Comme toujours, Asher était génia et apprenait peu à peu des détails sur les banalités des gens « normaux ». Ainsi, Kassandra avait appris l’expression du « bonnet d’âne » pour les écoliers peu travailleurs. Elle n’avait pu s’empêcher de demander le pourquoi du comment, mais son fiancé manquait quelque peu d’informations concrètes.

Toujours était-il qu’en rentrant du travail ce soir-là, elle était loin de se douter qu’ils en arriveraient à parler de fonder une famille. Et si au départ l’idée lui avait fait un peu peur, finalement, la caméléone se dit que c’était une chouette idée et qu’après tout, concrétiser leur amour avec un bébé ne pouvait pas être une mauvaise chose. Le seul détail qui l’effrayait, c’était qu’elle n’avait pas eu de modèle parental à proprement parler, même si Stanley Goodman s’était en quelques sortes substitué à son père durant toutes ses années de captivité.

- Oh quand même, je te fais pas la leçon, j’essaie juste de t’expliquer des choses que je connais, comme toi tu le fais pour moi, répondit-elle avec un sourire. Et tu n’es pas si nul en math, surtout quand il s’agit de commander des boules de glace, le compte est toujours là, ajouta-t-elle avec un brin d’humour.

Après quelques déclarations et quelques caresses tendres, le sujet qui déplaisait le plus à Kassie vint sur le tapis. Le Centre. Les gens qui travaillaient pour eux et dont faisait indéniablement partie cette Elizabeth Fitzgerald dont Asher parlait souvent. Cette dernière avait donné des informations, par bribes encore une fois, à l’ancien militaire, et il devait donc aller dans un certain établissement pour en savoir plus. La caméléone n’était pas en confiance, elle redoutait que ce ne soit un piège. L’attention de la brunette monta d’un cran.

- La femme qui l’accompagne ? Tu m’as jamais dit que tu avais vu une autre personne. Qui est-ce ?

La jeune femme se demanda si cette personne était dangereuse, si elle était un traître, si Asher risquait gros à leur faire confiance. Son coeur se serrait rien qu’à imaginer qu’il pouvait arriver quelque chose à l’homme qu’elle aimait. Elle sentait néanmoins que son fiancé voulait balayer le sujet pour ce soir. Alors elle hocha la tête quand il promit de ne prendre aucun risque et de la tenir infirmée.

- Bien… on fera comme ça.

Elle avait bien du mal à cacher la déception dans sa voix, mais elle s’inquiétait énormément. Et comme pour souffler sur la brûlure, le prof de sports de combat évoqua la maman de Kassandra, Rose. Kassie soupira avant de sourire.

- Appelle-la comme tu veux, mon chéri, elle n’est pas là pour t’entendre. J’ai du mal à dire « maman » mais je crois que ça lui ferait plaisir. Elle m’a invitée chez elle demain après-midi.

Une invitation qui avait empli le coeur de la brunette de joie.

- Je sais pas quoi faire, j’ai peur qu’elle me demande où j’étais tout ce temps, ce qui serait légitime, on s’entend. Mais je ne peux pas lui dire, évidemment. Mais je veux pas lui mentir, c’est ma mère… Il va falloir que je détourne le sujet autant que possible… Et puis… qu’est-ce qu’on dit à sa mère qu’on n’a plus revue depuis l’enfance ? Surtout quand on n’a plus aucun souvenir ? Je m’en veux de pas réussir à me rappeler.

C’était si simple de vivre avec Kassandra et de concevoir un semblant d’avenir alors qu’ils demeuraient incapables de savoir de quoi le lendemain serait fait. Mais pour l’ancien militaire, cet avenir revêtait une importance toute particulière pour lui qui n’avait quasiment pas de passé. Kassandra partageait elle aussi cette malédiction quoique bien plus grande chez elle. On l’a impunément soustraite à sa famille dès le plus jeune âge ; une tribu qui leur faisait défaut jusqu’alors. Asher n’en demeurait pas moins ravi d’être désormais le seul à pédaler dans la semoule. Et pour cause, sa fiancée méritait plus que quiconque de se reconstruire et de retrouver les siens. Cependant, bien qu’il soit incapable de le faire savoir, l’inconscient parlait pour Asher et son envie de paternité trahissait en un sens, sa quête identitaire.

 — Tu expliques bien les choses, tellement que j’arrive à tout comprendre. Pour ce qui est des mathématiques, je doute que le simple fait de savoir compter les boules de glace fasse de moi un génie.   Malgré le fait qu’il se dévalorise à nouveau, il n’y avait rien d’agressif dans le son de sa voix ; Ash demeurait posé et pourvu d’une douceur qui n’était réservée qu’à Kassandra.   — Il faudra donc que tu me donnes quelques cours pour que je ne sois pas un bonnet d’âne.   Il s’imaginait sans mal la demoiselle s’échinant à lui faire comprendre quelques formules mathématiques. Mais avec elle, il était prêt à toutes les folies, même à se relancer à corps perdu dans l’arithmétique.

Les bonnes choses ayant une fin ; trop souvent abrupte ; il fallait à présent parler d’affaires fâcheuses qui mettent en exergue le Centre et ses employés. Un mal pour un bien, car il était question de quelques pistes sur le passé d’Asher. Et puisqu’il ne voulait rien cacher à sa fiancée, il se fit plus bavard lorsqu’il sentit qu’il pouvait librement s’exprimer sur le sujet et plus encore sur Elizabeth Fitzgerald. Mais au cours de l’échange et sans vraiment s’en rendre compte, il évoqua la complice de Fitzgerald ; chose dont il n’avait vraisemblablement jamais parlé jusqu’alors à en juger par l’expression d’incrédulité qui prenait vie sur le visage de Kassy.

  — Oui une femme que j’ai rencontrée il y a un moment. On en recausera plus tard, ok ? Je ne veux pas mettre à mal la soirée avec le Centre et toutes ces histoires.   Par chance, la belle brune ne s’en offusquait pas et acceptait sans mal de passer à autre chose. Du moins, c’est ce qu’Asher préférait se dire après avoir capté une once de déception dans le regard du caméléon. Une déception que l’ancien militaire ignora ; pour le bien de la demoiselle ; et habile, il parvint à rebondir sur un sujet qui, il le savait, mettrait du baume au cœur bien abimé de la belle.

  — Si tu me laisses la nommer comme je veux, je risque de l’appeler “belle maman,” c’est le terme qu’un homme emploie pour parler de la mère de sa femme. Mais puisque théoriquement je ne t’ai pas encore mis l’alliance au bout du doigt, je vais me contenter de Rose.   Le sourire aux lèvres, il laissa Kassandra poursuivre, curieux d’en apprendre davantage sur la suite des évènements.   — Prends le temps qu’il te faut. Si tu n’es pas à l’aise à l’idée de l’appeler “maman” ne force pas les choses. C’est en passant du temps avec elle que ça se fera j’en suis sûr. En tout cas de ce que j’ai vu, elle a l’air d’être une femme pleine de douceur, comme toi.   Il lui sourit à nouveau, avant de sentir une once d’appréhension envahir la jeune femme qui lui faisait face. Il lui prit alors les deux mains pour s’assurer de mieux capter son regard.

