La mécanique rutilante peinait à conserver sa superbe. Le moteur, loin de sa jeunesse, émettait un son peu mélodieux aux oreilles d’Asher, qui peinait à tourner la clé dans le contact une seconde fois. Ce pick-up, il le connaît aussi bien qu’un vieil ami, chaque rayure sur la carrosserie, chaque tache d’huile sur le moteur racontant une histoire. La peinture autrefois éclatante s’était ternie, des éclats de rouille marquaient les bords des ailes et des portes, témoins du passage du temps.
Le vieux pick-up gronde comme un fauve blessé ; son moteur râle et tousse, émettant des sons gutturaux qui résonnent dans l’air. Les vibrations se propagent à travers le châssis, secouant les sièges usés, faisant tressauter les outils abandonnés sur le plancher. Chaque tour de clé dans le démarreur est une lutte, une supplication mécanique, un appel à la vie malgré les années et l’usure.
Parfois, un craquement sec déchire l’air, suivi d’un sifflement aigu. De nouveau, Asher serre la mâchoire. « — S’il te plaît ! » murmure-t-il sans vraiment y croire. Mais il tente une dernière fois, serrant un peu plus fort la clé dans le contact. Une odeur de carburant mal brûlé flotte autour du véhicule, ajoutant une dimension olfactive à cette symphonie désordonnée. Des volutes de fumée noire s’échappent de l’échappement, tourbillonnant dans l’air avec une inquiétante lenteur.
« — Fais chier ! » Le capot cesse de vibrer. Le pick-up, obstiné, refuse de s’avouer vaincu, mais Asher préfère ne pas prendre de risque cette fois. Il quitte la place du conducteur, se place devant le véhicule et l’observe presque avec nostalgie. Les phares ternis, le pare-brise ébréché, tout évoque des souvenirs d’aventures passées. Puis il se décide à sortir son téléphone. Il hésite un instant. Et si c’était trop tard pour sauver cette vieille carcasse ?
Il songea alors à Kassandra, dotée d’un optimisme à toute épreuve. Elle n’aurait certainement pas abandonné le vieux pick-up rouge. D’ailleurs, c’est à lui qu’ils doivent leur rencontre. Pris par un vent de nostalgie, Ash revit la scène : la pluie battante, la nuit noire, le danger qui n’en était pas vraiment un, et cette femme incroyable cachée à l’arrière du véhicule. Si vulnérable, si effrayée, mais avec un éclat de défi dans les yeux. La lumière des phares avait révélé son visage mouillé par la pluie, ses cheveux épars collés à ses joues, et ce sourire fragile, mais résolu qui avait tout de suite capturé son cœur.
Asher soupira en se remémorant ces moments, une main posée sur le capot du pick-up, comme pour puiser du réconfort dans la chaleur du métal sous ses doigts. Peut-être y avait-il encore un espoir, une chance de raviver cette vieille carcasse, de redonner vie à ce fidèle compagnon de route.
Il saisit à nouveau son portable, déverrouilla l’écran et parcourut sa liste de contacts jusqu’à atteindre le « Blue Garage. » L’appel fut bref, mais on lui fit savoir qu’une dépanneuse pouvait être dépêchée rapidement pour éviter d’aggraver le sort du pick-up. Faute de mieux, Asher accepta et retourna dans ce qui lui faisait office de domicile pour attendre l’arrivée des « secours mécaniques. »
La promesse de rapidité fut tenue au-delà de toute espérance. La lueur des gyrophares éclaira la façade de la caravane d’Asher, qui sortit presque aussitôt pour venir accueillir le convoi et prendre place dans la dépanneuse, accompagnant comme il se doit son fidèle destrier.
En moins de dix minutes, évoluant dans une circulation assez fluide, la dépanneuse se retrouva face à la devanture du garage. Les portes du Blue Garage s’ouvrirent avec un grincement familier, révélant un atelier encombré, mais accueillant, où l’odeur de l’huile et du métal chaud flottait dans l’air. Des étagères encombrées de pièces détachées et d’outils divers encadraient les murs, tandis que des morceaux de moteurs en réparation jonchaient des établis couverts de graisse. Asher observa les quelques mécaniciens qui s’affairaient autour de quelques véhicules. Un mélange d’appréhension et d’espoir dans les yeux, il cherchait une âme bienveillante pour s’occuper de son pick-up. Puis il se souvint des paroles de Kassandra, qui lui avait parlé à quelques reprises d’un certain Jason, avec qui elle avait travaillé par ici. L’ancien militaire s’approcha donc d’un dénommé Bernie :
« — Excusez-moi, Jason est-il ici ? » Le vieil homme, pourvu d’une vieille salopette tachée de suie, se tourna et lui désigna du bout du doigt le fond de l’atelier, incitant l’ancien militaire à s’y rendre. Ce qu’il fit sans attendre pour se rapprocher d’un homme qui s’affairait autour d’une Chevrolet noire.
