Un nouveau son... une seconde chance.

Ma belle Rose avait approuvé mon projet de me reproduire devant des gens. Ce n'était une scène de spectacle, mais il s'agissait d'un début. J'avais complètement mis ma carrière de pianiste de côté après la disparition de ma fille. Je voyais cet emploi comme une seconde chance de recommencer en quelque sorte, mais je ne me faisais pas d'illusion. J'étais plus âgé désormais, mais j'avais également une plus grande expérience en tant que pianiste car je n'avais jamais cessé de jouer durant des heures à la maison. Je passais toujours mes émotions dans les notes plutôt que dans autre chose. Je ne m'étais jamais jeté dans la nourriture ou encore dans l'alcool ou la drogue. Ma drogue était constituée de gammes, de notes et de partitions. J'avais recommencer à jouer du Bach alors que je n'en avais pas jouer depuis des années comme quoi le temps guérissait parfaitement les blessures.

Je me rendais donc au restaurant en ce mardi après-midi. J'avais acheté les pièces nécessaire et amené mes outils pour réparer le piano et l'accorder adéquatement. J'espérais que Lexa serait présente, mais je ne me faisais pas d'illusions, elle avait parfaitement le droit de prendre un jour de repos dans la semaine. Elle était sans aucun doute présente chaque week-end et je ne pouvais que la comprendre. Si j'avais un établissement de ce genre, je serais présent le plus possible. Je portais une chemise blanche et un pantalon noir. Je me stationnais avant de sortir avec mon coffre à outils particulier que je gardais pour les pianos. J'entrais sans faire attention aux gens et je me rendais à l'instrument.

J'ouvrais le dessus du piano à queue pour changer la pièce dans le mécanisme. J'étais dans ma petite bulle à travailler. Je laissais le tout ouvert avant de m'essuyer les mains. Il fallait maintenant tester la bête et regarder si le son était mieux que la dernière fois. Je souriais en coin en m'installant sur le banc assortie à l'imposant instrument. Qu'est-ce que j'allais jouer ? J'avais envie de m'amuser un peu. Heureusement, il n'y avait aucun client présent dans l'immédiat. Je réfléchissais à un morceau avant de me mettre à sourire. Je pensais à ma femme aussi qui me donnait cette chance inouïe. Je devais énormément à ma belle Rose. Elle était une partie de mon monde avec Lexie et ... Kassoulet.

Allez hop c'était partie pour un petit morceau et avant même que je ne m'en rende compte je pensais à ma Kassandra qui était perdue quelque part ou qui reposait sans avoir trouvé la paix. Je me laissais aller en écoutant le son de l'instrument. Il sonnait dix fois mieux qu'auparavant et je fermais les yeux en continuant de jouer. Autant terminé la mélodie maintenant que j'étais lancé.

Un nouveau son... une seconde chance.

J’étais très heureuse que monsieur Watson ait accepté de travailler pour moi. J’avais toujours adoré le piano, sans quoi, je n’en aurai pas acheté un. J’avais prit des cours quand j’étais plus jeune mais le temps avait filé à toute vitesse et je n’avais jamais eu le temps de m’y remettre. Nous n’avions pas de piano chez nous alors, j’en écoutais souvent et quand j’avais le temps, je me rendais à des concerts. Etant maman, épouse et ayant un restaurant à faire tourner, je ne pouvais pas faire plus malheureusement. Mais j’aimais ma vie et je ne la changerai pour rien au monde.

Ce jour-là, j’étais de repos, mais j’avais quand même décidé de passer au restaurant en coup de vent. Je ne travaillais pas mais j’avais toujours de la paperasse à effectuer et le mardi, je profitais pour aller déposer les chèques à la banque. Je me stationnais donc à ma place réservée et je descendais de ma voiture. Je saluais mes employés avec le sourire comme je le faisais toujours. Pour moi, une bonne ambiance était quelque chose d’important. Je voulais que mes employés aient envie de travailler et non le contraire. Mes clefs en main, je me dirigeais vers mon bureau.