 — Hey tranquille. Tu n’es pas obligé de mentir non plus, au même titre que tu n’es pas forcé de dire toute la vérité. Ce que je veux dire, c’est qu’une vérité partielle ça compte comme une vérité non ? Tu peux lui dire que tu as été enlevée sans trop entrer dans les détails. Ne cherche pas à détourner les choses, ça ne fera que te mettre plus mal à l’aise. Laisse les choses se faire mon amour. Ta mère sera compréhensive, elle ne va pas de juger j’en suis sûr, elle t’aime c’est évident.  

Asher était sans conteste la plus belle rencontre de sa vie. Certes, la caméléone ne pouvait se targuer de connaître beaucoup de gens ou d’en avoir rencontré des centaines, bien qu’elle ait croisé malgré tout nombre de personnes, mais elle se savait chanceuse d’avoir trouvé en son sauveur l’amour de sa vie, quelqu’un sur qui elle pouvait compter sans le moindre doute et qui avait la patience nécessaire avec elle pour lui apprendre la vie des gens normaux. Tout ce qu’elle voulait, c’était rattraper le temps perdu et avoir une chance de vivre normalement. Et la chance avait doublement frappé puisqu’à présent, elle connaissait l’identité de sa famille, ses parents, son grand-père et sa précieuse petite sœur. Tout aurait pu être parfait si ce n’était la menace pensante et tapie dans l’ombre que représentait le Centre. Sans compter qu’Asher, lui aussi, avait besoin de réponses à ses questions, et Kassie ne le comprenait que trop bien. Néanmoins, elle savait qu’il prenait des risques en communiquant avec la Fitzgerald et en acceptant d’aller dans des lieux mystérieux qu’elle lui donnait au compte-goutte. Mais ce que Kassandra avait appris également, c’était que chacun avait son libre arbitre et que si Asher décidait d’y aller, elle ne devait pas l’en empêcher. La brunette accepta donc de laisser de côté ce sujet, suivant ainsi la demande de l’ancien militaire qui voulait garder la soirée sous le signe de la joie.

Ils parlèrent alors de Rose qui avait invité sa fille le lendemain. Kassandra était heureuse et impatience mais redoutait aussi les questions liées à son enlèvement, ce dont elle fit par à Ash’, qui lui, se demandait comment il devait l’appeler, ce qui fit sourire Kassie qui elle non plus ne savait pas si elle devait l’appeler « maman ».

- Je ne lui ai pas encore dit qu’on s’était fiancés. Il faudra que je le lui dise, songea-t-elle à voix haute.

La remarque sur la douceur de Rose fit sourire de plus belle Kassandra qui posa son regard dans l’azur des prunelles de son fiancé.

- J’aimerais lui ressembler, je la trouve géniale.

Mais elle baissa le regard ensuite en songeant de nouveau que sa mère aurait sûrement plein de questions à lui poser et qu’elle ne voulait pas mentir. Asher sembla trouver une solution.

- Une vérité partielle ? Oui… c’est vrai… tu as raison. Je ne vais pas lui dire les détails dangereux comme les identités ou même le nom du Centre… Je vais rester vague, sans trop entrer dans les détails.

Elle posa sa main sur celle de son amoureux.

- Heureusement que tu es là. Je serais perdue sans toi. Merci.

Elle se pencha pour déposer délicatement ses lèvres contre les siennes. Le lendemain serait pour eux deux une journée riche en émotions et potentiellement en réponses aussi.

Il y a bien des choses qu’Asher pouvait se targuer de partager avec Kassandra ; à commencer par leur quête identitaire. Cependant, la jolie brune était désormais suffisamment avancée dans son entreprise, pour prétendre « enfin » avoir retrouvé sa famille, ce qui n’était malheureusement pas le cas de son fiancé. Mais ce n’était pas faute d’essayer ; à commencer par les séances d’hypnose instiguées par Kassie. Mais rien n’y faisait, Asher demeurait dans le brouillard hanté par des ombres et des morceaux de souvenirs. Bien sûr, il était ravi pour sa fiancée et mettait tout en œuvre pour entretenir ce bonheur naissant ; allant jusqu’à renier (parfois) le sien. Mais cette fois, pourvu d’un regain de motivation et de quelques informations distillées au compte-goutte, l’ancien militaire était enfin prêt à se lancer à son tour. Mais puisqu’il était question du Centre par le biais de « la » Fitzgerald, Ash préférait ne pas trop insister pour ne pas mettre à mal la légèreté de ce moment à deux. Il voulait aussi se focaliser sur le meilleur avant de devoir affronter le pire.

Ainsi, évoquez cette famille récemment retrouvée, sonnait comme une évidence. Ash pouvait aussi savourer par procuration la joie de sa fiancée pas avare en détails. Cependant, la jeune femme semblait légèrement anxieuse, bien qu’impatiente de retrouver sa mère le lendemain. Mais plus encore, elle craignait que Rose émette quelques interrogations sur l’enlèvement de sa fille ; une attitude somme toute logique pour une mère. Pour dédramatiser, Ash demanda alors presque naïvement, comment il devait nommer Rose, ce qui fit immédiatement sourire l’intéressée.

 — Effectivement, il vaudrait mieux que tes parents soient au courant que je compte te passer la bague au doigt. Auquel cas, je vais devoir la jouer “traditionnaliste” et peut-être aller demander ta main à ton père. Mince, imagine qu’il me déteste. C’est connu, les pères sont très protecteurs avec leur fille.  Et voilà qu’à présent c’est Asher qui appréhendait la rencontre. Quel retournement de situation inattendu ! — Au pire je me peux me raccrocher à la douceur de ta maman.  La légèreté était à nouveau de mise, bien que l’appréhension de Kassandra demeure. Il est vrai qu’en de telles circonstances, il était difficile d’appréhender les choses, mais plus encore de trouver les bons mots pour ne pas effrayer madame Watson. Ash, jamais à court d’idées, se lança, espérant parvenir à apaiser sa fiancée.

— Mieux vaut une vérité partielle qu’un mensonge total.  Il serra un peu plus fort la main de la jeune femme pour lui rappeler sans avoir à le dire, qu’il était là pour elle.  — Tu n’as pas à me remercier, tu sais. J’aime me dire que tout ce qui arrive devait se passer et que nous étions donc destinés à nous rencontrer.  Il ferma les yeux au contact des lèvres de la jeune femme contre les siennes avant de lui murmurait un « je t’aime » qui n’appartenait qu’à eux. Passé ce moment riche en douceur, ils s’en allèrent retrouver l’intérieur de leur petit chez eux. La nuit n’appartenait qu’à eux dès lors.

Asher dormit très peu ; juste ce qu’il fallait. Il se posait (trop) beaucoup de questions allant jusqu’à se demander si c’était une bonne idée que celle de se rendre à Briarcliff Manor. Après tout, les lieux étaient liés au Centre et abrités des malades mentaux ; rien de bien réjouissant en somme. Cependant, c’était la seule piste d’Asher et il ne pouvait se résoudre à abandonner, si près du but. Il quitta donc la maison au petit matin, prenant le temps de déposer un petit mot à sa belle.

