Mon ami est vivant... Je n'en reviens pas ! Jason n'est pas mort. Comment est-ce que c'est possible ? Carla a dit qu'il était mort. Elle a entendu le coup de feu et son corps tomber. Elle ne serait pas aussi traumatisée s'il était vivant... Je suis totalement perdue... Mais je dois garder le silence pour l'instant. Je ne peux pas aller voir Carla pour la prévenir. Elle ne me croirait pas. À la place, je vais rejoindre Peter et je me jette dans ses bras. Il me regarde inquiet et essuie mes yeux. Il me demande ce qui se passe. Je lui explique alors le coup de fil que je viens d'avoir. Jason qui appelle pour savoir où est Carla... Jason vivant... Lui aussi n'en revient pas et je sais qu'il a une petite pointe au cœur. Je le vois dans son regard. Jason était mort et il ne l'est plus, contrairement à son épouse... Je le comprends et je ne lui en veux pas. Il m'embrasse doucement et me demande comment on fait avec Carla. Je lui explique qu'il vaudrait mieux attendre que Jason soit là. Elle doit le voir de ses propres yeux. Jason et moi avons des choses à nous dire avant qu'il ne puisse la revoir... Je pose ma tête contre le torse de Peter et je soupire. C'est tellement surréaliste ce qui se passe. Je demande à Peter s'il peut s'occuper des bébés pendant que je serais avec Jason. Il accepte volontiers. Je souris en l'embrassant et je redescends. Je vais jusqu'à la porte et je fais les cents pas. Je surveille les quelques voitures qui passent devant la maison. Et finalement, un vieux pick up ! Je le reconnais, c'est celui de Jason. Et mon dieu ! C'est vraiment Jason qui en sort !! Je me précipite vers l'extérieur et je me jette sur lui pour l'enlacer.
- Si tu savais comme je suis heureuse de te voir ! Je n'en reviens pas...
J'ai besoin de tout lui dire mais je dois y aller mollo. Il s'est arrêté à un moment où Carla a disparu de son champ de vision. Il ignore toute la suite... Et je vais devoir lui expliquer dans quel état est Carla...
Le pied sur l’accélérateur, je n’ai clairement pas les yeux sur le compteur. Tout ce qui m’importe c’est d’arriver le plus rapidement possible à l’adresse indiquée par Lexie. J’ai comme un gout de déjà vu dans les tripes et je dois avouer que cela ne me réussit clairement pas. J’ignore la douleur qui me parcourt le corps alors que les hématomes sont toujours bien visibles tout comme la blessure qui n’est pas vraiment soignée et encore moins guérit. Le fait est que le voisin qui m’a recueilli est – par chance ou par malchance – un vétéran de l’armée qui connait deux trois trucs. Il a retiré la balle et a fait un pansement de fortune avec ce qu’il avait sous la main. Je suis donc à peu près certain d’avoir une sorte de mouchoirs pour compresser la blessure et par-dessus quelque chose qui se rapproche le plus d’une compresse, le tout maintenant avec du scotch marron qui n’est clairement pas pour un usage médical. Mais qu’importe… Seule Carla comptait dans mon esprit, ainsi que les bébés, nos bébés.
J’avais mille scénarios qui défilaient dans mon esprit mais déjà tous les scénarios où Carla n’était pas en sécurité avaient été exclus par Lexie qui m’avait confirmé qu’elle était en sécurité. Mais pour autant, elle ne m’avait pas dit qu’elle allait bien et dans le même temps, Lexie elle-même semblait croire que j’étais mort. Alors que pensait Carla ? Que j’étais mort également ? Non, je vais lui dire que je vais bien, je vais lui montrer que je suis là et en vie… même si clairement je pense que Lexie voudra me soigner de façon plus adéquate. Je n’ose pas regarder la plaie qui me lance mais je doute sans mal qu’elle s’est remise à saigner. Malgré le fait que j’ai changé de t-shirt et que j’ai ma veste, cela finira par se voir mais peu m’importe.
