La soirée avait plutôt bien commencée. Oui, cette petite soirée de réouverture du Bellagio était en effet très agréable. La nourriture était bonne, la musique agréable et le champagne d'une très bonne qualité. Je dois bien admettre que je n'espérais rien de plus que de passer une merveilleuse soirée loin de mes obligations habituelles à la Division ou auprès du Centre. Mais la suite des évènements furent encore meilleurs que je n'aurais pu l'imaginer ! Jamais je n'aurais penser que des Caméléons seraient de la partie ce soir ! Je dois admettre que pour des êtres doués d'une intelligence supranormale nos chers Caméléons se montrent parfois d'une stupidité affligeante ! Mais ma foi, il faut croire que même les génies ont leur failles. Un sourire mauvais étire mes lèvres lorsque Parker et son acolyte entre également dans ma berline noire. "Nous voilà au complet ! Inutile de nous éterniser ici d'avantage. Il est temps de ramener cette petite souris dans son troue !" Je n'attends donc pas Lolth. Si elle n'a pas suivie le mouvement, tant pis pour elle ! Nous n'avons pas de temps à perdre à l'attendre. Je prends soin de remonter les vitres teintées, j'attache ensuite ma ceinture et je démarre. "J'imagine que ton retour va faire des heureux au Centre ma chère Kassandra. Nous ne nous connaissons pas encore vraiment, mais crois moi, nous apprendrons à nous connaitre lorsque je viendrais te rendre visite dans ta cellule au Centre." Oh ça oui ! Je m'occuperais moi même de son interrogatoire ! Elle va me dire où son les autres et surtout, le nom de toutes les taupes qui gangrènent notre organisation ! Ca prendra le temps que cela prendra, mais elle finira par me chanter sa chanson. Peut-importe les fausses notes, je saurais l'entendre et faire ce qu'il faut pour ramener les brebis égarés droits dans leur cellules ! Cela fait bien trop longtemps qu'ils nous narguent !

Je respire calmement, je me concentre sur ma conduite. Dehors la nuit est sombre, j'allume alors mes phares pour plus de visibilité. Le ciel se couvre de nuage menaçant et le vent souffle fort à présent. On dirait bien qu'une tempête se prépare. Ca ne m'angoisse pas le moins du monde. J'aime ce genre de temps. Toujours à vitesse constante, nous longeons la route de la cotes. La mer est déchainée et s'éclate avec fureur sur les rochers. Malgré que les fenêtres soient fermés, j'en sens néanmoins les embruns salés. J'imagine que notre prisonnière doit être inquiète de son sort. Il est vrai qu'il n'est pas enviable. Je ne suis pas un homme foncièrement cruel. Je souhaiterais que les choses soient différentes. Mais lorsque j'ai un travail à faire, je le fais et je le fais bien !

Nous, nous engageons ensuite sur une parcelle de route étroite où les virages en épingle à cheveux s'enchainent dangereusement. Je ralentis un peu l'allure. Je suis un très bon conducteur, mais la nuit et encore plus sombre ici que lors de notre départ du Bellagio. Et pour couronner le tout, une pluie forte accompagnée de rafales de vent s'abat sur notre véhicule. "Nous allons mettre plus de temps que prévue à arriver. Parker vous devriez prévenir les équipes du Centre que nous allons être un peu en retard. Mais rassurez les, rien ne nous empêchera d'atteindre le Centre et de déposer notre précieux colis." Oh ça oui, rien ne me privera de cette victoire !  

Kassandra n’en menait pas large. Elle venait d’être enlevée par Parker, avec pour témoin la femme qu’elle avait aidée aux urgences il y avait de cela quelques semaines, une femme qui avait prétendu s’appeler Elle, mais qui avait probablement menti. Elle savait son véritable prénom et n’avait pas cherché à l’aider, pire, elle semblait même avoir écouté Parker.