Profite bien de ta journée riche en émotion.
Je t’aime
À ce soir
Ash

Avec précaution, il plia en deux le petit mot avant de récupérer les clés de son pick-up et de prendre la route direction Briarcliff Manor. Il lui fallut bien une trentaine de minutes avant d’enfin apercevoir les hautes tours des lieux. Un léger brouillard encerclait la bâtisse la rendant encore plus menaçante. Ash resta quelques minutes dans sa voiture à observer l’imposant bâtiment. Plusieurs personnes entraient et sortaient dont quelques infirmières avec des patients qui peinaient à se déplacer sans aide.

 — Aller Asher, ce n’est pas le moment de flancher !  Il se tapota les joues, son portable se mit alors à vibrer avec insistance. Il le sortit presque aussitôt de sa poche pour s’enquérir du contenu du SMS qui venait de lui être envoyé. Le numéro était inconnu, mais cela n’arrêta point l’ancien militaire qui fit glisser la fenêtre du bout de son doigt.

« Demandez à parler à Joséphine. »

Bien que le message ne soit pas signé, Ash ne doutait point de l’identité de la personne à l’origine de cette information. Mâchoires serrées, Collins prit une grande inspiration avant de reporter son regard sur son téléphone. Du bout du doigt, il fit glisser une autre fenêtre qui le mena à sa conversation avec Kassie.  Je suis sur place. Souhaite-moi bonne chance.  Le message envoyé, il rangea son téléphone et sortit enfin de son véhicule pour regagner l’intérieur du bâtiment. Ensuite, il demanda à parler à une certaine Joséphine, ce qui sembla prendre la réceptionniste au dépourvu, car de toute évidence il n’y avait aucune personne pourvue de ce prénom. Par chance, une femme plus âgée passant par là, fit savoir au nouvel arrivant qu’il y avait bien une Joséphine parmi les patients. Et c’est ainsi qu’Asher fut accompagné jusqu’à un jardin où quelques patients et patientes prenaient l’air.

Elle était là, assise dans un fauteuil roulant, la chevelure blanchie par des années de solitude et de tourments. Elle avait le regard perdu dans le vague et semblait ailleurs. Lorsqu’enfin elle redressa son visage et croisa le regard de son invité, elle prit vie presque instantanément. « Nathan c’est bien toi ? » demandait-elle la voix tremblante en saisissant les mains d’Asher qui l’observait avec intérêt, il n’en demeurait pas moins inquiet. — Vous êtes Joséphine c’est ça ?  Elle acquiesça surprise de constater qu’il n’était finalement pas question du dénommé Nathan. « J’ai encore oublié de fermer le parc de Gabriel c’est ça ? » Gabriel, ce prénom, il ne le connaissait que trop bien ce qui rendait le trouble plus grand.  — Joséphine, on m’a dit de venir ici, de vous parler. Vous auriez des réponses pour moi.  L’intérêt de la vieille femme se fit plus grand encore et à nouveau son regard prit vie lorsqu’Asher se présenta à elle.

— J’ai besoin de savoir. Êtes-vous ma mère ? Qui suis-je ? Sullivan est mon vrai nom c’est ça ?  Elle continuait à l’observer, mais demeurait silencieuse mettant ainsi la patience d’Ash à rude épreuve. C’est alors qu’elle sortit quelque chose de sa poche. Il s’agissait d’un cliché qu’elle tendit aussitôt à son interlocuteur. « C’est nous ! » fit-elle entendre alors que l’ancien militaire posait son regard sur le cliché d’une famille composée de deux enfants. Joséphine apposa son doigt sur l’aîné « C’est toi ! » Une foule de flashbacks assaillit alors l’homme qui parvint à se rappeler le moment précis où cette photo eut été prise. Derrière l’objectif se trouvait le sosie parfait de mademoiselle Parker avec quelques années en plus.

« C’est Catherine qui a pris la photo quand nous sommes arrivés. Elle était si gentille avec moi. » Une larme perla sur la joue de Joséphine ce qui émeut presque aussitôt ce pauvre Asher.  — Je vais te sortir d’ici.  Ce n’était pas des paroles en l’air, il avait bien l’intention de le faire.  — Je suis là maman…  Sa voix tremblait et il demeurait bien incapable de contrôler ses émotions à présent. Cependant, il résista mal à l’envie de serrer cette mère qu’il retrouvait enfin. Joséphine ferma les yeux pour mieux profiter de cette étreinte et du peu de lucidité qu’elle avait encore pour l’instant. Elle savait que ce n’était qu’une question de temps avant qu’à nouveau le brouillard ne l’assaille.  — Je vais revenir ! lui murmurait-il à l’oreille avant qu’une infirmière ne vienne interférer ces émouvantes retrouvailles. Le temps de la médication avait sonné et ce pauvre Ash ne pouvait y soustraire sa mère. Mâchoires serrées, il la vit s’enfoncer à nouveau à mesure qu’elle s’éloignait de lui.

C’est le cœur lourd qu’il quitta les lieux. À peine assis derrière son volant, il se mit à le frapper avec vigueur avant de se reprendre un court instant. Il profita de cette accalmie sentimentale pour envoyer un autre SMS à Kassandra.  J’ai retrouvé ma mère. Je rentre.  Le message envoyé, il reprit la route. Le brouillard avait finalement gagné toute la côte rendant la circulation plus difficile. Il remarqua cependant deux phares dans la brume. À en juger par la vitesse avec laquelle ils se rapprochaient, le véhicule allait sous peu coller le pick-up d’Asher. Ce dernier entreprit d’accélérer légèrement pour garder un peu de distance. Il n’aimait pas ça. La sombre berline continuait à accélérer — Hey mais ça ne va pas ?  Il klaxonna pour faire entendre son mécontentement, mais de toute évidence, le conducteur n’en avait que faire. Il tapa presque aussitôt l’arrière du pick-up.

L’espace d’un instant, il se revit à l’âge de quatorze ans avec son père dans la voiture. Nathan Sullivan tentait tant bien que mal de rassurer ses deux fils, alors qu’à l’arrière du véhicule, une berline aux vitres teintées n’avait de cesse de leur rentrer dedans. Le petit Gabriel pleurait à chaudes larmes.  — Ca va aller petit frère ne t’en fait pas  n’avait de cesse de répéter Asher. L’adulte se reprit alors, il donna un dernier coup de frein, mais c’était trop tard, il venait de perdre le contrôle de son véhicule…

Comme toujours, Asher avait été de bons conseils, il avait su rassurer sa fiancée qui se posait toujours un millier de questions quant aux situations somme toute les plus normales pour un humain lambda. Mais pour sa part, Kassandra découvrait ce que c’était que d’avoir des parents, à passé trente-deux ans. Et même si Ash’ n’était pas le plus calé en relations familiales, lui-même en ayant été privé, il connaissait mieux tous les déroulements des rencontres et comment sociabiliser.
Leur petit pic-nique s’acheva comme il avait commencé, dans la douceur. Kassie sentait qu’Asher dormait mal, pour lui aussi, la journée du lendemain serait sans doute cruciale, et toute compatissante qu’elle était, la caméléone avait passé la nuit en lui tenant la main.