« — Jason ? » demanda-t-il avec incertitude, car il n’avait pas encore eu le loisir de le croiser. « — Je cherche quelqu’un pour s’occuper de mon épave. » Il désigna le pick-up rouge, priant un dieu quelconque pour que Jason soit l’homme providentiel.
Mon bijou du jour était une Chevrolet noire qui m’avait été apportée par un client à la fois dépité et empli d’espoir quant aux possibles miracles que je pourrais faire pour remettre son véhicule en état. C’était un peu mon credo les vieilles bagnoles. J’adore les reprendre, les réparer, trouver les bonnes pièces pour les remettre en état et leur redonner un nouvel éclat.
La tête dans le capot ouvert, la lampe dans la bouche pour m’éclairer et avoir mes mains libres de s’afférer sur le bouchon d’huile qui visiblement avait décidé de me chercher des noises. Je grognais tout seul dans mon coin jusqu’à ce que j’entende mon prénom derrière moi. Relevant la tête, lampe toujours en bouche je le regardais incrédule :
« Ouai ! Ch’est-ce che peux faiche pour chou ? »
Me rendant compte de mon attitude peu professionnelle. Je souris, attrape un chiffon pour choper la lampe tout en la préservant de mes mains sales. Je reporte mon attention sur le client en m’excusant :
« Désolé… Je disais qu’est-ce que je peux faire pour vous ? »
Je suis son regard et écarquille les yeux, un immense smile sur le visage :
« Ça mon vieux ce n’est pas une épave… Bordel, un Ford F150 de 1982… ça alors !! »
J’ai l’impression d’être un gosse à Noël a qui l’on vient de mettre un petit bijou entre les mains. Je passe devant lui et lui fait signe de me suivre jusqu’à son pick-up d’un rouge un peu passé par les années qui reste convenable. Je lui fai signe pour savoir si je peux ouvrir le capot mais je n’attends pas vraiment de réponse et met direct le nez dedans après avoir bloqué l’ouverture du capot :
« Il a quoi comme souci ? Il ne démarre pas ? »
Je touche d’ores et déjà à deux trois endroits stratégiques et remarques que plusieurs pièces sont assez rouillées, desserrées ou même carrément manquantes. Mais je sais déjà que je vais me faire un malin plaisir à le réparer.
HRP: Si le modèle du pick-up ne convient pas, n'hésite pas à me redire et je modifierai.
Asher observa le garagiste qui venait de se présenter à lui. Bien qu’il soit d’un naturel peu loquace, il ne put réprimer une lueur d’espoir en voyant l’homme s’enthousiasmer pour son vieux pick-up. Cette attitude lui redonna même un semblant de confiance, et un léger sourire apparu sur ses lèvres alors qu’il observait chaque mouvement de Jason, déjà plongé dans le capot ouvert du véhicule. Les mains dans les poches, Asher se tenait là, silencieux, mais attentif.
« — Oui, il ne démarre plus… le moteur fait un bruit étrange et il y a cette odeur de carburant mal brûlé… » Asher désigna vaguement la zone du moteur, essayant de ne pas paraître trop désespéré. « — Ça fait des années que je l’entretiens moi-même, mais là, j’ai l’impression qu’il a besoin de quelque chose de plus… de quelqu’un qui sait vraiment ce qu’il fait. »
Il recula d’un pas, laissant au garagiste l’espace nécessaire pour examiner le moteur. L’atelier était rempli de l’odeur de l’huile et du métal, une odeur qui, étrangement, rassurait Asher. Il se souvenait des nombreuses heures passées sous le capot du pick-up, les mains noires de graisse, à tenter de maintenir en vie cette relique d’un autre temps. Une activité qu’il avait parfois partagée avec la belle Kassandra, dont le souvenir flottait autour de lui.