J’arrive en trombe dans la rue de la maison de Peter et Lexie et je me gare à la va-vite. Lorsque je sors de la voiture, je vois Lexie qui sort de la maison et cours vers moi. En temps normal, je n’aurais pas forcément pris Lexie dans mes bras de cette façon puisque même si nous étions des amis proches, elle n’en reste pas moins une ex pour autant et d’autant plus maintenant qu’elle est avec Peter. Cependant, elle semble tellement bouleversée que j’écarte les bras et les referment sur elle lorsqu’elle arrive sur moi.
« J’suis pourtant bien là Lex… Tu pensais vraiment que j’étais mort ? C’est Carla qui t’as dit ça ? »
J’embrasse ses cheveux et la garde contre moi un instant, oubliant la douleur de ma blessure qui maintenant saigne à nouveau c’est certain. Puis lentement je m’écarte afin de pouvoir voir son visage et parle d’une voix plus douce que je ne l’aurais cru sous l’impatiente et l’angoisse :
« Dis-moi qu’elle va bien ? Je veux la voir, s’te plait. »
Je n'arrive pas à comprendre ce qui se passe. Je n'arrive pas à croire que Jason est en vie et pourtant... Il m'a prouvé au téléphone qu'il est bel et bien en vie. Il aurait pu parler de nous deux mais il a choisi de me parler du cheval de Carla. Un détail insignifiant surement pour le Centre mais un détail plus qu'important pour Carla. Ce cheval est son meilleur ami, son soutien, sa thérapie. Jason savait que je comprendrais directement que c'est lui. Mais comment est-ce possible ? Carla nous a dit qu'il est mort... Qu'est-ce qui a pu se passer ? J'ai besoin de le voir de mes yeux, voir qu'il est entier et bien vivant et besoin qu'il m'explique tout ce qui lui est arrivé ces deux derniers jours. Et je sais que je vais devoir tout lui expliquer au sujet de Carla... Il est tellement inquiet pour elle et pour les bébés. Je peux le comprendre. Mais il va devoir faire preuve d'un peu de patience avant de la voir car je dois vraiment lui parler de son état...
À peine Jason arrive que je sors de chez moi et je me précipite pour le prendre dans ses bras. Je me blottie tout contre lui. Je suis tellement soulagée ! Je ne pense à rien d'autre qu'à ça en cet instant. Je sais que Peter ne sera pas jaloux s'il me voit dans les bras de Jason. Je ferme les yeux et respire lentement. Je souris à son baiser dans mes cheveux. Un sourire triste.
- Carla nous a prévenu de ta mort. Elle a entendu le coup de feu et ton corps qui tombe... On a tous cru que tu étais mort Jason... Kassy et Asher aussi le pensent... Pour nous tu es mort y a deux jours...
Comment est-ce qu'on aurait pu douter des mots de Carla ? On était obligé de la croire, surtout au vue de son état... Il rompt notre câlin et je grimace légèrement à sa question.
- Tu vas la voir mais je dois te racon... Oh mon dieu Jason !! Tu saignes !!
Je ne remarque que maintenant le sang qui coule ! Je tire sur son autre bras pour le forcer à entrer.
- Carla est saine et sauve mais est profondément triste suite à ta mort. Je vais tout te raconter mais je dois te soigner immédiatement ! On parlera pendant que je te soigne.
Il verra Carla un peu plus tard. Je dois voir pourquoi il saigne. Et je dois faire en sorte de stopper ça. Heureusement que j'ai toujours ma trousse médicale avec moi. Je continue de le tirer pour qu'il me suive.
- Par contre ne fais pas de bruit s'il te plait. J'ignore si Carla et Peter dorment.
Carla, cela m'étonnerait. Et Peter je sais qu'il ne dort pas... Alors qu'il devrait vu le peu de temps qu'on a eu pour se reposer...
Entre l’adrénaline d’avoir enfin des réponses et de savoir ce qu’il était advenu de Carla et le stress de la retrouver et dans quel état puisque Lexie ne m’avait pas vraiment donné d’infos… Et surtout Lexie qui me pensait mort ? Mais quelques ce que c’est que cette histoire ? Oui, j'étais blessé, oui ça fait deux jours que j’ai disparu, mais si Carla me pense mort, je me dois d’aller la rassurer, de la prendre dans mes bras et de lui dire que je vais bien. Rien d’autre. Je n’ai rien d’autre à l’esprit que cela.