Finalement, l’ancien militaire s’était réveillé le premier. Quand elle était de congé, Kassandra profitait d’une chose qu’elle n’avait pas connue pendant ses vingt-cinq années d’enfermement : la grasse matinée ! Et elle avait constaté le grand bien que cela lui faisait de dormir. Lorsqu’elle ouvrit les yeux, elle remarqua avec plaisir le petit message laissé sur un bout de papier par son fiancé. Sourire aux lèvres, elle prit son téléphone portable pour lui envoyer un message d’encouragement qu’il découvrirait quand il aurait stoppé son véhicule, car Kassandra savait qu’il avait un peu de route à faire.

« Merci pour ton petit mot. Je t’aime, bonne chance, je pense à toi. »

Puis, elle se prépara pour aller rejoindre sa mère. Une fois douchée et habillée, elle prit la peine de lui cueillir des fleurs dont elle entoura les tiges avec un joli ruban bleu. Elle n’avait aucune idée de pourquoi elle faisait cela, mais elle avait l’intuition que cela lui plairait. Puis, elle se rendit chez Rose Watson. Sur le trajet, la brunette se demanda si elle ne devait pas reprendre le nom de ses parents, le temps que le mariage avec Asher soit effectif. Puis elle se questionna sur le danger potentiel que son vrai nom soit utilisé… Mais finalement elle arriva chez les Watson. Rose ainsi que Kassoulet le chien l’accueillirent. Les sourires et la joie furent de mise, l’émotion aussi, et comme Kassie le pressentait, les questions qui fâchent. Bien entendu, elle avait repensé à sa conversation avec Asher, et donc avait opté pour « une vérité partielle » qui valait mieux qu’un mensonge total.
Au cours de cette après-midi, elle reçut le message de son fiancé qui disait qu’il était arrivé, auquel bien entendu elle avait répondu, et finalement celui qui disait qu’il avait retrouvé sa mère.

« Ash c’est merveilleux, j’ai tellement hâte que tu me racontes ! Je t’aime, à tout à l’heure ! »

Elle était bien sûr arrivée plus tôt que lui à la maison, et pour fêter la grande nouvelle, elle se décida à cuisiner elle-même. Elle chercha donc un tuto sur internet pour une recette pas trop difficile d’un plat que son amoureux aimait. Après de longues minutes à éplucher des légumes, faire cuire des oignons et préparer une sauce, elle enfourna le plat à gratin. Un gratin de macaronis. Elle savait que les pâtes faisaient partie des plats qu’il aimait, et cette recette avait l’air abordable pour une personne comme elle qui n’avait approché une cuisine que depuis récemment.
Seulement, le temps passait, le plat était cuit depuis un moment, et Asher n’était toujours pas rentré… Le message disant qu’il se mettait en route datait maintenant de plus de deux heures et la caméléone avait eu le temps de cuisiner, ranger, prendre une douche et se changer, et toujours aucune nouvelle de son fiancé. Inquiète, elle se décida à l’appeler, après tout, avec le bluetooth, il pouvait répondre en conduisant… Seulement, aucune tonalité. Le coeur serré, Kassandra commença à paniquer et s’imaginer mille et un scénarios, tous plus funestes les uns que les autres. Elle ne savait qui appeler,ni que faire, figée par la peur et l’angoisse.

Un flot d’images assaillit l’esprit d’Asher ; une infinité de souvenirs entrechoqués de rêves, peut-être même des illusions. Tout semblait si flou, si sombre à présent et que dire de cette sensation aussi étrange que désagréable qui assaillit l’ensemble de votre corps, aussi lourd qu’une pierre maintenant. Les cris de Joséphine résonnèrent au loin, tandis que Nathan cherchait désespérément à la calmer, en vain. Puis ce fut les pleurs d’un bébé qui retentirent dans la tête d’Asher, tout comme une liste de prénom et des visages familiers au même titre que le patronyme Sullivan qui revenait encore et encore. L’accident de voiture se répéta, enfonça progressivement Asher dans l’inconscience.

Les nuages s’assombrissaient à mesure que le temps passait et voilà que déjà la pluie se mettait à tomber avec intensité. Une bagnole, garée sur le côté, les warnings en évidence, signalait aux autres automobilistes qu’il fallait ralentir à présent. Cela faisait une vingtaine de minutes que l’accident avait eu lieu ; et enfin tout en son et lumière, l’imposant camion de pompiers fit son arrivée suivit de près par la police qui se chargea de fluidifier la circulation pour éviter un sur accident.

« On le perd ! » Asher se sentait partir au loin, comme dissocier de son propre corps alors qu’au-dessus de lui, les secouristes procédaient à un premier massage cardiaque tout en veillant à le transporter avec une infinie précaution tant les blessures étaient multiples. Puis les paroles se firent peu à peu inaudibles jusqu’à ne plus rien entendre pour ensuite s’engouffrer dans un inquiétant trou noir sans perspective de sortie et d’avenir qui plus est.

Le trajet fut long pour les secouristes qui entamèrent plusieurs massages cardiaques jusqu’à l’arrivée aux urgences où le relais fut effectué sans attendre pour conduire au bloc et le plus rapidement possible l’ancien militaire. Et si les médecins s’échinaient à sauver Asher, plus loin l’on cherchait à s’enquérir de l’identité de ce dernier pour contacter sa famille et les prévenir de l’accident. L’investigation dura quelques minutes, par chance l’ancien militaire avait ses papiers sur lui ce qui rendit l’identification plus aisée.

L’électrocardiogramme donnait le rythme bien malgré lui faisant résonner son odieux et mortifère bip robotique. Rien n’était facile présentement et il suffisait de voir le regard de certains protagonistes en blouse blanche pour comprendre à quel point l’issue semblait incertaine.

Combien de temps avait-elle attendu ainsi à faire les cent pas dans le salon, son angoisse grimpant en intensité de minute en minute face à l’absence de son fiancé ? Kassandra se sentait perdue dans un brouillard d’incertitude. Ne pas savoir, voilà bien la pire des choses pour un caméléon habitué à emmagasiner les informations et le savoir.

Soudain, un sonnerie la sortit de sa torpeur. Son téléphone portable. Elle se rua dessus, c’était l’hôpital. On lui demandait de venir prêter main forte au service des urgences. Elle hésita, se demandant si elle ne devait pas rester ici à attendre le retour de son fiancé… avant de demander si on ne leur avait pas emmené un Asher Collins. Le standardiste chercha rapidement… Les identités des derniers arrivés venaient d’être donnés. Bingo, oui, il était là ! Kassie raccrocha après avoir dit qu’elle arrivait et appela un taxi. Elle n’avait pas le choix, Ash était parti avec le pick up.
En son absence, le téléphone de la maison avait sonné, pour avertir le foyer de Mr Collins qu’il était au service des urgences de l’hôpital de Blue Cove. Une information que Kassandra savait déjà. Il lui avait semblé que le taxi avait mis une éternité à arriver. La ville n’était pas si grande pourtant ! Son coeur battait plus vite et plus fort à mesure qu’ils s’approchaient de l’hôpital. Elle sortit en trombe du véhicule et se précipita à l’accueil pour savoir où en était le patient Asher Collins.

«  Toujours au bloc ».

La caméléone se précipita sur place, elle n’avait même pas pris le temps de passer à son vestiaire se changer et prendre une blouse. Elle en attrapa une jetable qu’elle enfila avant d’aller en vitesse procéder au lavage de mains et enfiler un masque de rigueur pour entrer dans le bloc de chirurgie. Les larmes commencèrent à lui monter aux yeux avant qu’elle ne franchisse les portes.

