CHAPITRE I, le rêveur
La famille Vadalov n’était pas conspuée dans le quartier, malgré le statut notable de leur patriarche. Les familles aisées suscitaient souvent la colère des plus démunis, surtout à une époque troublée où la moindre excuse servait à dénoncer son prochain. Pourtant, monsieur Vadalov était un médecin dévoué, prêt à offrir des soins gratuits à ceux qui ne pouvaient se permettre des traitements dignes. Peut-être est-ce pour cette raison que, dans ce coin du monde menacé par la guerre, la famille Vadalov échappait aux regards haineux. La mère, quant à elle, enseignait à l’école du quartier, un lieu où tous se mélangeaient, indépendamment de leur classe sociale. Les enfants portaient des uniformes et profitaient de leur innocence.

Mais la guerre arriva si rapidement, emportant avec elle l’été et les derniers moments de bonheur. Le ciel devint soudain terne, surtout lorsque les Russes, à bord de leurs engins de mort, se mirent à bombarder. Au sol, l’ennemi gagnait en puissance, ignorant presque totalement les ruines qui jonchaient leur chemin. Sarajevo, autrefois magnifique et libre, fut défigurée de toutes parts et fut prise en tenaille pendant des mois qui se transformèrent rapidement en années.

Aslan, avec sa chevelure blonde et ses yeux bleu intense, si profonds que sa mère disait pouvoir s’y perdre, croyait naïvement en cette affirmation à son jeune âge. De plus, il était toujours souriant et joyeux, presque naïf, ce qui lui valait quelques moqueries de la part de ses camarades, peut-être parce qu’ils ne rêvaient pas autant que lui.

En effet, Aslan était un rêveur, doté d’une imagination débordante, une qualité qui le préserve durant les premiers mois du conflit. Il s’inventait toute une histoire, encouragé par ses parents qui voulaient le protéger à tout prix, étant donné qu’il était leur unique enfant. Ils savaient que l’innocence de l’enfance était un trésor à préserver, une lueur d’espoir au milieu de l’obscurité grandissante.


CHAPITRE II, La fin de l’innocence
Cependant, on ne peut pas fuir la réalité lorsque celle-ci vous rattrape et vous explose littéralement en plein visage. Comment décrire l’horreur de voir sa propre mère être touchée par une balle en pleine tête, un jour où le soleil était pourtant réapparu dans la cour de récréation, incitant les enfants à sortir et jouer ? Mais qui aurait pu imaginer que des tireurs embusqués s’étaient positionnés sur les montagnes environnantes, prêts à tirer sur n’importe qui, sans distinction ?

C’est à ce moment-là que l’innocence d’Aslan et son monde imaginaire se sont effondrés, brisés par la réalité brutale de la guerre. Le conflit avait fait irruption dans sa vie, détruisant tout sur son passage, y compris les moments les plus ensoleillés et paisibles. À la mort de son père dans un bombardement à l’hôpital, l’orphelinat devint sa nouvelle demeure. Finalement, le patriarche avait sacrifié sa vie pour tenter de sauver celle des autres, en vain.

Aslan ne parlait plus et s’isolait des autres, mais cela ne l’empêchait pas d’être un grand bagarreur, au point qu’il avait dû être mis à l’écart. Les nonnes étaient perplexes et inquiètes de voir ce jeune garçon de neuf ans s’enfoncer un peu plus chaque jour. Ses nuits étaient hantées par des cauchemars où il revivait inlassablement la mort de sa mère. Ainsi, il se réveillait en sursaut et avait développé le réflexe de se faire du mal pour rester éveillé et détourner sa douleur vers autre chose.


CHAPITRE 3, Cole Miller
Les mois passèrent, mais le mutisme d’Aslan persistait, tout comme les cicatrices sur ses bras. Cependant, un jour, deux hommes se présentèrent à l’orphelinat. L’un des deux tenait une valise qu’il remit à la mère supérieure, tandis que le second s’approcha d’Aslan. Le petit garçon n’oublierait jamais le regard brillant et le sourire carnassier de cet homme, qui l’examinait de la tête aux pieds avant de feindre d’être bienveillant en posant une main sur son épaule frêle.