La voiture venait de démarrer et à mesure qu’elle avalait les kilomètres, les larmes de Kassie dévalaient ses joues en silence. Elle pensait à Asher. Etait-il en danger ? Elle n’aurait probablement plus jamais l’occasion de le revoir. Une fois qu’elle serait enfermée de nouveau dans les sous-sol du Centre, la sécurité redoublerait de précision, et plus jamais aucun plan d’évasion ne fonctionnerait. C’était comme si le désespoir avec un grand D s’était abattu sur elle. Elle avait des flash de son enlèvement alors qu’elle n’était âgée que de sept ans et qu’on lui avait fait croire qu’on l’emmenait rejoindre ses parents au musée. Se jouer de la naïveté d’un enfant était bas. Le Centre n’avait que faire des pires méthodes si elles lui permettait d’avoir ce qu’il veut. La caméléone détestait cet endroit au plus haut point. Son regard plein de larmes se posa sur Theodore à sa  gauche. Il savait probablement depuis le début, il avait sans doute prévu de la dénoncer quand elle lui rendrait sa chemise qu’elle avait tâchée. Pourtant, quelque part, elle n’arrivait pas à lui en vouloir. Il ne semblait pas foncièrement mauvais, il avait plutôt l’air incapable de faire du mal à une mouche. Celle qui faisait vraiment peur à Kassandra, c’était Parker. Cette femme lui avait déjà tiré dessus sans hésiter. Et elle était sure que Novàk, derrière le volant, n’hésiterait pas non plus. Elle n’osait pas les regardait et tremblait de terreur.

Le directeur de la Division prit la parole, et le son de sa voix glaça le sang d la brunette qui enfin, osa lever le regard vers le rétroviseur central.

- Pourquoi viendriez-vous me rendre visite ? répondit-elle sèchement, loin de se douter de ce qu’il manigançait.

Parker se mit à ricaner, ce qui trahit le fait qu'elle semblait savoir.
Kassie souffla bruyamment, laissant ses sanglots reprendre le dessus. Elle était incapable pour le moment de gérer ses émotions, elle avait peur et était désespérée. Elle avait peur que Asher ait des ennuis aussi. Son regard brillant de larmes se posa encore une fois sur Teddy. Mais elle ne voulait pas le balancer et dire qu’ils s’étaient déjà parlé.

J’avais réussi, j’avais capturé un caméléon. Ma liberté approchait à grand pas. Mon père serait fier de moi, le Centre aurait ce qu’il veut, et secrètement j’espérais que cela apporterait un peu de répit à Jarod. Le temps qu’ils passeraient à interroger Kassandra, son précepteur Stanley Goodman essaierait sans doute de faire barrage aux méthodes de Novàk, ce qui ralentirait légèrement le processus… Jarod aurait le temps de mettre les voiles. A moins qu’il n’ait l’idée suicidaire de vouloir libérer sa comparse. Mais j’irais l’en dissuader. Il n’était pas possible qu’ils soient tous les deux libres.

Enfin bref, je savourais ce moment. Le temps s’était sévèrement assombri, mais pouvions-nous espérer mieux en ce début janvier ? Je n’en avais que faire, j’étais ravie de ma prise. J’appréciai la conduite sportive de Novàk, mais cela n’avait pas l’air d’être le cas de mon trouillard de geek qui palissait à vue d’oeil. La réaction de Kassandra face aux dires de Novàk me fit rire, et celle de Theodore soupirer. Ce dernier demanda à ralentir ce qui me fit lui envoyer un regard assassin.

- Vous voulez pas non plus qu’on vous dépose au spa pour un petit massage, tant qu’on y est ?

S’il n’y avait pas eu le rat de labo entre nous, je lui aurais volontiers flanqué une claque derrière la tête.

- Vous n’avez pas intérêt à gerber sinon je vous fais nettoyer cette bagnole avec la langue, pigé ? Regardez la route et contenez-vous, nom de dieu !

Ce n’était pas le moment de gâcher un moment aussi merveilleux que celui de notre première victoire en plus d’un an de traque. Je sortis de mon sac une cigarette que je m’allumai sans me soucier de mes voisins. Voilà qui faisait du bien. Je soufflai la fumée négligemment sur ma voisine de gauche qui toussa un peu, ce qui me fit sourire.

Soudain, pour une raison que j’ignorai, mon instinct me fit me retourner, et j’aperçus par la vitre arrière un véhicule qui, visiblement, tentait de nous rattraper. Je soupirai d’agacement. C’était forcément pour aider la caméléone, personne n’aurait l’idée de prendre ces routes tortueuses par une telle nuit, et encore moins d’accélérer de la sorte. Ils cherchaient clairement à nous rattraper. Je priai intérieurement pour que Jarod ne soit pas dedans, mais j’étais quasiment sure que je faisais erreur.

- Novàk ! Appuyez sur le champignon, je vais leur tirer dessus pour les ralentir.