« - Sandra, j’ai déjà un interne avec moi, allez voir au Bloc D... »

Elle le coupa.

- Non docteur, c’est ce patient que je veux assister.

Il était rare d’entendre Kassandra aussi ferme. Son regard se planta dans celui de l’autre interne qui recula d’un pas. Le coeur de la brunette battait à s’en rompre. Elle s’approcha pour observer l’étendue des dégâts et demanda à l’autre interne de lui faire le topo. Ce qu’il fit. Le chirurgien, lui, continuait à opérer.

- Stop ! Attendez ! La radio des cervicales montre le détachement d’un morceau de C3 ici. C’est trop proche de la moëlle épinière, il faut le lui retirer tout de suite pour éviter une paraplégie.

Le chirurgien s’offusqua d’être coupé dans ce qu’il faisait avant de jeter un regard noir au premier interne qui n’avait pas décelé ce détail.

- S’il vous plaît docteur, faites-le, je m’occupe de suturer à votre place.

Le chirurgien accepta ce qui rassura Kassandra. Mains gantées, elle prit la place du titulaire pour achever la suture de l’organe en question tandis qu’il passait de l’autre côté, prêt à attaquer une incision dans la nuque.

« - Vous savez Sandra, il est sûrement perdu. »

- NON ! Certainement pas ! Si vous pensez comme ça, c’est que vous avez déjà oublié ce pourquoi vous avez choisi ce métier ! Vous devez le sauver ! J’ai fini de suturer. On le retourne.

Le chirurgien était partagé entre l’amusement de voir son interne aussi dévouée malgré la cause perdue, et l’énervement de la voir soudain aussi insolente.
L’équipe positionna le patient le côté pour préparer l’incision. Kassandra restait à côté pour observer et s’assurer que son titulaire ne manque rien.
Suite à cela, il y avait encore d’autres blessures, moins grave à réparer. On lui expliqua le contexte de l’accident qui avait mené le patient ici. D’autres résultats arrivèrent dont l’IRM.

- Un hématome sous-dural s’est formé, il faut le drainer sans attendre !

Le chirurgien en était rendu à laisser faire son interne. Pour lui, le patient ne se réveillerait jamais, alors autant laisser pratiquer ses étudiants. Il valida la recommandation de Sandra et l’autorisa même à pratiquer le trépan pour évacuer l’hématome.

Au total, Asher resta plus de six heures sur la table d’opération. Après une bonne heure en salle de réveil, il fut conclu qu’il se trouvait à présent dans le coma et qu’il faudrait attendre son réveil. Ce ne fut qu’après que le titulaire réalisa qu’elle portait le même nom que lui. Kassandra dût expliquer que c’était son fiancé et qu’elle avait déjà pris son nom. Elle se fit passer un savon, puisqu’il était hautement déconseillé de traiter des membres de sa famille, mais pour l’heure, la caméléone ne voulait qu’une chose, être au chevet d’Asher.

Assise à côté de lui, lui tenant la main, les yeux embrûmés de larmes, elle était loin de se douter qu’elle se retrouverait ici chaque jour pendant encore plusieurs longues semaines.

« Asher » ce prénom revenait sans cesse, mais se brouillait si bien qu’il ne parvenait plus à le comprendre malgré les répétitions. Secoué de toutes parts, Asher continuait à avancer malgré tout, mais il faisait tellement noir qu’il se devait d’être précautionneux pour éviter le danger. Mais quel danger ? Et où était-il à présent ? Dans le doute, il poursuivait sa progression, persuadé que le mouvement lui permettrait de se défaire de l’emprise ténébreuse.

Il était à l’hôpital, entre les mains expertes de celle que l’on appelait Sandra. Personne ne se doutait de sa véritable identité et de ce qu’il représentait pour la jeune femme qui ne ménageait pas ses efforts pour le maintenir en vie malgré le fait qu’il s’enfonce progressivement et mette à mal, bien malgré lui, la perspective de retrouver un jour, le grand amour de sa vie.

« Asher ! » La voix semblait si loin et inaudible qu’il se demandait s’il était question de lui et pas de quelqu’un d’autre. Il se mit alors à sentir une espèce d’air iodé, puis se rendit compte que les ténèbres se dissipaient progressivement autour de lui, tout comme il se rendit compte qu’il était pieds nus et qu’il caressait la surface de l’eau. Le sable aussi était de la partie, rendant la marche encore plus agréable. Le chant des goélands au loin, titilla l’ouïe de l’ancien militaire qui leva les yeux au ciel pour mieux profiter du spectacle.

Dans le firmament sans nuages, le soleil était à son zénith et couvrait de sa chaleur quiconque l’observait. Il fit quelques pas avant de se rendre compte qu’il n’était plus seul à présent. Effectivement, assis sur les rochers, un homme contemplait l’horizon. Asher s’en approcha avant de prendre place à ses côtés, surpris qu’ils ne soient que deux sur la vaste plage ensoleillée. Mais l’individu avait beaucoup parlé, ce qu’il disait demeurait incompréhensible aux oreilles d’Asher qui tenta de le lui faire savoir à plusieurs reprises.

 — Qu’est-ce que je fais ici ? Et qui suis-je ?  Le simple fait de se poser ces questions le fit se sentir idiot et pourtant, il avait beau se tripatouiller les méninges, rien ne lui revenait en mémoire.  — C’est comme si tout avait été effacé en un claquement de doigts.  Il continuait à parler bien que l’homme semble peu réceptif, ce qui frustrait Asher qui en arrivait à se demander si tout n’était finalement pas un bien étrange rêve.  — Dites, on va rester comme ça longtemps ?  L’homme lui désigna l’horizon et alors qu’il pensait apercevoir le soleil, Ash découvrit une voiture, du moins sa silhouette, qui prenait l’eau et commençait à couler.  — Je ne comprends pas ?  Il s’apprêtait à se lever pour se précipiter vers l’océan, mais une force invisible sembla le retenir. Il se retourna aussitôt et constata avec surprise qu’il était à nouveau seul sur la plage, la voiture avait quant à elle disparu.

Plusieurs minutes ? Plusieurs heures ? Plusieurs jours ? Combien de temps s’était-il écoulé sur cette plage déserte ? Il n’en avait pas la moindre idée et peinait à comprendre ce qu’il faisait ici. « Hey ! » Surpris et par la voix et par le fait qu’elle soit audible, il se retourna et fut ravi de revoir l’homme qu’il avait rencontré à son arrivée. Aussitôt, il se précipita pour l’aborder.  — Vous êtes réel ?  Il fit non de la tête ce qui accrut l’incompréhension de l’ancien militaire. L’homme qui avait tout au plus, une dizaine d’années de plus, posa une main bienveillante sur son épaule avant de faire entendre cette étrange phrase. « Asher Sullivan. N’oublie pas fiston ! » Ash se sentit comme aspiré et ouvrit les yeux. Il était à l’hôpital, telle fut sa première constatation avant que la douleur n’assaille pour la première fois son esprit.

«…  Il grimaça, mais demeurait incapable de parler pour l’heure.