J’entrais et je m’occupais de calculer mes chèques. Le montant correspondait et le chiffre était bon. Mes employés allaient avoir une jolie prime et j’étais ravie pour eux. Je trouvais normal que ces derniers soient récompensés pour leur effort. En voulant partir, je vis Aaron en train de travailler sur le piano. Je restais à distance ne voulant pas le déconcentrer. Je demandais à ma serveuse de préparer deux verres de thés glacé et j’allais doucement m’assoir afin de l’écouter jouer. C’était tellement beau mais aussi tellement triste. Je fermais mes yeux et je me laissais bercer par la musique.

Je sentais des larmes couler sur mes joues que je ne pouvais pas contrôler. Je pensais à la relation tendue que j’avais avec mon fils en ce moment et je m’essuyais les joues. Lorsqu’il eu terminé, je me levais pour l’applaudir. Mes employés suivirent joyeusement. Je prenais les deux verres de thés glacés et j’allais lui en donner un. « Bonjour Aaron, c’était absolument magnifique. Je ne m’attendais pas à vous voir aujourd’hui. Ceci dit, ça tombe bien, je suis en train de m’occuper des factures. Pouvez-vous me donner celles des pièces du piano afin que je puisse vous payer tout de suite ? » Je lui faisais un petit sourire. Ma mère m’avait toujours dit que les bons comptes font les bons amis.

Un nouveau son... une seconde chance.

Je vivais cette mélodie. Je ressentais chacune des notes. Je les enchaînais en fermant les yeux. Je ne le faisais que pour mon propre plaisir et celui de personne d’autre. J’étais dans ma bulle la plus complète. Parfois, lorsque j’étais dans cette genre de transe, je pouvais partir durant des heures en enchaînant les morceaux sans jamais arrêter. Je pouvais en oublier de manger et de dormir même. Rose avait l’habitude et elle venait parfois m’ordonner d’arrêter avec toute la douceur dont elle était capable. Ma Rose, ma belle et sublime Rose. Je l’aimais comme au premier jour encore. Nous avions vécu des épreuves que peu de couples sont capable de traverser ensemble. Je terminais le morceau en ouvrant les yeux et j’entendais applaudir.

La surprise était totale. Ma patronne était présente. Cette femme semblait vivre dans mon restaurant Fuyait-elle quelque chose? Était-elle heureuse? Je me posais intérieurement la question. Les employés avaient suivi et je me levais pour faire un petit salue avant de prendre un thé glacé maison que m’offrait la maîtresse des lieux.

- Bonjour Lexa. Il n’y a pas de facture pour les pièces du piano. Je vous les offre sans le moindre problème. Vous me payerez un repas avec ma femme en échange tiens.

Je lui faisais un petit sourire avant de m’appuyer dos au piano et la regarder dans les yeux. J’étais un homme généreux depuis toujours. Je l’étais de mon temps, de mes compétences et de ma personne. Je n’attendais jamais rien en retour. La vie se chargerait bien de me le rendre un jour ou l’autre non?

- Vous prenez congé parfois Lexa? C’est bien beau le travail, mais il y a autre chose. À moins que nous fuyez quelque chose. Dans un quel cas, je ne peux que vous comprendre. Je l’ai fait durant de nombreuses années. Pardonnez-moi, je me mêle de choses qui ne me regarde pas en fait.

Je ne voulais pas la mettre mal à l’aise. Je voulais qu’elle comprenne qu’elle avait une oreille attentive et neutre pour discuter en cas de besoin. J’espérais me tromper au plus profond de moi. La fuite du nid familial n’était jamais une bonne chose. Je m’étais enfermé dans les recherches et la musique. Je me noyais dans les affiches, les cartes de la région et les partitions. Rose m’avait tendu la main et sauver d’une noyade certaine. Elle était plus forte que moi et je le savais.

Un nouveau son... une seconde chance.

Quoi ? Il ne voulait pas que je lui paie les pièces ? Mais pourquoi ? Je ne pouvais pas accepter ça. En revanche, je voulais bien lui offrir un repas pour lui et sa femme. Ca me ferait vraiment plaisir de la rencontrer. «  Aaron, la facture je vous prie, il est hors de questions que ce soit vous qui me les offriez. Même si c’est très gentil de votre part. C’est moi qui est négligé ce piano, il est donc tout à fait normal que ce soit moi qui les paie. » Je tendais la main en souriant.