Mais avant de retrouver Carla, c’est Lexie que je retrouve devant chez son chéri et elle fonce dans mes bras, alors je me dois de la consoler, et cela, même si l’étreinte m’arrache une douleur au flanc :
« Alors oui, on m’a tiré dessus, mais j’suis pas mort. Quand je me suis réveillé, y’a plus personne et c’est un voisin qui m’a trouvé au bord de la route et qui m’a soigné comme il a pu. »
Je n’ai pas vraiment le temps de m’expliquer et puis cela n’a rien de très intéressant hormis le fait que je suis là, bel et bien en vie. Moi, c'est Carla qui m’importe parce qu’elle croit réellement que je suis mort et qu’une simple voix au téléphone ne la réconfortera pas. Je commence à la connaitre, il faut qu’elle me voie de ses propres yeux, qu’elle soit dans mes bras, que j’embrasse ses cheveux et que je lui dise que c’est bel et bien moi. C’est Lexie qui me ramène à la réalité lorsqu’elle se rend compte que je saigne. Et en effet, entre les mouvements brusques et l’étreinte rapide avec lexie, la plaie a dû se rouvrir… Je regarde mon t-shirt qui, bien qu’il soit propre, laisse apparaitre une tache rouge. J’entends les paroles de Lexie tout en me laissant entrainer dans la maison. Je voudrais la contredire et lui dire que mes soins peuvent attendre, je veux voir Carla…
« Non mais attends… »
Mais en même temps, je réfléchis, Est-ce que Carla ne va pas davantage paniquer en me voyant comme ça, blessé… Et les bébés, il ne faudrait pas qu’elle accouche précipitamment… Et cela m’apparait alors à la figure, me sautant presque aux yeux… mais alors que nous sommes dans la maison, je chuchote en arrêtant Lexie :
« Attends Lexie… Les bébés, comment vont-ils ? Tu m’as parlé que de Carla… Mais elle a accouché, elle a perdu les bébés ? »
Je sens que je deviens blanc à l’idée d’avoir perdu à nouveau des enfants à naître… ou alors est-ce que c’est la perte conséquente de sang… Cela me stoppe net et je me rends compte qu’il faut que je m’asseye… Je la suis jusqu’à la table et m’assieds lourdement sur une chaise en la regardant. Elle seule a les réponses…
« Dis-moi Lexie… Vas-y, j’vais encaisser… »
Je n’vais rien encaisser du tout, mais j’ai trop besoin de savoir pour affirmer le contraire.
Mon dieu ce que je suis heureuse. Jason est en vie. Je n'arrive pas à y croire. C'est complètement fou. Carla était sure qu'il était mort. Au vue de son état personne ne pouvait douter de ses dires. Elle était anéantie, brisée... Elle l'est toujours... Carla ne parle plus, ne bouge plus... Elle n'est plus que l'ombre d'elle-même. Son état me fait tellement mal au cœur. Mais tout est fini, elle va retrouver le sourire et sans doute la parole. Son amoureux est vivant ! Mon ami est debout devant moi... Je pourrais pleurer de joie. Je panique un peu quand il m'annonce qu'on lui a vraiment tiré dessus. Mais quelqu'un l'a soigné ; je suis soulagée.
- Après t'avoir tiré dessus, ils sont partis à la poursuite de Carla. Eux aussi ont du croire que tu étais mort.
Je me rends compte qu'il saigne. Je l'attire donc vers la maison et je vais le soigner en premier. Il ne peut pas aller voir Carla dans cet état. Si elle voit du sang sur lui son état pourrait empirer. Je veux juste que quand ils se retrouveront, elle verra qu'il va bien et qu'il est bel et bien en vie. J'explique que je vais tout lui raconter mais je dois absolument le soigner.
- Je ne vais pas attendre, tu saignes. J'ai besoin de voir ta plaie et surement de la recoudre.