Je sortis aussitôt de mon sac mon précieux Smith&Wesson et abaissai  la vitre pour les viser. Je tirai une première fois sur la route devant eux en espérant les dissuader.

Asher était furieux, je le sentais et il suffisait de voir ses mains se crisper autour du volant pour comprendre que rien ni personne n’était à même de l’arrêter. Et tant pis pour sa couverture, il n’en avait plus rien à faire à présent. « On la ramène point. Ne cherche pas à débattre Jarod. » Et que pouvais-je répondre à ça ? Il était de toute façon, incapable de débattre dans son état. « - Asher, je suis désolé. » Je n’avais rien de mieux en stock. Certes je n’étais pas en colère, mais j’avais le cœur lourd. Mais là n’est pas la question, à mon tour je pris place, côté conducteur, laissant aux autres le temps de prendre place dans le pick-up.

Et nous voilà prenant la route, nous enfonçant un peu plus dans les ténèbres de la nuit. J’observe le ciel, dépourvu d’étoiles et de nuages, le vent souffle et voilà que l’atmosphère s’alourdit, nourri par une indicible tension. Asher est concentré sur la route, devant nous, le sombre véhicule redevient visible par le biais de ses phrases. Asher toujours attentif, prit soin malgré tout d’enclencher la capote du véhicule avant que la pluie ne mette à mal notre attention.

« - Tu devrais ralentir un peu. » lui suggérais-je. « - Nous sommes à bonne distance. Et en cas de freinage, tu risques de perdre le contrôle de ton véhicule. » Mais j’étais à peu près sûr de me confronter à un mur. Il se mit alors à accélérer. « - Asher, ils vont nous repérer. » Je vis alors un bras armé sortir du véhicule. Ça ne pouvait être qu’elle. Et sans sommation aucune, Mademoiselle Parker se mit à nous tirer dessus pour nous ralentir. Elle venait de le faire et sciemment. Le cœur lourd, je ne pouvais effectivement me résoudre à la défendre ou lui trouver des excuses cette fois.

« - On doit se rapprocher pour les contraindre à l’arrêt. » Mais je crois qu’encore sous l’égide de la colère et de la peur, Ash trouva en moi le parfait bouc émissaire. « - Tu t’en prendras à moi plus tard ok ? »

La colère, la rage, le désespoir, l’incertitude, Asher Collins était habité à l’excès, par chacun de ces sentiments. Son cœur battait à s’en rompre, il n’avait plus aucune certitude, excepté celle de sauver Kassandra et ce qu’importe le prix. Il en voulait aussi à Jarod de continuer à croire en Parker, mais préférait ne pas se focaliser là-dessus. Les mains crispées sur le volant de son sacro-saint pick-up, il attendait impatiemment que tout le monde prenne place. Jarod essaya de parler en vain, car Asher lui coupa presque aussitôt la parole. « - On la ramène point. Ne cherche pas à débattre Jarod. De toute façon je ne t’en laisserai pas l'occasion. Et garde tes excuses pour toi tu veux. » Jarod, conscient que ce n’était ni le lieu ni le moment pour affronter l’ancien militaire, accepta de se faire. Et voilà toute l’équipée embarquée à nouveau dans une mission sauvetage.

Après quelques minutes, Asher repéra enfin la Berline, le conducteur venait d’allumer ses phares. Sentant que le temps commençait à se dégrader, Collins enclencha la capote de son véhicule avant que la pluie ne s’abatte sur eux. « - Ce n’était pas le moment. » maugréait-il, lui qui détestait conduire sous la pluie. Jarod chercha aimablement à s’enquérir de la situation tout en essayant de dissuader l’ancien militaire d’accélérer davantage au risque de perdre le contrôle du véhicule. En guise de seule réponse, Ash se contenta d’accélérer davantage. « - Je n’en ai rien à foutre de tes préconisations Jarod. On doit rattraper ces enfoirés et libérer Sandra. » Sa voix tremblait tant l’émotion l’étreignait et alors qu’ils rattrapaient la berline, un tir sans sommation le fut adressé. « - PUTAIN, la salope. Et là, elle est encore défendable ta Parker ? »

Mais à sa grande surprise, le caméléon ne rétorqua point, il l’incita même à accélérer pour les rattraper. « - Montre toi ! Avec un peu de chance, elle n’osera pas abimer le fils prodigue et cessera de nous tirer dessus. » Ne se souciant plus de ce que pensait Jarod, ni personne à bord, l’ancien militaire appuya sur le champignon et preuve que le pick-up en avait sous le capot, ils parvinrent à revenir à hauteur de la Berline pour « gentiment » la titiller.