Il lisait en moi comme dans un livre ouvert et ça me surprenait un peu. Moi qui avait toujours l’impression d’arriver à sauver les apparences. Mais apparemment, ce n’était plus le cas. Je me raclais nerveusement la gorge. C’était vraiment gentil de sa part de se soucier de moi. Je lui faisais un petit sourire. « Je n’ai pas vraiment le temps de prendre congé pour le moment. On va commencé la haute saison et je suis plutôt le genre de patronne à mettre la main à la pâte.  Vous êtes vraiment gentil, mais je n’ai pas vraiment envie d’en parler... »

En fait, je n’en parlais à personne. Je gardais tout pour moi. J’étais un peu en froid avec mon mari en ce moment, et c’était aussi pour cette raison que je ne voulais pas rester chez moi. Mes enfants s’en fichaient de toute façon. Il y avait vraiment des fois où j’avais l’impression de tout rater. Mais heureusement, j’avais une entreprise avec un travail prenant et le fait de me noyer dans le travail m’empêchait vraiment de trop penser. Je ne savais pas si l’ambiance de ma famille redeviendrait normale un jour, et je ne savais pas quoi faire pour y arriver.

Mon fils ne me parlait plus, mon mari me cachait des choses, bref, tout allait de travers. Heureusement, mon restaurant cartonnait et grâce à Aaron, il allait avoir encore plus de succès. Peut-être que mon amie miss Parker viendrait me voir.  Je sentais les larmes me montrer aux yeux, mais je devais me contrôler et faire en sorte que ça n’arrive pas. J’avais une réputation à tenir après tout.

Un nouveau son... une seconde chance.

Lexa me faisait penser à moi quelques années plus tôt. Elle était exactement comme moi lorsque je m’étais jeté dans le travail entre les nombreuses battues pour retrouver ma petite Kassandra. J’étais capable de lire les gens, mais je le faisais rarement. Je sentais simplement que Lexa se sentait aussi seule que j’avais pu me sentir à cette époque très sombre de ma vie. Ça me faisait étrange de prendre le rôle de la Rose en cet instant, mais il faut dire que j’avais quelques années de plus que la charmante blonde en face de moi. Je lui donnais la facture qui était d’un montant de zéro. Simplement le nom des pièces en question, mais aucune charge.

- Voilà la facture Lexa. Comme vous pouvez le voir … Elle est à zéro. Un repas avec ma charmante Rose sera suffisant je vous ai dit.

Je lui faisais un clin d’oeil avant de l’écouter avec attention. C’était beau de baratiner, mais je n’étais pas né de la dernière pluie. Je lui relevais le menton avec mon index pour la regarder dans les yeux avec gentillesse.

- Si vous préférez mentir c’est votre choix, mais sachez que je sais exactement ce que c’est que de se jeter dans le travail pour fuir une maison, un couple ou une épreuve. Vous n’êtes pas seule Lexa sachez le.

Je la lâchais avec douceur avant de boire une gorgée de son breuvage. Elle devait vachement se demander pourquoi je lui disais de telle chose. Le fait est que je n’avais pas trop envie de raconter mon histoire même si ça semblait plus fort que moi. Je parlais très rarement de ce qui était arrivé avec ma belle Kassandra. Au fond de moi, je savais qu’elle était toujours vivante. C’était une chose qu’un parent savait. C’était viscérale.

- Et si nous nous tutoyons hein? Je veux bien que vous soyez ma patronne les vendredis mais je crois que ça sera plus naturel. Vous ne trouvez pas?

Un nouveau son... une seconde chance.

On m’avait toujours dit que j’étais une bonne comédienne. Je prenais toujours soin de ne jamais mélanger ma vie privée et ma vie professionnel. Mes parents avaient toujours été stricte avec moi en ce qui concernait mon éducation. Je ne leur en avais jamais voulu car je savais qu’ils le faisaient pour mon bien. J’étais une maman un peu plus cool que l’avait été ma mère. Et je me disais que l’erreur devait venir de là. Je n’avais peut-être pas été assez stricte avec mon fils et voilà où notre relation en était aujourd’hui. Alors, comme tout bon parent et comme toute bonne épouse, j’essayais de faire bonne figure. Je prenais la facture que James me tendait et je la lisais en secouant négativement la tête avec malgré tout, un petit sourire en coin.