C'est le côté médecin qui reprend le dessus. Il est mon patient et je vais le soigner, même s'il a d'autres priorités. La mienne est de le soigner. J'espère qu'il ne bougera pas lorsque j'irais chercher la trousse médicale. Il serait capable de se précipiter pour rejoindre Carla. Il ignore dans quelle pièce elle se trouve mais je sais qu'il la chercherait partout. Et comme elle est au rez-de-chaussée, il l'a trouverait facilement... Il demande alors comment vont les bébés. C'est vrai qu'il ne sait pas ! Oh merde, il devient tout pâle. Heureusement qu'on est proche de la table. Il peut s'y asseoir. Je l'aide doucement. J'ai peur qu'il tombe. Mais tout va bien, le voilà sur la chaise.
- Respire Jason. Les bébés vont bien. Elle a accouché la nuit dernière vers minuit et quelques. Ta mort a commencé à provoquer des contractions. Ils vont bien. Deux secondes je vais t'expliquer...
Je pars en courant pour aller chercher ma trousse et je le rejoins. Je l'aide à retirer son haut et je grimace. Non mais qui a fait ce pansement ? Mon dieu c'est ni fait ni à faire... Je retire tout et je commence à nettoyer la plaie.
- Après ta mort, Carla a su se cacher et a téléphoné à la sœur de Peter, mon chéri. Elle l'a ramené au ranch. Mais elle m'a vite appelé car Carla a commencé à avoir des contractions. Le Centre est arrivé et j'ai appelé ma sœur en renfort. On a protégé Carla. Elle a fini par accoucher alors qu'on était pris par le Centre. Ils nous tenaient... Mais j'ai pu prendre la fuite avec ma belle sœur et les bébés. On les a caché et protégé. Kassy et son fiancé ont aidé Carla à s'enfuir. Tout s'est bien fini. Ou presque...
J'ai parlé vite pour ne pas qu'il m'interrompe et surtout... je m'arrête de parler au pire moment je le sais. Il va flipper mais je me concentre sur la plaie. Il n'y a pas de balle et les bords sont propres. Je vais pouvoir suturer rapidement.
- Carla est dévastée. Elle ne parle plus et ne réagit plus... Serre les dents je vais recoudre. Je vais faire vite pour que tu puisses rejoindre ta petite famille.
Je fouille dans mes affaires. Je change de gants et je prends le matériel de suture.
A la vérité, j’ignore comment cela se fait que je suis encore là, en vie. Parce que je me suis retrouvé face à face avec des tueurs visiblement expérimentés qui m’ont laissés pour mort alors qu’ils auraient pu finir le boulot en me foutant une balle directement dans la tête. Mais non, à la place ils ont traqués Carla. Ma pauvre Carla qui me croit mort visiblement, puisque c’est ce qu’elle raconte à tout le monde. Alors qu’en fait, j’ai été ramassé par un voisin qui me connait parce que j’ai déjà réparé sa caisse et heureusement que je suis tombé sur lui et pas un autre qui m’aurait tué sur le champ. Non à la place il m’a soigné comme il a pu et je me retrouve ainsi devant Lexie alors que je sais Cassandra en sécurité mais sans pouvoir la retrouver tout de suite.
Et puis je me vois mal contredire Lexie après tout elle a souvent le dernier mot. J’ai un sourire au coin de la lèvre malgré la situation plutôt aggravante et je la suis jusque dans la maison lorsqu’elle me signale qu’elle veut voir ma plaie et qu’elle veut me soigner en priorité :
« Bien m’dame… Toute façon, je n’aurais pas le dernier mot… »
Je soupire en me rapprochant de la table et enfin mon cerveau se mets en route. Je n’ai pensé qu’à Carla parce que je savais nos enfants à l’abri dans son ventre mais Lexie ne m’a pas parlé des bébés à aucun moment et je réalise seulement maintenant ce que cela peut dire. Je demande des nouvelles de mes bébés à Lexie, pâle, tremblant de peur à l’idée d’avoir à nouveau perdu mes enfants. Cette situation je ne la connais que trop bien et je ne veux pas revivre cela. Je m’assieds par manque de force et heureusement Lexie me rassure aussitôt. Dieu merci, ils vont bien, ils n’ont rien… Mais alors… elle a accouché, je suis papa…
« Je suis papa… »
Je soupire ces mots dans un souffle alors qu’elle va chercher ce qu’il faut pour me soigner. Je ne bouge pas même si j’en meurs d’envie. Je veux ma Carla. Je veux mes enfants. Mais je ne bouge pas de ma chaise, simplement je retire mon t-shirt et je me laisse faire.