Voilà, c'est partie cette fois plus retour en arrière n'est possible ! Les enfoirés du Centre ont Kassy et nous devons tout faire pour la libérer ! Tout le monde se rejette un peu la faute et la tension est palpable ! Je prends la main de Lexie pour la rassurer et me rassurer aussi par la même occasion. La Berline est là. Le conducteur semble prudent, ce qui n'est pas le cas d'Asher. Mais en même temps je le comprends. Si c'était Lexie qui était prisonnière je ferais comme lui ! "Asher a raison Jarod, il nous faut libérer Kassandra. Mais Jarod a aussi raison ! Nous devons être prudent. Tomber de cette falaise ne nous aidera pas à sauver Kassandra." Je sens que je vais m'en recevoir plein la tronche, mais il faut bien que quelqu'un le lui dise...

La voiture face à nous accélère. La Berline est rapide et malgré la puissance du Pick-Up d'Asher, il reste plus gros est moins malléable sur cette route. La pluie redouble d'intensité et pire encore, Parker nous tire dessus depuis le véhicule d'en face ! "Merde ! Ils nous tire dessus ! Lexie baisse toi. Je ne veux pas que tu prenne une balle perdue. Et je ne pense pas que sortir et se montrer à ce moment là soit judicieux ! Leur tirer dessus en retour non plus. Nous pourrions faire perdre sa concentration au conducteur et la voiture pourrait tomber dans le vide ! Le but est de sauver Kassy non de la tuer !"

Je soupire, il nous faut un plan de replie ! Je réfléchis et l'idée me vient. "Je voudrais faire une proposition pour le cas où nous n'arriverions pas à stopper cette voiture. Je vais me connecter aux ordinateurs du Centre depuis mon portable ici même. Le but sera de bloquer le Centre de l'intérieur ! Il va se verrouiller et rien ne pourra plus ni sortir ni entrer dans l'édifice ! Ils seront donc à leur arrivée au Centre coincé à l'extérieur. Mais il nous faut une autre personne à l'intérieur pour faire certaines manipulations depuis la salle informatique principale du Centre. Jarod, Sydney pourrait peut-être le faire ? Elle t'a déjà aider par le passé, peut-être le ferait elle encore ?" En attendant, nous devons juste éviter de nous planter et de crever !

Je n'arrive pas à croire ce qui est entrain de se passer ! On a enlevé ma meilleure amie et c'est le centre ! Je ne laisse pas le choix à Sean et le suit. Il est hors de question qu'on me laisse sur le banc de touche. Je tremble de partout mais je tiens bon. Il faut sauver Sandra. Sean me tient la main jusqu'à ce qu'on monte dans la voiture. Asher prend le volant mais il ne conduit pas assez vite à mon goût. Il faut qu'on rattrape la voiture où se trouve mon amie et vite. On s'en balance d'être prudent. Il ne faut pas écouter Jarod sur ce point merde. Elle est en danger ! Il faut agir et vite.

Soudain on nous tire dessus. Je pousse un petit cri de peur mais me ressaisi, ce n'est pas le moment de flancher.

- Non je ne me baisserais pas Sean ! Et toi Asher tu ferais mieux d'accélérer putain ! Ils vont finir par nous semer à ce rythme ! Personne n'a un flingue pour crever un de leur pneu ? Il faut faire quelque chose. On ne peut pas laisser Sandra dans leurs mains !

Je secoue un peu le fauteuil du conducteur sans le vouloir. Je me sens impuissante et je n'aime pas cela. Il faut qu'on trouve une solution et vite. On a besoin d'agir, j'ai besoin d'agir. Sean dit des choses censées mais je n'ai pas envie de l'être.

- Non mais il va se douter qu'on risque de leur tirer dessus ! Ils savent qu'on ne va pas les laisser faire comme ça sans répliquer ! Ou alors faudrait qu'on arrive à stopper leur véhicule d'une façon ou d'une autre. On peut pas les doubler pour les forcer à s'arrêter ?

C'est une bonne solution non ? Et si on les arrête peut être que Sandra pourra donner un coup de poing à quelqu'un et prendre la fuite pour nous rejoindre...