« Vous êtes vraiment aussi têtu que moi Monsieur Watson… Très bien, je vous offrirai donc ce fameux repas pour vous et votre épouse. »

Ce dernier fit un geste auquel je ne m’attendais pas. Il prit doucement mon menton et plongea son regard dans le mien. Je sentais la boule de tristesse monter de plus en plus haut dans ma gorge. Je soutenais son regard avec une certaine difficulté et je faisais tout mon possible pour retenir mes larmes. Je ne savais vraiment pas comment il avait réussit à s’y prendre, mais il m’avait clairement percé à jour.  Il avait raison dans ce qu’il me disait et au fond de moi, je le savais parfaitement. Mais la théorie et la pratique sont deux choses bien distinctes.

« Je…. »

Je ne savais pas quoi dire, j’avais qu’une seule envie, partir en courant pour aller pleurer dans un coin. J’avais clairement besoin d’extérioriser tout le chagrin que je ressentais. Mais heureusement pour moi, il décida de changer de sujet.

« Oui, je suis bien d’accord. C’est vrai que c’est plus sympa. »

Je lui faisais un petit sourire.

« As-tu déjà un jour en tête pour venir avec ton épouse ? »

Un nouveau son... une seconde chance.

Parler avec Lexa me redonnait un peu espoir. Elle me redonnait espoir qu’il y avait des gens bien dans ce monde et je n’aimais pas la savoir malheureuse. J’avais appris a bien déceler la détresse chez les autres en ayant été moi-même la proie durant de nombreuses années. Je voyais bien que ses yeux se remplissaient de larmes alors que j’étais des plus gentils et aimant avec elle. Je voulais être l’épaule sur laquelle elle pourrait pleurer durant des heures si elle le désirait. Elle n’était pas seule. Elle devait le comprendre. Elle me parlait ensuite de Rose et je continuais de lui sourire avec douceur.

- Tu changes de sujet Lexa. Si tu veux, nous pouvons aller discuter ailleurs. Personne ne mourra si nous prenons une heure pour discuter. Qu’est-ce que tu en penses?

J’avais un petit sourire en coin. Elle était belle. Elle était délicate et douce. Comment un homme pouvait lui faire du mal au fond? Elle ne méritait pas tout ce malheur. Je devais cependant me secouer l’esprit. Elle était mariée et je ne voulais pas que mes gestes soient pris pour ce qu’ils n’étaient pas. Je la lâchais avec douceur avant de reculer pour mieux la regarder.

- Un tour de voiture… Allons faire un tour de voiture. Prends ton manteau. Je t’attends à l’extérieur.

J’allais lui faire écouter de la musique jusqu’à se qu’elle craque. Je l’avais fait de nombreuses fois avec Lexie. La musique avait ça de bien. Elle nous purgeait de nos émotions et nous aidait à les évacuer. Je ramassais mes choses et je sortais à l’extérieur pour attendre Lexa. Je mettais le contact alors qu’elle bouclait sa ceinture. Je lui lançais un petit sourire malicieux.

- On va commencer avec … Una Mattina.

Je mettais la musique en marche. De douces notes de piano sortaient des haut-parleurs. Nous étions en route pour évader nos esprits. Une seconde chance en quelque sorte.

Un nouveau son... une seconde chance.

Je n’étais pas vraiment le genre de personne à me confier. Pour ça, j’avais le même défaut que celui de mon père. Je gardais tout enfoui au fond de moi, mais tôt ou tard, je finissais par exploser. Le genre d’explosion qui faisait des ravages sur les personnes que j’aimais. Je trouvais vraiment adorable de la part d’Aaron de me montrer qu’il était là pour moi. Je ne le connaissais pas depuis longtemps, mais je savais que je pouvais lui faire confiance. Mais je n’avais pas envie de parler, ni maintenant, ni plus tard. Alors, je changeais de sujet exprès.

Je ne savais pas quoi lui répondre. Il avait un sourire tellement beau et apaisant. Si je n’étais pas mariée et que lui non plus, il y aurait eu de fortes chances pour que je lui saute dessus. Mais j’étais mariée et fidèle et je n’étais pas une briseuse de ménage. Alors, je me contenterais juste de le considéré comme un ami précieux. Il voulait que nous prenions le temps de parler. Je voulais trouver un prétexte pour ne pas le suivre mais je savais qu’il ne lâcherai pas l’affaire aussi facilement. Je n’avais pas le temps de répondre qu’il était parti dehors.