L’équipée quitta la Serbie et le continent pour rejoindre l’Amérique, un voyage qui éveilla la curiosité du petit garçon âgé de dix ans. Il se surprenait même à rêver, ne serait-ce que l’espace d’un instant, avant de se sentir coupable en repensant à la vie qu’il laissait derrière lui et au pays qu’il abandonnait sans avoir eu son mot à dire. Aslan comprit rapidement que son opinion n’avait désormais plus aucune importance. On commença par lui faire comprendre qu’il serait désormais appelé Cole Miller. En un claquement de doigts, sa vie, son nom et ses racines furent effacés, au nom d’un prétendu nouveau départ.


CHAPITRE 4, la recrue parfaite
L’apprentissage de la langue était une étape relativement facile pour les enfants. Ensuite, ils étaient soumis à des entraînements physiques intenses visant à développer leur force, leur agilité et leur endurance. Cela comprenait des séances de musculation, de combat, de course à pied et bien d’autres activités. Parallèlement, les jeunes recrues étaient initiées à différents types de combats, comme les arts martiaux, les combats au corps à corps et l’utilisation d’armes à feu.

Au fil du temps, les mauvais traitements continuaient pour ceux qui tentaient de résister. Cole avait essayé de se battre, mais les privations constantes, les coups, les humiliations de toutes sortes et le lavage de cerveau avaient fini par le briser et effacer toute résistance en lui. Le rêveur qu’il était avait disparu, laissant place à un adolescent obéissant aveuglément aux ordres de Novak, son créateur. Cole se dévouait corps et âme pour plaire à Novak, faisant de cela l’objectif principal de sa vie. Il ne pensait plus par lui-même, tant il avait été conditionné.

Novak, satisfait de son élève, poussa les choses plus loin en lui enseignant les techniques d’infiltration et de collecte de renseignements. Il soumit Cole à des tests psychologiques rigoureux et lui fit suivre une formation intensive pour renforcer sa résistance mentale, sa capacité à résister à l’interrogatoire et à rester concentré sous pression.

Cole était devenu une véritable machine, dévoué à satisfaire les attentes de Novak. Son identité individuelle s’était effacée, conditionnée à servir les objectifs de son mentor. En récompense de sa loyauté, on lui accorda rapidement la possibilité de mener ses premières missions sur le terrain, indiquant ainsi la fin de sa formation initiale. Désormais, il devait mettre en pratique les compétences et les connaissances acquises au cours de ces années d’endoctrinement. Cole réussit facilement toutes les évaluations et fut considéré apte à être déployé sur le terrain. On lui remit une arme, une nouvelle identité officielle et un logement.

Il était maintenant prêt à se lancer dans le monde réel en tant qu’agent opérationnel, prêt à exécuter les ordres de Novak et à poursuivre les objectifs de l’organisation. Le terrain serait son nouvel environnement, où il devrait naviguer avec prudence et utiliser ses compétences pour accomplir les missions qui lui seraient assignées. Cole se tenait prêt, conscient que son passé était désormais derrière lui, remplacé par un nouveau rôle et une nouvelle identité.


CHAPITRE 5, Le mort de Novak…
D'aussi loin qu'il s'en souvienne, Novak n'a jamais montré la moindre affection envers Cole, ni même un geste qui pourrait être qualifié de gentil. Leur relation était dépourvue de tout signe d'attachement, presque froide et distante. Cependant, malgré cette apparente indifférence, la perte de Novak a profondément affecté Cole, bien qu'il s'efforce de dissimuler ses émotions. Les autres membres de la Division suggéraient souvent que Novak était comme une figure paternelle pour eux, apportant de la stabilité et de la guidance à ceux qui en avaient besoin. Il était respecté et admiré pour sa sagesse et son expérience inégalées.

Ainsi, depuis la mort de Novak, Cole ressent un vide, un manque d'une présence qui avait une signification spéciale pour lui. Novak était plus qu'un donneur d'ordres. Il était celui qui avait façonné Cole, une création qu'il avait minutieusement développée et perfectionnée au fil des années. Maintenant, cette figure paternelle est absente, laissant le quadra confronté à ses propres sentiments et à une solitude inattendue.

Cependant, dans ce vide, il y a aussi une opportunité. C'est peut-être le début d'une nouvelle ère pour Cole, où il peut enfin s'affirmer en tant qu'individu autonome, sans la nécessité constante de répondre aux attentes de son maître. Il a l'opportunité de se redécouvrir, d'explorer ses propres désirs et aspirations, et de trouver sa place dans le monde sans l'influence dominante de Novak.

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