Je n'écoute pas la suite de ce que Sean raconte. Je suis juste concentrée sur la voiture devant nous, essayant de voir ce qui s'y passe et essayant de deviner comment nous pourrions sauver ma meilleure amie et collègue. Mon cœur bat la chamade et je respire rapidement. Je sais que je suis en panique et que je refuse de comprendre ce qui se passe réellement. Je tente de me concentrer seulement sur des solutions possibles mais je ne sais pas si ces idées sont rationnelles ou pas. Je jure que s'ils touchent à un seul cheveux de Sandra je me vengerais au centuple.

J’étais à la place du mort comme on dit et jouer les copilotes n’atténuait aucunement mon sentiment d’impuissance face à cette situation qui nous échappait. Rester à Blue Cove était un pari perdu et il nous fallait à présent repenser notre stratégie pour sortir Kassandra de là. Cependant, dans un coin de ma tête, je songeais déjà à l’après sauvetage et au fait qu’il nous faudrait quitter la ville pour mieux se prémunir des agissements du Centre. Nous n’avions plus le choix. Mais pour l’heure, je devais me focaliser sur l’immédiateté et ne pas me laisser animer par la colère qui mettait à mal la raison d’Asher. Mais pouvais-je vraiment le blâmer d’agir ainsi ?
Sean lui-même essayait de calmer les tensions qui mettaient à mal notre sécurité.

« - Tu as raison. Prudence est mère de sûreté. Asher… » Décidément, rien n’était facile avec lui, mais pouvais-je vraiment le blâmer à nouveau ? Il voulait sauver la femme qu’il aimait, n’était-ce pas louable ? Je n’eus pas le loisir d’étayer ma réflexion, car à nouveau notre pilote accéléra pour tâcher de ne pas perdre la Berline de vue. L’obscurité et le mauvais temps de concert, ne rendaient pas la conduite aisée. Je mentirais si je disais ne pas avoir peur. Oui j’avais peur pour moi, pour nous, pour Lexie qui venait de se joindre à notre folle équipée. Pour Kassandra qui se retrouvait dans une bien mauvaise position. Qu’allait-il advenir de nous ?

Le danger redoubla en intensité lorsque Parker se mit à nous tirer dessus. Elle savait que j’étais à l’intérieur, mais de toute évidence, cela ne l’avait pas dissuadé de nous mettre en danger. J’étais déçu et plus encore, je me sentais trahi. Un sentiment qui attisa ma colère alors que la pluie redoublait en intensité, rendant notre course-poursuite encore plus périlleuse.  « - Asher, je ne vais pas me montrer enfin c’est absurde. Reste concentré sur la route. On doit revenir à leur hauteur. » Mon regard se posa alors sur Sean, qui en plus d’être la voix de la raison ce soir, jouait les protecteurs avec Lexie. « - Tout va bien se passer. Personne ne sera blessé ce soir. » J’y croyais à peine, mais c’était toujours mieux que rien. Sean reprit ensuite la parole, alors que je tenais entre mes mains mon cellulaire. J’étais visiblement prêt à tenter de négocier avec Parker. Par chance, le plan de Sean me sembla plus raisonnable et efficace sur l’instant.

« - C’est un plan qui me paraît réalisable sur le papier. Mais je ne sais pas si je peux totalement me fier à Sydney. Ça lui ferait prendre beaucoup de risque si quelqu’un venait à découvrir son hypothétique participation. Mais en même temps si on ne tente rien… » J’hésitais encore, malgré l’empressement d’Asher qui ne me laissait guère de choix. Portable en main, j’entrepris donc de me connecter à « Refuge » la plateforme qui me permettait de communiquer (à l’écrit comme par vocal) avec Sydney depuis mon évasion. Je devais être bref et concis, car le temps nous manquait cruellement. Portable rivé sur l’oreille, une fois la connexion effectuée, je me lançais dans un premier appel jusqu’à entendre la douce voix de ma préceptrice.

« - Sydney c’est moi. J’ai peu de temps. Écoutez-moi. Ils ont Ka... Sandra et seront là d’ici peu. J’ai besoin de votre aide pour empêcher ce retour. Je sais que je vous demande beaucoup une fois encore, mais vous ne pouvez laisser le Centre brisé à nouveau la vie de l’un des nôtres. Ce que je vais vous demander est simple, mais avant toute chose, j’ai besoin de savoir si vous acceptez ? »

Je n’étais pas fier de moi et d’une fois encore lui faire prendre des risques. Mais avions-nous seulement le choix ?