Je prenais mon manteau, je ne pouvais plus reculais désormais. J’informais mon chef de rang que je m ‘absentais une heure et que je ne serai pas joignable. Ca faisait à peine suspect quand on imaginait le tableau. Je mettais mon cellulaire en mode silencieux et je le remettais dans mon sac. Je prenais une bonne inspiration et je sortais. Aaron m’attendait déjà dans sa voiture. Je montais et je bouclais ma ceinture. Je ne savais pas du tout où nous allions ni s’il avait une idée de destination.

« Est-ce que tu sais où on va ? Oui, j’aime bien ce morceau, je le connais bien. »

Il m’arrivait parfois d’écouter de la musique le soir quand je prenais mon bain. Je fermais les yeux et je laissais la musique m’envahir. Je finissais en pleure la plupart du temps. Je faisais ça loin du regard des autres. Mon mari et mes enfants ignoraient tout de mon chagrin. En même temps, j’avais l’impression que mon fils ne m’aimait plus du tout. Ce qui ne m’aidait pas vraiment à avancer. J’allais devoir arrêter de mettre des oeillères et me confronter à lui, soit seule soit avec mon mari.

Un nouveau son... une seconde chance.

Musique dans la voiture composée par Aaron et jouée par ce dernier

Un véritable ami aidait son prochain. Je me sentais à l’aise ainsi. Je me sentais à l’aise avec Lexa. Elle m’avait offert un nouveau départ d’une certaine façon. Je l’attendais dans la voiture pour lui offrir une belle thérapie sans le moindre jugement. Je sentais qu’elle avait grandement besoin d’évacuer quelque chose, mais j’étais incapable de dire de quoi il s’agissait. Je laissais la musique débuter avant de la regarder avec un petit sourire en coin.

- Je conduis tout simplement. L’endroit n’a pas d’importance. Je veux que tu écoutes la musique. Que tu l’aimes ou non n’a aucune importance. Utilise l’émotion qui s’en dégage.

Je laissais les notes envahir l’habitacle de mon véhicule. Je roulais à la limite permise en mettant mon GPS sur silencieux. Une balade en montagne serait parfait avec des paysages qui nous dépayserait un peu. Certains penseront peut-être que je serais son amant, mais il n’en était rien. J’étais un homme fidèle tout comme Lexa l’était avec son mari. Elle pouvait pleurer sur mon épaule si elle en avait envie. J’étais capable d’être un pilier, je l’étais depuis tellement d’année. Les mélodies changeaient de registre pour devenir excessivement sombre.

Ces mélodies qui jouaient, étaient celle que j’avais moi-même enregistré chez moi avec mon propre piano. Sentirait-elle la douleur et le désespoir qui pouvait s’en dégager? Des compositions originales de ma personne et que j’avais improvisé en pensant à ma douleur et ma souffrance. À la disparition de ma fille, la colère qui m’avait envahie, les querelles avec mon père, ma dépression, celle de ma femme, les pleurs de Lexie, les colères de l’adolescente, les regrets d’arrêter les recherches, les pleurs de ma femme en silence, l’absence de tendresse durant de longues années, les pensées noires, la chambre vide de ma fille disparu, son ourson en peluche sur le lit de ma femme et le mien, la querelle avec Lexie qui avait fuit pour venir ici et finalement le vide qui m’habitait en permanence avec le remord.

Personne ne pouvait comprendre la noirceur qui m’habitait. Je ne souhaitais pas aux gens qui avaient enlever ma fille de croiser mon chemin. Ils risquaient de finir en morceau. Je roulais avec le camion en serrant un peu le volant. Mes jointures blanchirent et je m’arrêtais sur le haut d’une falaise pour observer la vue. La musique jouait toujours. Je fixais le vide. C’était comme ça. Il n’y avait rien à dire. Lexa me poserait sans aucun doute des questions sur ses mélodies plus que macabres et digne d’un film d’épouvante…. C’était ma vie … C’était ainsi que je me sentais au plus profond de mon âme avec mon insomnie et mes nuits blanches. Oh Kassandra mon bébé … Où es-tu? … Où es-tu mon bébé?

Un nouveau son... une seconde chance.

