvoir à nouveau conjuguer ce statut au présent. Je m'en voulais de lui avoir causé du tort. Mais plus encore, je m'en voulais de l'avoir abandonné. Je n'ai pas réfléchi, moi qui d'ordinaire ne laisse rien au hasard. Peut-être aurais-je dû émettre l'hypothèse que nos retrouvailles seraient bien malgré elles, le théâtre d'une confrontation qu'inconsciemment, j'attendais, mais certainement pas en de telles circonstances. Et j'étais loin d'imaginer qu'il me faudrait affronter une seconde confrontation et pas des moindres. Je mentirais si je vous disais n'avoir rien ressenti en la voyant sortir de nulle part. Elle que je ne parvenais à nommer, car toujours épris de notre secret. Elle m'avait fait promettre enfant, de ne jamais dire tout haut son prénom que très peu de personnes pouvaient se targuer de connaître. Une horde de sentiments contradictoires m'avaient alors envahi. J'étais content de la revoir après toutes ces années, avant d'être en colère, mais plus encore amer qu'elle est disparue sans prévenir et sans qu'aucune nouvelle ne me soit donnée, moi qui avais pourtant continué à lui écrire tant que je le pouvais. Mais maintenant que pouvais-je espérer d'elle ? Certainement pas de conjuguer au présent le statut qui nous définissait jadis. Nous n'étions plus que deux étrangers l'un pour l'autre. Tel était notre destin à présent.

Mes certitudes furent néanmoins vite bousculées lorsque les éléments de concert, se liguèrent tous contre nous, mais plus encore contre Mademoiselle Parker. J'étais en colère contre elle, mais pas au point de me réjouir de son malheur. Au contraire, mon sang ne fit qu'un tour dans tout mon corps. Tout d'un coup, ce danger qu'elle représentait jusqu'alors n'avait plus lieu d'être et l'espace d'un instant, je me surpris à éprouver pour elle, l'affection que j'avais jadis. Sa blessure n'en demeurait pas moins une aubaine pour nous et pourtant, je n'étais pas prêt à l'abandonner et ce malgré le danger qu'elle pouvait encore représenter. « - Oui la quantité de sang laisse à présager qu'il s'agit bien d'une hémorragie. Prions pour qu'aucune artère ne soit touchée. » Je devais me concentrer, mettre de côté le stress dû à la situation, mais plus encore au fait que Mademoiselle Parker soit blessée. Kassandra était elle aussi sur le pont à l'inverse de son compagnon qu'elle due supplier du regard. Je ne pouvais lui en vouloir, les circonstances ne plaidaient pas en la faveur de mon amie. Je préférais d'ailleurs éviter de croiser son regard, de peur qu'elle comprenne que je n'étais pas insensible à ce qui lui arrivait. Nous parvînmes, par je ne sais quel miracle à rester concentré, Asher s'était joint à nous et m'aidait à soulever les gravas qui entravaient la mobilité de Parker. « - Merci ! » laissais-je entendre à son attention. Parker tenait le coup, du moins elle ne négligeait pas ses efforts pour se murer dans le paraître. Ma main trouva furtivement la sienne sans que je ne sache pourquoi. « - Partez ! » lançais-je alors à Kassandra et Asher. « - Je vais l'amener à l'hôpital. Laissez-moi juste la voiture. » Mobilisant toutes mes forces, je parvins à soulever Parker, qui était, avouons-le, légère comme une plume. Toutefois, une légère douleur me titilla. Une douleur lancinante, qui gagnait peu à peu en intensité près de mon flanc gauche. Je venais de comprendre que moi aussi, j'étais blessé. Je devais toutefois mener à bien la mission que je venais de me confier...

Le stress de Kassandra s’était envolé en voyant la détresse de Jarod. Son altruisme avait repris le dessus tout comme ses connaissances médicales, et elle s’était précipitée pour venir en aide à son ancien comparse pour sauver mademoiselle Parker qui, si personne ne l’aidait et si l’on se contentait d’appeler les secours, risquait fortement de mourir en se vidant de son sang. La caméléone évaluait les dégâts tout en parlant à voix haute, ignorant Jarod qui se contentait de répéter ce qu’elle disait, et effectua un garrot. Asher avait accepté, à son grand soulagement, de prêter main forte à l’autre caméléon pour soulever de bloc qui écrasait la victime -Kassie préférait ne pas la voir autrement qu’ainsi de peur que ses craintes ne reprennent le dessus -, pendant qu’elle s’occupait de surveiller les blessures qui apparaissait à mesure qu’on la dégageait. Il aurait sans doute mieux valu pour Parker de s’évanouir, mais elle était visiblement plus robuste et n’avait pu retenir un hurlement. Kassandra compatissait vraiment. Mademoiselle Parker réclama alors qu’on l’emmène à l’hôpital.