Deux semaines interminables, quatorze jours, trois-cent trente-huit heures, vingt-mille cent-soixante minutes… qui semblaient durer tout autant de journées, au cours desquelles l’inquiétude était au beau fixe du côté de Kassandra qui passait le plus clair de son temps au chevet de son fiancé plongé dans le coma après un mystérieux accident de voiture qui avait manqué de coûter la vie de l’ancien militaire qui faisait battre le coeur de la caméléone, mais cette fois, des battements rythmés par l’angoisse qu’il n’ouvre jamais les yeux. D’un naturel pourtant optimiste, Kassie oscillait entre l’espoir et son total opposé, surtout depuis que Lexie lui avait annoncé que l’épouse de son Peter était finalement décédée après plusieurs années dans le coma. Une telle chose ne pouvait pas arriver à Asher ! Et pourtant, ces drames arrivaient. L’accident avait été d’une violence inouie, mais le plus étrange restait le fait qu’aucun autre véhicule accidenté n’avait été retrouvé sur les lieux, et visiblement aucune preuve, rien. Seulement le pick-up d’Ahser en très mauvais état, pour ne pas dire « foutu », comme l’aurait exprimé le propriétaire.

Après la première semaine, Kassie voulut reprendre le travail. De toute façon elle serait dans l’hôpital et passerait chaque fois qu’elle aurait une minute de libre, et cela lui permettrait de s’aérer un peu le cerveau. Mais jugeant la situation délicate, ses supérieurs l’avaient affectée à des tâches qu’elle qualifiait « de débutant », à savoir recoudre des plaies superficielles, ce genre de chose. Pas de bloc pour « Sandra Collins » pour le moment. Tant pis, au moins, elle rendait quand même service.

C’était l’heure de la pause déjeuner, et comme chaque jour, elle venait la passer dans la chambre de son bel endormi. Elle en profitait pour vérifier ses constantes, s’assurer qu’on l’avait un peu changé de position pour éviter les escarres, et ne manquait pas bien sûr de lui parler, lui dire combien elle l’aimait, et lui lire les nouvelles, celle d’un journal qu’il achetait quotidiennement. Elle avait sa main dans la sienne tout en lisant quand soudain, le son de l’électrocardiogramme fit entendre une nouvelle rythmique un peu plus vive. Souvent, c’était le signe d’un réveil imminent. Kassie en lâcha le journal, bouche bée, rivant son regard tour à tour sur la machine et sur son fiancé.

- Asher ? Tu te réveilles mon amour ? Je suis là, réveille-toi mon chéri, dit-elle d’une voix tremblante.

Par chance, il n’avait plus eu besoin de respirateur artificiel, donc pas besoin de l’extuber. Kassandra vit le visage d’Asher émettre quelques rictus, avant d’enfin ouvrir les yeux. La brunette ne put retenir ses larmes de joie.

- Asher ! Enfin tu es là, comment tu te sens ?

Le voyant incapable de parler, elle lui prit les mains.

- Est-ce que tu peux serrer mes mains ?

Quelle joie, quel soulagement.

- Bien, n’essaie pas de parler si c’est trop fatigant, on va y aller doucement. Est-ce que tu as mal quelque part ? Serre une fois pour oui, deux fois pour non.

Elle attendit sa réponse. Elle savait qu’il souffrait d’analgésie congénitale, ce qui faisait qu’il ne sentait pas la douleur, mais parfois, certains traumatismes pouvaient être ressentis quand même.

On se demande toujours ce qui vient après la mort ? Y a-t-il un long tunnel à traverser pour se rendre vers un ailleurs plus serein ? Y a-t-il un ailleurs ? Cette interrogation semblait soudainement résonner dans le vide. Plus rien n’avait de sens, encore moins l’avenir, sans perspective pour Asher. Il demeurait couché dans un lit d’hôpital, branché à plusieurs appareils qui maintenaient sa survie. Mais la plage sur laquelle il avait élu domicile n’arborait plus la même atmosphère. Et pour cause, le soleil avait beau continué à briller, il ne dégageait de lui plus aucune chaleur et les couleurs d’ordinaire si vives, semblaient soudainement si ternes, rendant les lieux hostiles, assez pour souhaiter s’en aller. Mais comment ? À bien y regarder, l’horizon s’étirait sur du vide, c’était vertigineux, autant que la présence de toutes ces silhouettes sans visage.  — C’est un cauchemar et je vais me réveiller d’ici quelques minutes.  Mais il n’était sûr de rien, tout comme il ignorait depuis combien de temps il était inconscient. Avait-il seulement compris qu’il était dans le coma ?

L’homme qu’il avait rencontré à son arrivée était là mettant à mal la notion de réalité de l’ancien militaire. Il le regarda une dernière fois avec bienveillance avant de lui demander de ne jamais oublier.  — Oublier quoi ? Qui est Asher Sullivan ?  Il n’eut malheureusement pas le loisir d’avoir la réponse à sa question et se retrouva comme expulsé hors de la plage. Non sans mal, il ouvrit les yeux. Il lui fallut bien quelques secondes pour s’habituer à la lumière avant de sentir la douleur assaillir l’ensemble de son corps. C’était douloureux, comme jamais auparavant, tellement que sur l’instant il n’avait même pas remarqué la présence de Kassandra. D’ailleurs, il demeurait incapable de comprendre ce qu’elle lui disait, comme si sa voix était ouverte par un filtre. Non sans difficulté, il avala sa salive, sa gorge était si sèche qu’il était incapable de faire sortir le moindre mot de sa bouche. Mais son regard demeurait braqué sur Kassandra. Elle était soulagée et lui perplexe. Une dernière fois, il mobilisa le peu d’énergie qui lui restait et fit entendre ces quelques mots certainement dévastateurs pour l’auditrice.

 — Qui êtes-vous ?  Car jamais, de mémoire, il n’avait rencontré cette personne.

 voir de nouveau l'azur des iris d'Asher avait été le moment le plus réconfortant que Kassandra ait connu depuis deux semaines. Du moins, c'était avant de l'entendre parler. Jamais elle n'aurait cru que le son de la voix de son fiancé puisse être à ce point une source d'angoisse. Ou plutôt le contenu de ses propos. Le cœur de la caméléone s'emballe de plus belle alors qu'elle avait ses mains dans les siennes.

- Je...

Elle sentit les larmes lui monter aux yeux et retira lentement ses mains.

- C'est normal... C'est tout-à-fait normal d'avoir des pertes de mémoire après un choc traumatique, déclare-t-elle davantage pour se rassurer elle-même que pour informer le patient.

La brunette se détourna une seconde durant, pour essuyer une larme qui roulait sur sa joue, avant de revenir vers lui en souriant autant que possible.

- Ne te fatigue pas trop. Je suis ta... Enfin... Sandra. On vit ensemble, on est... Fiancés.

Elle n'osait pas lui donner son vrai nom alors qu'il émergeait à peine en étant amnésique. Une information compromettante aurait pu fuiter sans qu'il ne le fasse exprès. Alors qu'elle parlait, Kassandra lui servit un verre d'eau.

- Tu as peut-être soif. Fais doucement. Tu as été dans le coma pendant quatorze jours et huit heures, approximativement.

Elle prit son stylo-lampe et s'approcha de son visage.

- Tu me laisses vérifier tes pupilles ? demanda-t-elle un peu crispée.

L'interne s'exécuta avant de ranger son outil.