On dit toujours que c’est quand on se trouve dans une mauvaise situation que l’on reconnaît ses véritables amis. Aaron était devenu un véritable ami depuis le temps que je le connaissais. Depuis un certains temps, je me sentais vraiment mal. La relation que j’avais avec mon mari n’allait pas en s’arrangeant et mon fils se droguait. Comment j’avais fait pour ne pas voir ça ? J’étais vraiment la pire mère qu’il pouvait exister. Mon mari m’avait caché les soucis scolaire de notre fils et je lui en voulait vraiment beaucoup. Alors, pour ne pas me confronter à lui et oublier un peu mes soucis, je me jetais à corps perdu dans le travail.


« D’accord… »

Une fois ma ceinture mise, il démarra sans savoir où il allait. Je savais que je ne risquais rien avec lui alors, je faisais ce qu’il me disait et j’écoutais la musique qu’il avait mis dans la voiture. Je ne savais pas que c’était une de ses compositions. Je ne le connaissais pas encore assez musicalement parlant pour le comprendre. Mais je n’avais jamais entendu autant de douleur dans un morceau. La personne qui avait composé ce morceau devait vraiment se trouver dans une très sérieuse situation de détresse. Je sentais les larmes monter et une boule se former dans ma gorge.

Je ne pouvais plus tenir et je finissais par éclater en sanglot. Je faisais mon possible pour essayer de rester silencieuse. Aaron finissait par se garer et je tournais la tête vers lui. Il n’avait pas l’air d’aller bien lui non plus. Tout le monde a des soucis, la vie est ainsi faite. Quand vous voyez une personne sourire, il peut-être faux et cacher beaucoup de souffrance ou d’histoires sombres. Je posais ma main sur sa cuisse, mais ce n’était pas du tout dans l’optique d’un geste déplacé. C’était purement amical et je savais qu’Aaron le comprendrait.

« Est-ce que tu veux m’en parler toi aussi ? »

Un nouveau son... une seconde chance.

Musique dans la voiture composée par Aaron et jouée par ce dernier

Les gens s’imaginent pleins de choses sur les autres. On s’imagine facilement que je suis le parfait père de famille et que nous sommes une parfaite petite famille de trois. Pourtant, il y avait une tâche sombre qui ne partirait jamais de notre toile familiale. La disparition de Kassandra. Jee fixais le vide en étant stationné à cet endroit. Je taisais ma souffrance profonde. Je ne voulais pas que ma femme continue de me voir souffrir. J’avais écris les partitions d’un trait avant de finalement jouer et les enregistrées. Elles auraient été parfaites pour drame ou un film d’épouvante dans un moment de détresse. C’était très particulier en fait. Personne n’avait entendu ses notes en dehors de ma femme. C’était quand même une grande preuve de confiance que je faisais à Lexa en cet instant. J’étais perdu dans mes pensées lorsque la voix de Lexa prenait le dessus sur la musique.

Je l’avais laissé pleurer ce qu’elle avait à faire. Je baissais le regard sur la main de Lexa, mais je la laissais faire. Je décidais finalement de briser le silence.

- Il y a longtemps … Ma fille Lexie était un nouveau-né à l’époque … J’ai perdu ma première fille. Je suis arrivé en retard à l’école de quelques minutes. Une putain de crevaison … Ma fille n’était pas là … Elle avait disparu. Tu as sans aucun doute vu sa photo à l’époque. La nouvelle avait fait le tour du pays … Nous ne l’avons jamais retrouvé. Pas la moindre trace de sa petite salopette de jeans … Pas de sac-à-dos … Rien … Le vide … Le néant… J’aurais préféré retrouver son corps pour le serrer dans mes bras plutôt que de m’imaginer les pires scénarios dans mon esprit … J’ai encore le sentiment profond qu’elle est vivante après toutes ces années … Plus de vingt ans …

Je n’avais pas regarder Lexa une seule fois en parlant. Je regardais devant.

- J’ai cessé de me produire en public … J’en étais tout simplement incapable. J’ai écris les partitions que tu viens d’entendre et je les ai jouer et enregistrer dans notre ancienne maison … Il n’y a que ma femme qui sait qu’elles existent. Maintenant tu sais mon secret Lexa … J’ai failli à l’une de mes tâches les plus importantes de ma vie… C’est comme ça. Il n'y a plus de recherches pour Kassandra... Je l'ai abandonné lâchement après plus de vingt ans !