Kassandra était tétanisée, avoir vu Parker sortir son arme raviva le traumatisme de la balle que cette femme lui avait logé dans l’épaule lors de la mission évasion qui n’avait pas été assez prolifique à son goût, puisqu’un seul caméléon avait finalement été libéré ce soir-là. Mais cela faisait toujours un ancien prisonnier qui pouvait enfin jouir d’une liberté qu’on lui avait cruellement et injustement retirée. Néanmoins, elle pensa immédiatement à Asher qui se trouvait dans la voiture qui les poursuivait. Qui d’autre ? Elle s’assura de ce détail en se retournant et apercevant le pick-up de son fiancé. Son coeur se serra davantage en entendant les coups de feu. La caméléone pensa immédiatement à la sécurité de l’homme qu’elle aimait, et prenant son courage à deux mains, elle tenta de bousculer l’agente de terrain du Centre.

- Arrêtez !!!

Elle n’eut pour réponse qu’un coup de coude dans les côtes qui la plia en deux, la sonnant un peu, la rendant à nouveau immobile, livide de peur. Elle sentit soudain le bras de Theodore l’aider à se pencher en avant pour se protéger, sa voix brisant le silence uniquement entrecoupé par les détonations. Soudain, Teddy lui mit un vêtement sur le dos. Elle lui lança un regard embrumé de larmes. Il pouvait bien être sympa avec elle, c’était probablement de sa faute si elle se retrouvait kidnappée à nouveau. En voulant resserrer la veste autour d’elle, elle sentit un objet dans la poche… Un téléphone ?

Une lueur d’espoir la traversa, cela lui fit reprendre ses esprits immédiatement. Penchée en avant, le pan de veste du côté de Teddy la dissimulant. Elle en profita pour se saisir de l’appareil aussi discrètement que possible. Par chance, le conducteur était occupé sur la route, Parker à essayer de tirer, Teddy à se dissimuler pour esquiver une blessures hypothétique, c’était parfait.

Kassandra utilisa ses grandes connaissances de l’électronique pour connecter le téléphone à l’ordinateur central de la voiture. Il fallait trouver un moyen de ralentir le véhicule, sans pour autant créer un accident, elle ne voulait pas tuer les passagers ni elle-même. Et juste avec un téléphone, elle ne pouvait accéder qu’à des choses superficielles. Elle commença par couper toutes les sources lumineuses : phares et lumières indiquant les divers cadrans de la voiture, puis vit se déverrouiler les portières et s’ouvrir le coffres, ce qui boucherait la vue sur l’arrière au conducteur.
La caméléone espérait que cela contribuerait à faire ralentir la voiture et qu’elle ait une opportunité pour sauter.

Mais qu’ils nous lâchent la grappe ces enfoirés en pick-up pourri ! J’avais décidé d’agir, je n’étais pas du genre passif dans la vie. Weather me demanda ce que je faisais à me pencher par la fenêtre mais il comprit rapidement. Je me mis à tirer sur la route juste devant nos poursuivants, espérant les ralentir. Là, Kassandra me sauta dessus, je lui envoyai donc un coup de coude bien sentit qui visiblement la calma.

- Weather, maîtrisez-la !

Je continuai à m’acharner un peu sur le groupe qui nous suivait. Voyant que mes deux premières balles n’avaient pas fait mouche, j’essayai de toucher un pneu de la voiture, mais soudain, tout s’éteignit dans la voiture et je vis le coffre s’ouvrir.

- Novàk ! Qu’est-ce que vous foutez?!

C’était pas le moment d’avoir une bagnole défaillante, clairement.

- Weather, vous savez ce qui se passe ?! Rendez-vous utile, nom d’un chien ! Appelez le Centre pour les prévenir de notre arrivée

Je repris ma place à la fenêtre, il ne fallait pas ralentir, même s’il était dangereux de rouler sans phare dans cette route tortueuses avec un ravin de mon côté et le pan de montagne du côté de Theodore.
Soudain, je fus prise d’un pincement au coeur : j’aperçus Jarod dans la voiture. Mon instinct ne m’avait pas trompée. J’hésitais alors… Devais-je tirer réellement sur la voiture, au risque de leur faire avoir un accident ? Je ne voulais pas blesser Jarod. Les autres, je m’en moquais un peu, bien que je ne souhaite pas non plus les tuer, je n’étais pas un meurtrière. Néanmoins, il fallait qu’ils ralentissent, il fallait qu’on les sème !