- Réflexes normaux. Tu vas devoir passer quelques tests et si tout est bon, tu pourras rentrer à la maison d'ici quarante-huit heures.

Elle se rapprocha de lui une nouvelle fois, tremblant presque d'angoisse à l'idée qu'il ne se rappelle pas d'elle.

- Asher, de quoi tu te souviens ? Si... Si c'est trop tôt pour toi de parler, on peut attendre. Mais la police voudra te poser des questions. Si tu as mal quelque part, dis-le moi.

On pouvait sentir l'émotion dans sa voix, mais Kassandra faisait de son mieux pour maîtriser ce flot qui la submergeait.

 Il cligna des paupières à plusieurs reprises. La lumière lui semblait si forte à présent, assez pour qu’il lui faille un temps d’adaptation. Et que dire de la douleur qui l’assaillait de partout ? Jamais encore, il n’avait connu pareille souffrance, mais il prenait sur lui pour contenir le mal. « Bon sang où est-ce que je suis ? » Les couleurs et l’agencement de la pièce ne laissaient aucun doute sur la localisation ; les questions n’en demeuraient pas moi nombreuses dans la tête de ce pauvre Asher. Mais de toute évidence, il n’était pas seul ; un constat qui le rassura avant de découvrir le visage de son interlocutrice. « Elle » était rassurée et redoublait de gestes pour le faire savoir. Asher, quant à lui, restait interdit de prime abord. Il avait beau chercher, rien n’y faisait ; « elle » demeurait, malgré sa gentillesse, une parfaite inconnue qu’il pensait découvrir pour la toute première fois.

Elle retira aussitôt ses mains, le regard plus brillant encore. De toute évidence, elle aussi semblait sous le choc. L’ancien militaire qui l’observait avec attention se sentit presque immédiatement coupable d’avoir mis à mal l’espoir de cette femme en à peine une fraction de seconde. Puis il remarqua le badge épinglé à sa poitrine avant d’écouter avec un intérêt certain ce qu’elle disait avec conviction.

— Vous êtes médecin ? Il aurait pu lui poser tout un tas d’autres questions, mais il avait choisi la plus basique d’entre elles. — Qu’est-ce qui m’ait arrivé ? La demoiselle venait de lui tourner le dos, surement pour essuyer les larmes qui menaçaient de dévaler son visage et aussi parce qu’elle cherchait à reprendre contenance. Ash lui observa sommairement les lieux avant d’essayer de se redresser non sans mal. À nouveau, la douleur le rappela à l’ordre et incapable de lutter, il laissa paraître quelques grimaces sur sa figure. La belle brune se retourna alors en tâchant d’arborer son plus beau sourire.

— Qui êtes-vous ? se risquait-il à demander. Elle se nommait donc Sandra et vivait avec lui, mais plus encore, elle était sa fiancée ce qui lui conférait une place on ne peut plus importante dans sa vie. Ash sentit son cœur se serrer en prenant connaissance de cette information. Il avait beau trifouiller sa mémoire (ou ce qu’il en restait), rien n’y faisait, aucun souvenir ne venait à lui pour attester les informations délivrées par cette fiancée.

— Je ne comprends pas… Les phrases étaient courtes, trop pour lui, mais n’étant pas capable de mieux sur l’instant, il devait s’en contenter tout comme il devait accepter d’être aidé ne serait-ce que pour boire un peu. Sandra l’avait compris et n’hésita point à déverser un peu d’eau dans l’un des verres à disposition, ce qui lui valut un léger sourire de la part du patient qui se saisit du verre. L’eau était fraiche, assez pour que cela soit agréable, cependant le geste n’était pas aisé pour quelqu’un qui s’était ainsi retrouvé dans le coma durant deux semaines ; une information que venait de lui délivrer son interlocutrice qui crayon en main, s’apprêtait à observer plus en détail les pupilles du patient.

— Oui, faites donc.

La lumière dégageait par le stylo, aveugla légèrement Ash qui se reprit rapidement pour faciliter l’examen. Mais bon nombre de questions continuaient à tarauder l’esprit du quinquagénaire. — Quand vous dites test, vous pensez à quoi ? Il avait, de toute évidence, occulté la fin de la phrase de Sandra. Cette dernière tâchait de faire bonne figure, mais son regard humide et les quelques tremblements dans ses mains mettaient à mal le moindre de ses efforts. Asher qui reprenait progressivement ses esprits n’en demeurait pas moins mal à l’aise, car elle restait une étrangère à ses yeux et il se voyait mal lui mentir.

— Je ne me souviens de rien, pas même de qui je suis. Le regard vide, il observait l’extérieur ; plus rien n’avait de sens, pas même sa présence ici. — Et pour ce qui est de la douleur, j’aimerai vous dire que c’est gérable, mais ça l’est de moins en moins. Qu’est-ce qui s’est passé ?

  Les émotions de Kassandra étaient sens dessus-dessous suite à la révélation qui venait de lui apparaître : Asher était amnésique. Malgré la douleur que ce constat lui infligeant, la caméléone tachait de rester concentrée sur les faits positifs : il s'était réveillé. La rationalité lui rappelait aussi que c'était somme toute une réaction normale du cerveau face au traumatisme physique qu'il avait reçu lors de l'accident. Néanmoins, passé le petit moment de faiblesse, elle consentit à lui répondre tout en faisant les premiers tests.

- Oui, comme tu vois, je suis médecin, dit-elle en désignant d'un sourire gêné. chirurgien. Enfin, officiellement interne en chirurgie.

Elle avait eu beau s'être présentée et lui avoir rappelé qu'ils étaient ensemble, le pauvre Asher semblait complètement étranger à ces informations. Mais Kassandra ne perdait pas espoir, elle était d'un naturel optimiste.

- Des tests physiques surtout, pour évaluer tes capacités motrices suite au coma et à l'accident. Oui tu as un accident de voiture. Plutôt sévère, vu tes blessures. Mais eh, tu es en vie, tu es tiré d'affaire.

La brunette sentit son cœur se serrer et son esquisse de sourire rassurant se crisper.

- OK... C'est normal, tu as un un choc violent, mais ne t'en fais pas, tes souvenirs vont finir par revenir. C'est une réaction normale.

À vrai dire, c'était une chose de le savoir, c'en était une autre de le vivre. Il lui signala qu'il avait mal. Le syndrome dotn il souffrait avait été annihilé alors. Aussitôt, sans attendre, elle fit le tour du lit pour aller du côté de sa perfusion pour activer la poche d'antidouleur.

- Je te fais passer un peu de morphine. Ça va vite aller mieux. Tu risques d'avoir un peu la tête qui tourne.

Son regard se posa avec tendresse sur le visage d'Asher, hésitant et résistant de toutes ses forces à y apposer une caresse.

- Tu t'appelles Asher Collins. Tu as été militaire. Maintenant tu enseignes les sport de combat à des jeunes dans un institut.

C'était si dur de le voir la regarder comme si elle était une étrangère, mais Kassandra lui apporterait tout son soutien quoi qu'il arrive.

- Tu sais quoi ? Je vais te laisser te reposer et prévenir mon supérieur, et on va voir pour que tu puisses rentrer rapidement. Est-ce que tu aimerais ça ? Ou.. Est-ce que tu préfères rester encore un peu ici ? On fait comme tu veux, l'important c'est que tu te sentes bien.