Un nouveau son... une seconde chance.

Je sentais qu’Aaron vivait avec quelque chose de lourd lui aussi et je ne savais pas du tout de quoi il s’agissait. Nous n’avions jamais parlé de nos vies privées alors qu’au fond, ça pourrait peut-être nous soulagé. Mon Dieu, sa fille aînée avait disparu, alors c’était elle ! J’avais bien entendu parler de cette histoire, mais je n’avais pas fait attention qu’il s’agissait de sa famille. Je mettais ma main devant ma bouche. Je ne savais pas comment j’aurai réagit si j’avais été à sa place. Je savais que lui sortir des phrases du genre, je suis désolée, ça va aller tu verras, ne serviraient absolument à rien.

« Non, tu ne l’as pas abandonnée, tu as fait ce que tu as pu avec tes moyens. C’est complètement différent Aaron. »

Je me sentais tellement touchée par son histoire, que je n’avais pas envie de lui faire part de la mienne qui allait vraiment sembler ridicule en comparaison. 

« Ton secret sera bien gardé Aaron, tu peux me faire confiance. » Je n’osais pas lui demander ce qu’ il avait sur cette affaire. J’avais tellement envie de l’aider. Mais je ne savais pas comment et ça, c’était vraiment frustrant.

Ce que venait de me dire Aaron me faisait vraiment relativiser. Les soucis de drogues de mon fils étaient vraiment moins dramatique que de le perdre. Il pouvait encore se faire soigner et je ferai tout pour ça. Mon Dieu 20 ans, ils avaient certainement du abandonner les recherches et mettre le dossier dans les affaires non classées. Je retirais ma main et je séchais mes larmes. Je serai là pour lui au besoin, mais j’allais aussi devoir faire face à mes propres soucis. Je ne pouvais pas continuer de fuir ainsi, ça n’allait pas aider mon fils.

Un nouveau son... une seconde chance.

Musique dans la voiture composée par Aaron et jouée par ce dernier

Pourquoi est-ce que j’avais parlé de cette lourde histoire à Lexa en fait? Peut-être parce que je la considérais comme une amie désormais. Le genre d’amie en qui je pouvais avoir suffisamment confiance et qui ne me jugerait pas. lorsqu’elle me touchait, je regardais sa main sans réagir. Non pas que cela me dérangeait, mais j’avais horreur que l’on me prenne en pitié. J’avais tellement vu des gens avec ce regard de chien battu qui nous disaient des phrases toutes faites pour simplement dire quelque chose. Je me contentais de faire oui de la tête. J’avais envie d’entendre ses soucis à mon tour. Je n’étais pas là pour juger de la gravité de ces derniers ou pas.

- Et toi … qu’est-ce qui te fais pleurer sur la musique Lexa. Nous avons tous nos problèmes et nos bêtes noires. Certaines prenant une forme bien différente pour chacun de nous. Je le vois bien que tu te jettes corps et âme dans ton travail. J’ai fais pareil dans la musique, mais cela ne comblait que le vide temporairement. Je me sentais … Dénudé de tout une fois rendu chez moi. Ce qui se dit dans cette voiture, restera dans cette voiture. Tu peux avoir confiance en moi.

J’ignorais alors que j’allais croiser son mari à la caserne de pompier où j’étais bénévole. Je ne l’avais jamais vu en fait ce type. Je ne savais pas trop comment il était avec elle, mais j’espérais qu’il la respectait profondément. Elle le méritait surtout avec les efforts qu’elle faisait pour le restaurant. Je sortais une boîte de mouchoirs de l’arrière de la voiture sur la banquette arrière. Je lui donnais pour qu’elle se sente à son aise. J’avais eu mon lot de travail psy avec le boulot. Combien d’élèves s’exprimaient par la musique avant de finir me voir pour me parler de problèmes à la maison, de viol, de violence ou encore de drogues? Il faut dire que j’avais peut-être la gueule du genre de type à pouvoir encaisser ce genre de nouvelles et de confessions. Je faisais un petit sourire à la blonde en espérant l’apaiser un peu. Elle en avait bien besoin.

Un nouveau son... une seconde chance.