« — Ce pick-up… » commença Asher, les yeux rivés sur le véhicule. « — Il a de la valeur. » Sa voix s’éteignit, emportée par les souvenirs. La nuit pluvieuse où il avait trouvé Kassandra à l’arrière du pick-up refaisait surface dans son esprit, apportant une vague de nostalgie.
Il regarda autour de lui, observant les mécaniciens qui allaient et venaient, chacun concentré sur sa tâche. Le bruit des outils résonnait dans l’atelier, créant une symphonie de cliquetis et de marteaux. Tout d’un coup, l’ancien militaire se demanda ce que Kassandra dirait si elle voyait l’état actuel de la vieille carcasse rouge. Elle aurait probablement ri et trouvé quelque chose de positif à dire, comme toujours.
« — Je suis sûr qu’avec vos compétences, vous pourrez le remettre en état, » dit Asher, revenant à la réalité. Il se força à sourire, tentant de masquer son anxiété. « — C’est une amie de confiance qui m’a parlé de vous, Kassandra. »
Asher sentit un poids se lever légèrement de ses épaules en partageant ce détail. Il espérait que mentionner Kassandra inciterait Jason à accorder une attention particulière à son vieux pick-up.
Alors qu’il observait Jason travailler, Ash se permit un instant de rêver à nouveau. Peut-être qu’avec l’aide du garagiste, il pourrait retrouver la gloire d’antan de son pick-up. Et qui sait, peut-être que cela marquerait le début d’une nouvelle aventure, tout comme celle qui avait commencé cette nuit pluvieuse quelques mois plutôt.
Comment ne pas se réjouir devant un véhicule qui certes avec son vécu mais qui n’en restait pas moins un super modèle et surtout durable s’il était bien entretenu. L’état du pick-up que j’avais en face de moi alors n’était pas si dégueulasse que ça. Au contraire, ça se voyait que son propriétaire en prenait soin malgré le temps qui passe mais comme tous les véhicules il arrive un moment ou certaines pièces sont trop encrassées où trop usées et il faut tout simplement les changer.
Sans vraiment attendre, je me penche sur le moteur en posant la question de base au principal intéressé mais j’écoute sa réponse tout en faisant un rapide diagnostic de mon côté.
« Ouais je vois qu’il y a deux trois pièces à nettoyer ou à changer. L’odeur vient surement de là. »
Je me redresse et le zieute du coin de l’œil en souriant de façon à la rassurer tout de même :
« Et il est plutôt bien entretenu en vrai. C’est pas grand-chose je pense. Enfin, la panne… Par contre si je dois changer des pièces, ça va être la même chose. Le modèle est pas tout récent, les pièces coutent plus chères… »
Je place mes mains sur les hanches tout en regardant à droite et à gauche alors que l’homme m’avoue tenir à sa monture. Je lui souris…
« Aaahhh ça … Je me doute vu que vous l’avez toujours après toutes ces années… Mais vous en faites pas, je vais le bichonner. Et après il va ronronner comme un gros matou ! »
Je me repenche pour remettre un truc en place que j’ai remarqué qu’il était mal mis.
« Ouais, j’vais le prendre en charge mais j’ai d’abord la Chevrolet à faire et un autre modèle. Ça n’va pas être prêt avant deux ou trois jours. »
A la mention de Kass, je tourne la tête vers lui et rigole :
« Ah d’accord, je vois… Elle me fait de la pub… »
Je me redresse et referme le capot avant de reprendre le chiffon dans ma poche pour m’essuyer grossièrement les mains :
« Ravi de m’en occuper… Et du coup je m’appelle Jason, Jason Allen. »
Je lui tends la main même si celle-ci n’est pas nickel et lui fait signe de me suivre jusqu’à la réception. Une fois devant le comptoir je m’adresse à la secrétaire :
« Tu m’ajoutes le F150 à mes véhicules et tu peux prêter une voiture au monsieur s’te plait ? »
Elle hoche la tête, et je me tourne à nouveau vers le mec en question :
« N’hésitez pas à laisser vos coordonnées à la miss, je vais j’pense commencer demain ou ce soir si j’ai le temps et je vous appelle demain pour vous dire ce qu’il en ait ça vous va ? »
Je suis très enthousiasme à l’idée de m’en occuper mais j’espère qu’il ne sera pas trop déçu de ne pas l’avoir pendant quelques jours ou bien alors trop effrayer si je dois changer des pièces.