C’était difficile pour Asher, mais ça l’était tout autant pour Kassandra qui se confrontait avec courage, à un homme (le sien qui plus est) totalement amnésique. Il le voyait bien dans le regard de la jeune femme, qui, malgré le semblant de dignité dont elle faisait preuve, ne pouvait masquer complètement son trouble. Que devait-il faire en de telles circonstances ? Devait-il faire illusion pour ne pas la blesser davantage ? Ou devait-il, en dépit de la nature de leur lien, demeurait distant comme s’il eut s’agit d’une étrangère ; chose qu’elle était à ses yeux présentement. — Si officiellement vous êtes interne en chirurgie, j’ai du souci à me faire ? tenta-t-il avec un semblant de légèreté qui venait contrecarrer la gêne de l’aspirante chirurgienne, dont il ignorait tout, jusqu’aux capacités extraordinaires.

Peu avare en informations, Kassandra qui s’était présentée sous le prénom de Sandra délivra de précieux renseignements sur la nature de leur relation, ce qui chagrina davantage l’ancien militaire. — Je suis désolé de ne pas me rappeler se sentait-il obligé de justifier après qu’elle lui eût appris qu’ils étaient fiancés. Il avait beau chercher, rien ne lui revenait, ce qui rendait l’échange encore plus malaisant. Par chance, Kassy savait rebondir mieux que personne et s’adapter à n’importe quel contexte comme tout bon caméléon qui se respecte.

— En vie, mais à quel prix ? Ce n’est pas très enviable comme situation, car c’est tout sauf agréable de se réveiller dans un lit d’hôpital sans aucun souvenir. Une fois encore, l’ancien militaire se confronta à la rudesse de la situation par le biais de celle qui s’était présentée comme étant sa fiancée. La pauvre, elle faisait clairement de son mieux, alors qu’à l’inverse l’amnésique ne semblait enclin à ne fournir aucun effort pour améliorer sa condition. — Et si mes souvenirs ne reviennent jamais ? Car contrairement à elle, il n’était pas d’un naturel optimiste, du moins c’était le cas avant leur toute première rencontre.

La douleur, qui jamais ne lui avait tenu compagnie, se manifesta dès lors rendant la conversation plus difficile encore. N’étant pas habitué à ce genre de situation, le pauvre Ash fut rapidement mis à mal et incapable de dompter la vague aiguë qui prenait impunément possession de son corps abimé. … C’est si soudain… Il serra la mâchoire faute de mieux alors que « Sandra » faisait le tour du lit pour venir activer la poche d’antidouleur près de la perfusion.

— Merci. Il était reconnaissant, mais plus encore, il se sentait redevable pour ce qu’elle avait fait et ce qu’elle s’apprêtait à faire dans un futur proche. Et puis il fallait être idiot pour ne pas remarquer toute la tendresse dont elle l’affublait. Mais pour l’instant ce n’est pas d’affection dont il avait besoin, mais de réponse.

— Donc j’ai été militaire et maintenant je me retrouve à enseigner les sports de combat à des gosses dans un institut ? Il marqua un arrêt, pas sûr d’avoir tout saisi. — Vous avez dit Asher Collins c’est ça ? C’est mon vrai nom ? Il repensa à ce qui lui semblait un rêve à présent. L’homme s’était montré ferme quant au fait qu’il se nomme Asher Sullivan. Cela n’avait pas de sens, comment pouvait-il se fier à ça alors qu’il se confrontait à la réalisé et que cette Sandra était la plus à même de lui dire qui il était avant l’accident ? — Je crois que je n’ai pas besoin de repos puisque vous dites que j’ai passé deux semaines dans le coma. Et de vous à moi, l’hôpital ce n’est pas l’endroit le plus chaleureux de l’univers. Alors si je pouvais vite mettre les voiles, ça m’arrangerait.

 Comme toujours, Kassandra avait du mal à cerner dès le début le second degré. Elle secoua la tête pour répondre à Asher en essayant d’être rassurante.

- Non, au contraire…

Avant de comprendre qu’il plaisantait. Même dans cet état, son humour ne le quittait pas. Quelque part, c’était rassurant.

- Oh… tu plaisantais… Bon, ça au moins, ça ne change pas. C’est une bonne chose. Et pitié, arrête de me vouvoyer, d’accord ? demanda-t-elle avec douceur.

Il s’excusa de ne pas se rappeler, ce qui lui serra le coeur. Aussitôt, elle posa sa main par-dessus celle de son fiancé et patient.

- Mais non voyons, ne t’excuse pas, ce n’est en rien de ta faute. Et ça va revenir, il faut juste faire preuve de patience, même si je sais que c’est difficile.

Néanmoins, les propos qui suivirent firent l’effet d’un coup de massue à la caméléone qui, pourtant, comprenait sa réaction. Néanmoins, Kassie ne pouvait se résoudre à le ménager sur ce genre de propos, elle qui voyait tous les jours au bloc des personnes moins chanceuses que lui qui ne s’en sortaient pas, ou avec des lésions bien plus lourdes et handicapantes à vie.

- Tu exagères, Ash. OK, c’est pas agréable de se réveiller dans un lit d’hôpital, mais tu sais quoi ? Toi au moins, tu t’es réveillé, et crois-moi, c’était pas gagné !

Elle s’en voulut immédiatement d’avoir répondu comme ça, mais elle aussi, ses émotions prenaient le dessus, tout son stress de ces deux dernières semaines, le manque de sommeil à veiller sur lui et s’inquiéter…

- Je te demande pardon, j’aurais pas dû dire ça. Tu as besoin de temps. Tes souvenirs vont revenir, il faut juste te ménager, et ne pas forcer sur tes neurones. On va y aller par étape, d’accord ?

La brunette délivra ensuite à son fiancé quelques informations sur lui, à commencer par son nom et son métier actuel et passé. Elle s’étonna de sa réaction.

- Ton vrai nom ? Oui, j’imagine que oui. C’est comme ça que tu t’es présenté à moi la première fois.

Elle lui proposa ensuite de tout faire pour qu’il rentre au plus vite.

- Je reviens, d’accord ? Ne bouge pas s’il te plaît, j’en ai pas pour longtemps.

L’interne sortit, alla prévenir son mentor de chirurgie ainsi que le neurologue de garde. En l’espace de trois heures, une batterie de tests fut passée et finalement, étant donné que Sandra l’accompagnait, le patient fut considéré apte à rentrer chez lui. La matinée s’acheva donc par ceci.
Kassandra poussait le fauteuil sur lequel se trouvait Asher, jusqu’à la sortie de l’hôpital, procédure obligeait. Les documents avaient été signés et les ordonnances remises. La voiture de la caméléone les attendait.

- Voilà, on rentre, dit-elle joyeusement en ouvrant la portière côté passager et l’aider à s’installer. Est-ce que ça va ?

Puis à son tour, elle prit place, derrière le volant, et ils purent se rendre dans leur petite maison hors de la ville près d’un lac. Une fois garée, Kassandra refit le tour du véhicule et aida son fiancé à sortir.

- Il fait beau, est-ce que tu veux rester sur la terrasse, ou tu préfères rentrer à l’intérieur ?