Chacun jouait des coudes pour faire entendre ce qu’il avait à faire entendre. De toute évidence, la stratégie n’était pas la même. Et encore une fois, les caméléons tâchèrent de mettre en exergue leur supra intelligence ce qui agaçait partiellement le conducteur du pick-up qui se retenait de leur demander de la fermer, car contrairement à eux, il lui fallait plus de temps pour s’adapter à une situation. « - Ma seule priorité c’est de la sauver » laissa-t-il finalement entendre en tenant toujours fermement le volant entre ses mains. La route devenait de plus en plus sinueuse et la vue incertaine avec la tempête qui semblait se profiler à l’horizon. La pluie d’ailleurs venait de faire son entrée fracassante, mais le plus dur restait à venir et pour cause, Mademoiselle Parker venait de dégainer son précieux Smith & Weeson et leur attirer dessus sans sommation ce qui accentua la hargne de l’ancien militaire. Aussitôt Sean pria Lexie de se baisser avant d’éviter de se prendre une balle perdue. « - On va leur rentrer dans le lard, ça, tu peux me croire. J’espère que ça te permettra d’ouvrir les yeux Roméo. Ta Juliette est littéralement prête à te foutre dans le décor. C'est beau l'amour » Le sarcasme était au rendez-vous et pour dire vrai, Asher se figeait bien de blesser Jarod.

Asher tâcha de rester concentrer, malgré les échanges et la prémisse de plan qui se dessinait sur les lèvres habiles de Sean. De toute évidence, il voulait ajoutait une autre personne à l’équation, cette chère Sydney que Collins ne connaissait pas assez pour savoir si oui ou non elle était fiable. Mais faute de mieux. Le caméléon semblait lui aussi convaincu, assez pour contacter sa préceptrice et c’est à ce moment, que la voiture face à eux, commença à émettre une première défaillance. « - Bordel, qu’est-ce qui se passe ? » Parker avait ainsi cessé de leur tirer dessus, ce qui leur permettait de souffler un peu. « - Il faut qu’on profite. » Et il ne lui en fallut pas plus pour presser le champion et revenir profitant du ralentissement engendré par la défaillance électronique de la berline.

Tout s'enchaine ensuite de manière brutale. Les Caméléons semblent bien décidé à en découdre et je ne compte pas me laisser faire. Je maitrise ma voiture comme un chef. Parker sort du véhicule et leur dessus alors que moi je garde ma ligne de conduite, fonçant à toute allure, tout en m'efforçant de ne pas donner trop d'à-coups pour qu'elle puisse faire mouche, mais sans succès. Je dois admettre que le conducteur de l'autre voiture est également un bon ! Je suis exaspéré par les cris de Kassandra. Heureusement elle finit par se taire. Weather la couvre d'un vêtement en lui gardant la tête baisser. J'ignore si c'est pour la protéger elle ou juste préserver le trophée...  Je suppose que nous serons fixé sur ce point d'ici peu.

Je continue alors que le véhicule semble avoir une panne ! Les phares s'éteignent et les portes semblent elles aussi déconner. Nos petites rats s'amusent avec l'ordinateur de bord de la voiture. La technologie n'est pas en notre faveur. Parker me hurle dessus en me demandant ce qu'il se passe avec le véhicule. "Je pense que nos amis s'amusent avec nous Miss Parker." Le manque de visibilité devient un véritable danger. Je dois sortir de cette route et vite ! Tout en tentant de ne pas tomber de la falaise, j'observe les alentours et là, j'aperçois notre salue ! "Je quitte cette maudite route ou nous n'allons pas faire long feu ! Weather dites au Centre que nous, nous dirigeons vers la casse automobile. Qu'ils nous y rejoignent au plus vite !" C'est le seul endroit éclairé que je vois au loin, ce n'est pas comme-ci nous avions un autre choix...

Je donne un coup de volant brusque, mes pneus crissent sur la route humide, la voiture tourne ensuite sèchement en dérapant et nous voilà sur la route de la casse. Le terrain y sera propice en cas de tire. Nous aurons de quoi nous cacher. Tous ce que nous aurons à faire c'est de tenir jusqu'à l'arrivée des renforts du Centre !