Je ne regarde pas ce qu’elle fait, je la regarde, elle, à la place. Je l’écoute me dire que ce que Carla a vécu, ce que mes amis, nos amis ont fait pour elle. Lexie, Peter, Kass, Asher… Tous ont sauvé ma petite femme et mes enfants… J’en envie de grogner sous ses paroles et sous ses gestes qui me font mal malgré tout mais je dis rien, je serre les dents. J’inspire à fond quand elle s’arrête de parler et je lâche :
« Quoi ? Continue… »
Le ton est assez sévère mais ce n’est pas ma volonté, simplement entre apprendre tout cela et la douleur cela ne m’aide pas à me calmer. Je serre la mâchoire et mon jean lorsqu’elle suture et je ne parle pas, je réfléchis. Carla muette, ce n’est pas réellement nouveau mais avec moi cela a marché une première fois alors cela marchera à nouveau quand elle verra que je suis en vie, présent pour elle et nos bébés et que jamais plus je ne la quitterais. Lorsque Lexie a terminé de suturer je me détends légèrement et parle à nouveau. Je n’avais pas pu avec la douleur :
« Je vais la rassurer et je vais lui montrer que je ne suis pas mort. Cela devrait l’aider à aller mieux… »
Je la regarde faire le pansement et je plonge ensuite mon regard sur elle :
« Maintenant, est-ce que tu veux bien que je la vois. J’en ai besoin Lex…J’veux lui dire que je l’aime et que je serais là pour toujours… »
Je souris quand il dit qu'il n'aura pas le dernier mot. Il le sait parfaitement. Je ne le laisserais pas dans cet état. De un parce que cela traumatiserait Carla et de deux je suis interne en médecine alors je ne peux pas laisser quelqu'un dans cet état. Et en fait y a aussi un trois... Trois, c'est un ami et je ne veux pas qu'il se vide de son sang. Alors effectivement, il n'aura pas le dernier mot.
- Tu as tout compris. Allez, on va te soigner avant que tu ne rejoignes ta chérie.
Je l'installe et tout en l'examinant je commence à parler. Je tente de faire un résumé très court et pas trop terrifiant. Ce qui compte, c'est qu'on soit tous sain et sauf et qu'il ne manque personne. Je souris à nouveau quand il dit qu'il est papa. J'avoue que cette nouvelle est incroyable... J'ai vécu avec eux la grossesse puisque j'étais leur médecin, mais cela m'a fait quelque chose lorsque Carla a accouché. Je n'ai pas réalisé sur le coup que cela voulait dire que Jason est papa, mais maintenant qu'on en parle... Je suis tellement heureuse pour lui.
- Eh oui... Monsieur le papa... Tu as deux magnifiques petits anges. Ils sont tout petits. La puce fait environ 2,4kgs pour 43 cm et le petit homme fait 2,6kgs pour 45 cm. Je les ai pesé et mesuré quand on est arrivé ici.
De vraies petites crevettes adorables. Ils sont assez calmes aussi. Ils ne pleurent en général que pour manger. Et ils restent blottis l'un contre l'autre... C'est si mignon à voir... Quand je reviens vers lui je reprends mon discours et hélas je m'arrête au pire moment et cela ne plait pas à Jason, je le sens au timbre de sa voix... Je commence à suturer en grimaçant. Je sais que je dois lui faire mal et je m'en veux mais bon... Je lui annonce donc l'état général de Carla... Jason ne répond pas dan l'immédiat mais finalement, une fois que je termine de le recoudre, il retrouve la parole. Je pose lentement le pansement pour protéger la plaie et je regarde Jason.