- Oui, c’est prévu, essaya Kassandra pour la rassurer.

Jarod les remercia et elle hocha la tête. C’était normal, jamais elle n’aurait laissé qui que ce soit mourir, même quelqu’un qui les traquait pour les ramener là-bas. Quelque chose attira néanmoins le regard de la jeune femme tandis que Jarod soulevait Parker. Du sang. Ce n’était pas celui de la victime de l’éboulement, mais bien le sien. Il avait du recevoir un éclat ou autre.

- Jarod ! Pose-la !

Le regard de Kassandra se tourna vers Asher.

- Il est blessé aussi. Il faut que tu portes mademoiselle Parker jusqu’à la voiture, sinon Jarod risque d’un déchirement, on ne sait pas exactement l’étendue de ses blessures.

Puis, elle se retourna vers le caméléon.

- Jarod, tu vas m’écouter, cette fois. On va vous emmener tous les deux à l’hôpital, c’est Asher qui va la porter, et toi, tu vas t’appuyer sur moi. Tu as une blessure au flanc et selon si tu es gravement touché ou non, tu risque de perdre connaissance.

Elle s’avança vers lui pour le soutenir de son côté non blessé.

- S’il te plaît, coopère. Dans la voiture je regarderai et si ce n’est pas trop grave, on te ramène à la maison et je m’en occuperai.

Il était bien entendu risqué de laisser Jarod dans le même hôpital que Parker, car elle aurait sans doute vite fait d’appeler des renforts pour l’épingler. Mieux valait disparaître aussitôt qu’elle serait entre les bonnes mains qui pourraient la soigner.

Retrouver Kassandra m'avait fait plaisir malgré les circonstances et la rancœur qu'elle éprouvait encore à mon encontre. Mais paradoxalement, le fait de voir Parker me fit davantage plaisir. Masochisme : Comportement de quelqu'un qui semble rechercher les situations où il souffrira, sera mal, en difficulté... J'ai délibérément omis la partie « déviation sexuelle » Non, à bien y réfléchir, je ne suis pas un masochiste, certains diront « naïf » Le qualificatif s'y prête, mais une fois encore je n'y adhère pas. Il n'est pas question de naïveté, c'est plus profond et moins artificiel. Je sais qu'elle est dangereuse et je n'ai pas la prétention de la changer (pour l'instant), mais je n'oublie pas non plus qu'elle a été cette petite fille pour laquelle j'avais énormément d'affection. Mon amie, la seule avant l'arrivée d'Angelo de Kyle et de Kassandra par la suite. Je n'oubliais pas non plus toutes nos aventures, tous nos fous rires, nos secrets, ce baiser. Nous n'étions que des enfants, mais je n'avais rien oublié. Comment aurais-je pu ? On n'oublie pas Mademoiselle Parker, c'est indéniable. La situation n'en demeurait pas moins tendue dorénavant et parce qu'elle nous (me) traquait et parce que nous étions blessés. Une blessure qui pour moi était synonyme de quelques problèmes si je ne ménageais pas la plupart de mes efforts. La coupure devait être importante et s'étendre sur une bonne dizaine de centimètre. Je perdais du sang, mais pouvais toutefois remercier ma bonne étoile, que la zone touchée ne soit pas vitale. Une façon pour moi de relativiser.