HRP : Au prochain post, je ferais une ellipse pour passer à 2/3 jours plus tard t’en fais pas et l’on pourra mieux discuter
L’ancien militaire hocha la tête en écoutant attentivement les explications de Jason concernant les réparations nécessaires. L’idée de se séparer de son pick-up pour quelques jours ne lui plaisait guère, mais il savait que c’était inévitable. Le garagiste avait qualifié les réparations de « pas grand-chose », une phrase simple, mais suffisante pour apaiser quelque peu l’anxiété qui s’était installée en lui. Asher croisa les bras, son regard fixant l’homme qui s’affairait sous le capot. Les mots concernant les pièces rares et coûteuses ne lui échappèrent pas, mais pour lui, ce véhicule représentait bien plus que des dépenses.
Ce pick-up n’était pas seulement un moyen de transport. C’était un vieux compagnon de route, témoin de nombreuses tempêtes traversées à ses côtés. Asher était prêt à faire tout ce qu’il fallait pour le préserver. Plus encore, ce tas de ferraille, pourtant bien entretenu, était lié à quelque chose de plus précieux : sa rencontre avec Kassandra. À cet instant, il se perdit brièvement dans ses souvenirs, emporté par une vague de nostalgie. Le bruit familier de la voix de Jason, toujours aussi enthousiaste, le ramena à la réalité. Cet homme respirait la passion pour son travail, et quelque part, cela éveillait en Asher un sursaut d’espoir quant au fait de retrouver son fidèle destrier métallique.
« — Deux ou trois jours, hein… » murmura-t-il presque pour lui-même, tandis que Jason mentionnait ce délai. Deux ou trois jours, cela lui laissait du temps. Du temps pour réfléchir, peut-être pour affronter certaines questions qui le hantaient. Il hocha la tête distraitement quand le garagiste évoqua Kassandra, réprimant un sourire qui menaçait de poindre. Chaque fois qu’il pensait à elle, il ressentait cette chaleur familière. Elle avait réussi à trouver une brèche dans son armure, ravivant une lumière qu’il croyait éteinte. Tout comme ce pick-up, Kassandra représentait une part précieuse de sa vie, un lien inextricable qui réchauffait son cœur et dont il ne voulait se séparer.
Asher se força à revenir à l’instant présent, conscient que Jason venait de se présenter. Pris de court par son propre silence, il tendit enfin la main. Lentement, son poing se desserra, et il serra la main du mécanicien, ignorant les traces de graisse. « — Asher, » se contenta-t-il de répondre, fidèle à son habitude de ne pas en dire plus que nécessaire. Son nom suffisait.
En suivant Jason jusqu’au comptoir, il sentit une légère détente s’installer dans son corps, comme si cette simple interaction humaine avait soulagé un poids invisible. Le bruit des outils, les éclats de voix des autres mécaniciens, et même l’odeur persistante de l’huile motorisée le ramenaient à un temps plus simple. Un temps où la complexité de la vie semblait moins pesante.
Devant la secrétaire, l’ancien militaire sortit son téléphone avec lenteur, vérifiant ses coordonnées avant de les partager. Ce geste anodin avait quelque chose d’étrange pour lui, une banalité qui contrastait avec le tumulte de sa vie récente. Partager son numéro avec un garage semblait à la fois banal et pourtant profondément normal. C’était peut-être un signe qu’il tentait de se réancrer dans une routine, loin de l’instabilité qui avait marqué ses dernières années. En cet instant, l’idée d’abandonner sa caravane pour quelque chose de plus permanent traversa son esprit, un foyer plus stable où il pourrait enfin s’installer.
« — Oui, c’est parfait, » dit-il en relevant la tête vers Jason. « — Appelez-moi demain. Et prenez votre temps. J’ai attendu si longtemps… un ou deux jours de plus ne feront aucune différence. »
Il passa une main dans ses cheveux, ses yeux brièvement posés sur le comptoir. Tout ce qu’il espérait, c’était que ce pick-up retrouve sa gloire d’antan. Et peut-être, se dit-il en silence que la réparation du véhicule symboliserait aussi pour lui un nouveau départ, une chance de bâtir une vie stable pour Kassandra.