- Je pense que de te voir va vraiment l'aider oui. Elle va être si soulagée... Et bien sur que tu peux aller la voir. Elle est juste là. Carla sait que tu l'aimes... Mais oui, elle a besoin de l'entendre en ce moment... Sois patient avec elle...
Je lui montre la porte de la chambre. Je ne compte pas l'accompagner. Je pense qu'ils ont besoin d'être un peu seuls tous les deux. Ils ont besoin de se retrouver. Je sais qu'il l'a aidé à retrouver la parole lorsqu'ils se sont rencontrés mais j'ignore combien de temps cela a pris, et j'ignore comment il a fait. J'espère juste que cela sera rapide et que Carla va vite reprendre du poil de la bête... Leurs enfants ont besoin de leur maman...
J'ignore combien de temps s'est écroulé depuis que je suis chez Lexie... Je n'ai pas conscience que deux jours se sont déjà écoulés depuis la mort de Jason. Ou que cela ne fait que deux jours... C'est énorme et si peu. Je n'arrive pas à me faire à cette idée... Et pourtant... J'entends encore et encore le coup de feu et son corps qui tombe... Je revois ces hommes sortir du véhicule, je les revois me courir après... Je me souviens des premières contractions... Je ne voulais pas accoucher... Je voulais les protéger dans mon ventre et je ne voulais pas faire cela sans Jason... Mais il est mort... Il ne reviendra pas. C'est trop dur de supporter cela... Il est ma famille, mon amoureux... Je ne saurais pas protéger nos bébés sans lui... Je dois les tenir à distance de moi. Je ne peux pas les voir de peur de m'y attacher... Ils sont en danger avec leur maman... Le Centre m'a retrouvé... Ils risquent de les prendre, ou de me prendre, ou tous nous prendre... Et je ne veux pas... Mes bébés ne doivent pas aller là bas... Vivre coupés du monde... En fuyant, il y a un peu plus d'un an, je me suis rendue compte que j'ai tout raté, qu'il y a tellement de merveilles dans le monde...
Je suis couchée dans le lit. Je sombre parfois dans le sommeil mais je fais des cauchemars... J'ai mal à mon ventre devenu tout vide et flasque... Il est encore un peu là mais ce n'est plus comme quand mes bébés étaient dedans... J'ai du mal à marcher aussi, mais de toute façon je n'ai pas envie de le faire... Par contre, j'obéis à Lexie et je tire le lait quand elle me le rappelle de le faire. Je n'aime pas ça, je ne veux pas le faire mais elle m'a expliqué que sans cela les bébés iraient très mal... Elle a oublié de dire qu'ils peuvent prendre un autre lait... Qu'elle fait ça parce qu'elle espère que je change d'avis sur eux...
Je fixe le mur, couchée dos à la porte. J'ai mis un oreiller entre mes jambes. Je reste immobile, sans bouger. Je cligne parfois rapidement des yeux à cause des larmes qui coulent toutes seules et surtout je les cligne pour chasser les images qui reviennent... Je n'ai plus aucune volonté... Cela me rappelle une époque très très lointaine mais c'est flou... Un passé que j'ai oublié... Une chambre d'hôpital... Une toute jeune fille qui ne réagit plus... Je secoue la tête pour effacer ce... Souvenir ? Je ne veux pas savoir... Et bim... PAN... BOUM... Coup de feu... Corps qui tombe... Je ferme les yeux un instant avant de recommencer à fixer le mur. Incapable de trouver le sommeil...
Je crois que tenir tête à Lexie quand elle s’en fait à ce point pour moi, c'est peine perdue. Et puis en un sens, elle n’a pas tout à fait tort. Ainsi blessé, je ferai plus peur à Carla qu’autre chose et cela lui permet de tout me raconter et moi de lui dire ce que j’ai vécu aussi. Je finis donc par m’asseoir et par me laisser faire. Mais surtout, j'apprends un détail dont je n’avais pas pris conscience. Je suis papa.