« - Ne la prenez pas n'importe comment c'est tout ce que je vous demande ! » Asher, je crois que c'est ainsi qu'il se nomme, était donc le compagnon de Kassandra, mais il travaillait au Centre, d'après ce que j'eus compris. Trop d'éléments contradictoires pour que je puisse lui accorder ma confiance. « - Vous savez ce que vous faites, j'en suis ravi, mais voyez-vous, il ne faudrait pas aggraver son état. » Je me surpris à faire preuve d'hostilité, alors que cet homme essayait de nous aider. En fait, à bien y réfléchir, il se pourrait bien que ça soit ma fierté qui parle et j'en avais honte en de telles circonstances. Nous reprîmes donc notre progression, je gardais un œil sur Parker qui, je crois, reprenait du poil de la bête. J'aurais presque pu sourire, si la douleur n'était pas aussi intense. « - Je suis désolé ! » laissais-je entendre. Une excuse prémonitoire au vu de ce qui se présenta face à nous, lorsque nous nous félicitions d'avoir trouvé l'entrée qui n'en était plus une désormais. « - Asher a raison, je crois que nous allons devoir nous séparer. Et non Kassandra, avant que tu n'ajoutes quoique ce soit, tu iras avec lui. Parker et moi sommes blessés, nous risquons de vous ralentir. Le plus gros de la tempête est passé. Je crois qu'on peut souffler. Ne traînez pas ! » J'étais incertain, probablement tétanisé, mais je ne laissais rien paraître pour achever de convaincre l'autre binôme de partir. Et en guise de baroud d'honneur, Parker se mit à hurler. Nous marquâmes tous un silence, conscient qu'il s'agissait peut-être d'autres nettoyeurs. Mais rien, aucun bruit, si ce n'est celui de la pluie et du vent, ne se faisait entendre. « - Parker ça ne sert à rien, tu ne t'économises pas là. Il faut l'allonger ! » lançais-je à Asher avant de retirer ma veste pour la plier de telle sorte que Parker puisse s'en servir comme oreiller. « - Allez-y maintenant ! Kassandra, s'il te plaît ! »

Jarod s’inquiétait (un peu trop) pour mademoiselle Parker, ce qui étonna Kassandra. Mais elle se souvint de la discussion qu’ils avaient eue la première fois qu’ils s’étaient parlé dans les sous-sols du Centre, peu après une séance de travail, quand leurs précepteurs les avaient laissés seuls dans la salle de simulation. Il n’avait que le nom de mademoiselle Parker à la bouche, il parlait d’elle comme d’une amie qui l’avait abandonné. Qu’est-ce qui avait changé ? N’éprouvait-il aucune rancune envers cette fille qui l’avait délibérément laissé dans son Enfer sans rien tenter pour le sauver ? Mais ce n’était pas le moment de philosopher sur l’amitié, le Bien et le Mal, il fallait emmener la blessée à l’hôpital et s’occuper de la plaie de Jarod. Asher avait accepté de porter Parker, mais une fois arrivés près de la « sortie », une mauvaise surprise, une de plus, leur tomba dessus : l’issue était bouchée. Le coeur de Kassie se serrait dans sa poitrine, il fallait faire vite. Alors qu’Asher déposait la grande brune blessée au sol et que Jarod lui confectionnait un oreiller avec sa veste, mademoiselle Parker se mit à hurler. Si ce qu’elle pensait avoir entendu était vrai, ils étaient vraiment dans la merde, comme l’aurait dit Asher. Si les renforts du Centre étaient là… Kassandra ne voulait pas y penser, elle voulait sauver tout le monde et que chacun puisse être sain et sauf. Elle regarda Asher d’un air désespéré, et Jarod leur intima d’aller trouver une sortie.

- On revient, Jarod, tu m’entends ?! On va chercher une sortie et aussitôt qu’on en a une, on revient vous chercher. Je te le promets.

Elle ne s’abaisserait pas à faire comme lui et l’abandonner. Il s’était excusé et même si c’était insuffisant pour combler plusieurs mois supplémentaire dans l’Enfer des sous-sols du Centre, Kassie était incapable de la moindre méchanceté ou cruauté gratuite. La vengeance n’était pas un sentiment qui aurait su l’animer, jamais. Elle était pleine de compassion. Elle prit la main d’Asher et se mit à courir avec lui dans une autre direction, cherchant désespérément une issue qui leur permettrait de quitter les lieux.

- Par là ! lança-t-elle en apercevant comme un rai de lumière probablement émis par de lointains lampadaires ou par les simples rayons de la lune.

La caméléone courut, lâchant la main de son petit ami, pour essayer de dégager le passage qui était bien moins encombré que la « sortie principale ».

- Asher, on ne les laisse pas, pas vrai ? Tu pourrais aller chercher la voiture et puis moi, je retourne les chercher. Je ne sais pas où tu t’es garé…

Elle savait qu’il ne voudrait pas la laisser seule avec eux, mais avaient-ils le choix ? Il n’y avait pas une seconde à perdre.