Clairement, je me sentais vraiment ridicule avec la raison qui me faisait pleurer. Mon souci était tellement petit à côté de celui d’Aaron. On lui avait arraché une partie de son coeur à vif et il ne pourrait jamais guérir. On dit qu’avec le temps, les blessures s’atténues, foutaise… Comment peuvent-elles s’atténuer s’il nous est impossible de faire notre deuil ? J’avais confiance en lui mais j’avais peur qu’il se moque de moi. Bien évidemment, je savais que tout ceci n’était pas un concours. Je terminais de sécher mes larmes et je prenais une grande inspiration en plongeant mon regard dans le sien.

« Je sais que je peux avoir confiance en toi. Si ce n’était pas le cas, je ne serai pas avec toi dans cette voiture en ce moment même. C’est juste que mon problème est minime à côté du tiens et du coup, je n’ose pas vraiment en parler… Mais je vais le faire quand même, je me sentirais peut-être mieux après qui sait. Mon fils a des problèmes de drogues et ils sont assez sérieux. Je n’ai rien vu du tout et je me sens vraiment en mode mère indigne tu vois ? Je considère que je suis une mauvaise mère de ne pas avoir vu ça plus tôt. »

Voilà pourquoi je me jetais à corps perdu dans le travail. Je n’avais pas envie de voir les problèmes de mon fils en face. Je ne savais pas du tout comment les gérer et c’était un véritable souci. Je ne voulais pas le mettre dans une maison de correction, car ça, ce serait vraiment un échec en ce qui me concernait. Mais tôt ou tard, j’allais devoir y faire face. Mon fils me manquait tellement. Nous étions tellement proche à une époque. Et du jour au lendemain, plus rien.

Un nouveau son... une seconde chance.

Les problèmes des gens étaient à la mesure des épreuves qu’ils pouvaient endurer. C’était, du moins, ce que je voulais croire au plus profond de moi-même. Je me sentais plus calme d’avoir dit cette histoire à Lexa. C’était différent de discuter avec une femme qui ne me prenait pas en totale pitié. C’était comme ça, un deuil sans la moindre fin car je ne pouvais pas le faire entièrement sans avoir le corps de mon enfant. La chair de ma chair qui avait disparu alors que j’étais censé aller la chercher à l’école. Il n’y avait rien à faire. Je n’avais pas pu sauver ma belle Kassandra. Il était trop tard. Une partie de moi continuait d’espérer, mais c’était de garder de l’espoir pour un fantôme. Une sorte de chimère qui me rongeait de l’intérieur. J’écoutais la femme assise à côté de moi dans la voiture et je la regardais avec une immense attention.

- Il n’y a pas de gros ou de petits problèmes. Je n’ai pas à juger la profondeur de ta détresse face à al consommation de ton fils. Tu es une excellente mère car justement tu t’inquiètes et que ça te ronge Lexa. Il n’est jamais trop tard pour aider son enfant. Si tu ne l’as pas vu avant c’était qu’il ne voulait pas que tu le vois probablement. Il a peut-être eu une faille pour te tendre la main en espérant que tu la prennes.

Je prenais sa main pour la serrer. Je savais ce que c’était que de sentir que l’on était un mauvais parent. Je ne le savais que trop bien avec ma Lexie. J’avais été surprotecteur et très exigeant envers cette dernière et je ne me pardonnais pas vraiment. Je mettais mon index sous le menton de Lexa pour lui relever la tête et l’obliger à me regarder dans les yeux.

- Tu n’es pas seule Lexa. Tu ne le seras jamais. Tu as des gens autour de toi dont moi. Même s’il est 3h du matin. Si tu as besoin que je débarque chez toi car le petit est en crise, je viendrai. C’est ce que font les amis. Ils s’aident, ils se soutiennent. Si ça ne fonctionne pas on le filera à mon père une semaine. Tu vas voir, il fera plus jamais de connerie.

Là, je me mettais à rire de vive voix. Seigneur. Mon père était vraiment une plaie en lui-même. Il avait un putain de caractère de merde qui en valait trois! Je remettais le contact pour lentement faire marche arrière et rentrer au restaurant.

- Tu dois te demander pourquoi je dis ça? Il était lieutenant général dans le corps des marines. Je te jure que tu as intérêt à marcher le cul serré. C’est une véritable plaie en soi, mais il n’est pas méchant. Il est juste TRÈS chiant.