Je le souffle et elle me le confirme dans la foulée. Carla a accouché en pensant que j’étais mort. Elle était seule… enfin pas seule parce qu’elle était avec des amis, mais je n’étais pas là pour elle… Je sens la culpabilité qui monte, mais je la freine en me concentrant sur une information importante. Mes bébés vont bien. Je l’écoute poursuivre son récit et m’expliquer exactement ce qu’il s’est passé, mais je n’aime pas savoir que ma chère et tendre ne va pas bien et en même temps, c'est logique qu’elle n’aille pas bien. Après avoir perdu – selon elle – l’homme qu’elle aime et puis mettre au monde deux bébés. C’est fatiguant, éprouvant et déstabilisant.
Je serre les dents le temps qu’elle me recoud et je la regarde terminer de me soigner avant de lui demander à nouveau de la voir. J’ai certes très envie de voir mes enfants, mais Carla est ma priorité, d’autant plus que je la sais dévastée comme l’a si bien dit Lexie :
« Je serai patient et à son écoute. Mais tu sais Lex, Carla, elle a besoin d’être un peu poussée pour aller mieux. C’est ce que j’avais fait quand elle est arrivée au ranch et ça avait plutôt bien marché jusque-là… Enfin, j'aviserai… »
Je me relève et mets un t-shirt propre qu’elle m’a apporté avant de prendre appui un instant sur elle et de l’attirer à nouveau à moi pour la prendre dans mes bras. En même temps que le câlin, je lui souffle quelques mots :
« Merci d’avoir pris soin d’elle et de mes enfants Lex… Je t’adore tu le sais hein ?! »
Lexie et moi, on a eu notre histoire dans le passé, mais elle est heureuse maintenant et moi aussi et j’aime vraiment l’idée que l’on soit malgré tout restés amis. Je me dirige vers la chambre en question, mais reste un instant derrière la porte pour reprendre mon souffle et mes esprits. Un instant, j’oublie ces dernières heures, j’oublie mes enfants et je me concentre sur Carla. Je frappe quatre coups comme j’ai toujours l’habitude quand je vais la voir et j’entre sans attendre de réponse. J’ignore si elle dort ou si elle est réveillée par le fait que j’ai frappé à la porte, mais la pénombre de la pièce me fait plisser les yeux avant de trouver une lampe de chevet pour l’allumer.
« Carla ? C’est moi… C’est Jason… Réveille-toi ma choupette. Je suis là. »
Je pose un genou à terre et me penche sur le lit où elle est allongée. Ma main caresse ses cheveux tandis que j’attends sa réaction pour savoir si je peux la prendre dans mes bras, l’embrasser ou même m’allonger près d’elle pour la rassurer, mais je me sens tout de même bien plus léger maintenant que je l’ai retrouvé.
Bon, la blessure est soignée et recousue. Il devrait guérir correctement mais il va falloir qu'il se repose et qui fasse attention à ne pas trop porter... Je ne veux pas que les points pètent. Mais je sais que le repos va être compliqué... Il a des jumeaux et une chérie qui ne va pas bien. Je le connais... Je le sais qu'il va forcer pour aider... Mais il doit aussi se reposer sur moi et sur Peter. De plus... Je ne lui ai pas parlé de quelque chose... Kassandra et Asher veulent partir et prendre Carla avec eux, ainsi que les bébés... Pour qu'ils soient en sécurité loin du Centre... Se cacher quelque part... Mais je ne peux pas le lui dire maintenant... Je le dirais demain... Une fois qu'il aura retrouvé sa petite famille...
- Tu la connais mieux que moi. Je te fais confiance, je sais que tu vas arriver à l'aider à reprendre le dessus... Et quand tu voudras voir tes enfants, c'est au premier étage. La deuxième porte à droite. Peter et moi sommes également à l'étage au besoin.
Qu'il sache qu'on veille sur ses enfants en attendant. Il peut prendre le temps qu'il veut avec sa Carla. Je pense qu'il va lui falloir du temps pour arriver à lui faire retrouver la parole... Je ne l'ai jamais vu comme cela... Si dévastée... Mais Jason va l'aider, il va la rassurer je n'en doute pas. Tout du moins, une fois qu'il aura une tenue plus correcte. Je le laisse me prendre dans ses bras et je veille à ne pas trop le serrer pour éviter de le faire souffrir.