« Inspire ! Expire ! Inspire ! Expire ! » J'entendais encore la voix de Sydney, douce et chargée de cet accent presque chantant, qui achevait de me rassurer. La simulation s'était mal passée et je n'étais alors qu'un petit garçon, seul et apeuré qui, isolé dans un caisson, pour les besoins d'une expérience, cherchait à se sortir de ce mauvais pas. La voix de Sydney se fit alors entendre. « Jarod ! Inspire ! Expire ! Inspire ! Expire ! » Des conseils qu'il m'arrivait encore de suivre à la lettre lorsque je me sentais mal et c'était très clairement le cas. Je ne souffrais d'aucune hémorragie, par chance, mais l'ouverture de mon flanc sur une bonne douzaine de centimètres n'était pas une promenade de santé. Kassandra et son compagnon nous avaient quittés pour trouver la sortie et nous permettre de nous dégager plus facilement de ce piège. Mais rien n'était gagné et je n'étais pas assez naïf pour omettre la possibilité qu'il faille contourner les renforts. Mais pour l'heure, je ne préférais pas me lancer dans la confection d'un plan B. Il faut dire que je n'étais pas au meilleur de ma forme et qu'il m'était, de ce fait, plus difficile de mobiliser mes capacités. « Inspire ! Expire ! Inspire ! Expire ! » Me voilà à fermer les yeux pour tenter de rendre l'image moins instable, mais la voix de Parker me sortit aussitôt de mon semblant de méditation.

« - La douleur est gérable, la tête qui tourne un peu moins. Et toi, avec ta jambe ? » Son manque d'hostilité me surprit autant que ma franchise. Je venais tout bonnement de mettre en exergue mon état défaillant ce qui lui laissait en somme un avantage pas négligeable. Oui, erreur stratégique, ou pas. La Parker que j'ai connue n'agissait pas de la sorte, elle avait des valeurs et détestait la facilité. On se rassure comme on peut, mais quelque part, je lui faisais encore confiance, sans trop savoir pourquoi. « - Je ne peux pas t'en tenir rigueur sauf si tu as le don de voir l'avenir. » J'entrepris non sans difficulté de m'asseoir près d'elle, ma tête continuant à me jouer quelques vilains tours avec la perspective. « - Oui, c'est une bonne idée.  Toi avec ta jambe dans le sac et moi à deux doigts du malaise. On formerait une sacrée équipe de déblayeurs hein ! » J'étais sarcastique, mais il n'y avait aucune animosité dans ma voix comme toujours avec elle. Elle avait beau avoir disparu sans me laisser de nouvelles, abandonné qui plus est et être passée dans le camp adversaire, j'étais incapable de me montrer condescendant à son égard, ni même de l'envoyer paître, plus encore lorsqu'elle me demanda avec insistance pourquoi je me conduisais ainsi avec elle. Un léger sourire se dessina sur mon visage avant que je n'étouffe un rire tout aussi léger et que je laisse entendre sans filtre : « - Je fais ça parce que je n'ai jamais oublié la petite fille qui, un jour, m'a donné mon premier baiser. »

Kassandra n’en menait pas large, la situation était assez inédite et, si elle s’était demandé une seconde quelle était la marche à suivre, elle savait avec certitude qu’il ne faudrait en aucun cas abandonner l’ennemie, car sa conscience ne la laisserait jamais en paix avec ça. Aussi naïve soit-elle sur certaines choses, la caméléone savaient ce qu’étaient les notions de bien et de mal, et si d’ordinaire elle avait tendance à se fier au jugement d’Asher, cette fois, elle n’était pas d’accord avec lui qui semblait d’avis à laisser Jarod et Mlle Parker en plan.
Alors qu’elle avait peut-être trouvé une prémisse d’issue, ils se mirent donc à déblayer les gravas tandis que la brunette échafaudait une sorte de plan d’attaque pour aller récupérer les deux blessés. Mais Ash ne semblait pas comme d’habitude, il était assez vindicatif comme aux début de leur emménagement quand il l’avait grondé alors qu’elle s’était blessée en cassant le lave-linge. Il se mettait à lui donner des ordres et elle détestait cela. Un pincement au coeur se fit sentir, et tandis qu’elle attrapait une autre pierre et la jetait de côté, elle planta son regard dans le sien.

- Et pourquoi ? Pourquoi tu ne me laisses pas d’alternative ? Tu es comme eux, c’est ça, à me donner des ordres ? Déjà, tu n’aurais pas dû être là, tu prends beaucoup trop de risques et moi je ne suis pas d’accord avec ça ! Elle t’a vu en plus ! Alors désolée mais je te laisserai jamais y retourner sans moi. Où tu me laisses y aller, ou on y va ensemble pour les aider...

L’inquiétude transparaissait dans sa voix. Plus que pour elle, Kassie craignait pour la vie d’Asher. Si Parker l’avait identifié, il aurait des ennuis, c’était certain. Pourquoi l’avait-il suivie ?
Enfin, l’issue se profilait, l’air frais de l’extérieur dénué de toute cette poussière venait leur caresser les narines. Il était désormais possible de passer.

- Où est-ce que tu t’es garé ?

Il n’y avait pas de temps à perdre, les blessures de l’une comme de l’autre pouvaient s’avérer grave, il fallait les conduire à l’hôpital, surtout pour Parker qui risquait peut-être d’avoir de graves séquelles au niveau de la jambe si des examens et traitement appropriés n’étaient pas dispensés. Ils fallait dès à présent rapprocher la voiture au maximum pour éviter à Jarod et Miss Parker trop de mouvements.

« Cette fille te fera avoir beaucoup de problèmes », c'était devenu comme une sorte de leitmotiv avec le temps. Un temps que nous partagions ensemble à une époque révolue. Il me suffisait de jeter un œil sur elle pour le comprendre. Mademoiselle Parker n'était plus la petite fille que j'avais connu. Un traumatisme ça vous change et la mort de Catherine Parker, avait emportée avec elle, l'innocence de sa fille et ce qui ressemblait à une amitié entre nous. Je pourrais (devrais) aisément lui en vouloir, mais rien n'y faisait, et ce, malgré notre appartenance à deux camps opposés. Je ne pouvais me sortir de la tête tous nos souvenirs et plus encore celui de cette petite fille qui, un jour somme tout banal, avait décidé de m'offrir mon premier baiser. C'était anodin pour le commun des mortels, enfin, je crois... Mais pour moi, ce geste demeurait la preuve d'une grande affection entre nous et quelque part, je lui étais redevable de cette démonstration, elle qui à l'époque, n'était pas du genre à se répandre de la sorte en sentiments. Et naïvement, malgré la galère dans laquelle nous nous trouvions, je me demandais si finalement les choses avaient changé, malgré les apparences ? « Reprends-toi ! » La raison venait de se manifester, au bon moment, je crois. Je ne pouvais perdre le contrôle, il en allait de ma survie, de ma liberté. Parker était intelligente, assez pour rivaliser et me prendre à mon propre piège.

« - Non ça ne va pas ! » ne puis-je m'empêcher d'ajouter au fait de ses blessures. Le temps passait et nous étions en fâcheuses postures. Aucune artère n'avait été touché pour ma part, la coupure n'en demeurait pas moins profonde et le risque d'infection plus important encore. Je commençais déjà à sentir la douleur par vagues, mais mon sort m'importait moins que celui de mon « amie » qui palissait à vue d'œil sans que je ne puisse rien faire pour y remédier. Je ne perdais pas espoir, j'étais optimiste quant à nos chances et confiant quant à la réussite de Kassandra et son compagnon. Cela ne m'empêcha pas de me livrer et d'offrir le genre de confession que l'on fait entendre avec la certitude d'y passer ensuite. Ma perspective différait, mais l'envie de me livrer était réelle et sans arrière-pensée. Parker m'avait posé une question et je me contentais de lui répondre, avec la sincérité qui me caractérisait depuis que nous nous connaissions. « - Tu rigoles ! » J'étais légèrement vexé qu'elle ne prenne de la sorte. « A quoi t'attendais-tu Jarod ? » Et sans comprendre pourquoi ce fut à mon tour de rire, un rire furtif tant la douleur qui m'assaillit fut grande. « - C'est pathétique non ? » Mon regard se posa sur elle. « - Parker ! » Effacé le doux sourire et la légèreté, elle allait mal et sombrait peu à peu « - Non Parker ! » Non sans mal, je me rapprochais d'elle. « - Parker tu dois rester avec moi, même si cela te rebutes ! Parker ! Regarde-moi ! » J'en oubliais ma propre douleur, insoutenable de surcroît, mais ma seule priorité, c'était elle et personne d'autre. Et si... Non, j'étais optimiste de nature et nos chances étaient bonnes...