- Je t'adore aussi Jason. Et je prendrais toujours soin des gens qui comptent pour toi. Et puis, Carla... C'est une brave petite. Je l'aime beaucoup. Elle m'a beaucoup touchée. Allez file l'amoureux. On se reparle plus tard...
Carla est douce, gentille, si innocente... Elle voit le monde autrement et c'est incroyable. Cela fait un bien fou. Et puis, comme elle ressent les émotions, elle m'a pas mal aidé à apprendre à contrôles les miennes pour ne pas la perturber. J'ai évolué et grandi en quelque sorte à ses côtés.
Je fais un petit signe à Jason et je monte à l'étage tout doucement. Je rejoins mon homme qui a dans les mains le babyphone. Cela me fait sourire. Je lui prend des mains et le pose plus loin pour venir ensuite me blottir dans ses bras. Je le rassure sur la santé des bébés et je lui parle de Jason. Je lui raconte tout ce qui vient de se passer. Je verse quelques larmes car mine de rien je réalise réellement que Jason n'est pas mort... Et je me dis que tout va peut-être s'arranger. Tout ira bien. Oui, tout va bien aller et personne ne sera plus séparé.
J'entends les coups à la porte mais je n'y prête pas attention. Je reste couchée. J'ai mal à la tête et aux yeux de tant pleurer. Jamais je n'aurais du sortir du ranch... Ils ne m'auraient pas retrouvé et Jason ne serait pas mort... J'aurais dû rester cachée loin des gens... Comment j'ai pu imaginer que j'allais vivre ma vie librement ? Comment j'ai pu croire que je ne mettrais jamais personne en danger en les côtoyant ?J'ai été bête... J'aurais dû également tout raconter à Jason... Sans rien omettre... Désormais, c'est trop tard... Je l'ai perdu et j'ai perdu ma famille. Je ne pourrais jamais prendre soin de nos enfants...
La lumière s'allume alors je ferme les yeux. Mais je les ouvre bien vite. C'est étrange... J'entends la voix de Jason... Mais c'est impossible. C'est plus réel que lorsqu'un souvenir me revient... Et... Il n'a jamais dit cette phrase dans le passé... Pourquoi j'ai un faux souvenir qui apparaît ? Pourquoi mon cerveau est aussi cruel ? Quelqu'un me touche les cheveux... Je deviens folle ? J'imagine des choses ? Je prends Lexie pour mon Jason ?
Je ne bouge pas. Je reste comme une statue à attendre que tout cela cesse. Je sais que je ne rêve pas car j'ai vraiment senti une main... Et elle continue à caresser mes cheveux... Je fronce les sourcils. Qu'est-ce qu'il se passe ? Je tourne un peu la tête en direction de la personne. Mes yeux s'écarquillent de stupeur. Je passe une main sur mon visage. Mon cerveau est cassé... Je vois... Jason ? Mais c'est impossible... Je me redresse en grimaçant et m'éloigne sur le côté. Mais je continue de le regarder. Je plisse mes yeux et penche un peu la tête sur le côté. Il semble si réel... Je lève la main vers lui mais je la laisse retomber. J'ai trop peur de ne rencontrer que du vide. Finalement, je décide de me recoucher et de fermer très fort les yeux pour que mon esprit arrête de me torturer de la pire des façons. Comment est-ce que je peux entendre sa voix, sentir son odeur ? Sentir sa main dans mes cheveux ? Cela me fait si mal...
Mais encore une fois, je change de position pour me tourner lentement vers lui en me rapprochant un peu pour le coup. Cette hallucination est si douce et cruelle à la fois... Je le regarde avec une infinie tristesse. Mon amoureux me manque tellement... Je souris avant de laisser les larmes se remettre à couler. Mon Jason... Si beau... Si gentil... Si bienveillant... Je l'aime tellement... Je ne vais pas y arriver sans lui...