Rien n'est plus beau qu'une mélodie dont la sonorité est parfaite.
Nous étions en milieu de semaine et il était 13h30 de l’après-midi. J’avais terminé de donner les cours plus tôt aujourd’hui et je n’avais pas envie de rester à l’école pour corriger mes copies. J’avais entendu quelques collègues me parler d’un excellent restaurant italien. Je me rendais donc au Bellagio pour manger. Je comptais prendre mon temps et profiter de l’ambiance pour me détendre en regardant quelques partitions toutes neuves que je venais d’acquérir en plus de mes corrections. J’entrais dans le restaurant et je fus installé à une table près de la fenêtre et je ne pouvais que sourire en voyant le superbe piano. Il n’était pas aussi performant que celui que j’avais à la maison, mais je savais reconnaître un instrument de qualité. Je me commandais une coupe de vin rouge et le menu du jour tout simplement. Il n’y avait aucun fruits de mer donc j’étais à l’abris d’une belle allergie.
Je sortais mes copies et mes partitions et je commençais mon travail lentement. Je jetais un œil de temps en temps au piano en souriant. J’avais une petite envie de jouer pour voir comment il sonnait ce petit coquin. Je regardais autour, il n’y avait personne en dehors d’une femme aux cheveux blonds plus loin qui discutait avec la serveuse. Je n’avais pas encore reçu mon assiette principale alors autant en profiter. Je m’essuyais la bouche et je me rendais à l’instrument. J’ouvrais le dessus avant de m’asseoir et instinctivement je me mettais à jouer G mineur de Bach. La résonance n’était pas optimale et je pouvais l’entendre parfaitement. Il faut dire que les restaurants n’étaient pas les lieux les mieux insonorisés non plus. Je continuais le morceau en écoutant attentivement chaque son. J’allais devoir l’ajuster adéquatement. Il avait bien besoin d’un peu d’amour. Même le piano le plus ordinaire et bas de gamme pouvait bien sonner avec un peu d’attention au bon endroit. J’étais dans ma petite bulle et je souriais. Ça m’avait manqué de jouer aujourd’hui.
Rien n'est plus beau qu'une mélodie dont la sonorité est parfaite.
La journée était relativement calme pour une fois. Je n’en étais pas mécontente à dire vrai. Mon restaurant fonctionnait très bien et je n’étais pas inquiète. Mais il ne pouvait pas être plein à craquer tous les midis. J’avais toujours mes clients les plus fidèles qui venaient prendre leur pause déjeuner. Je faisais mon possible pour varier la carte au mieux et pour faire en sorte qu’il y en ai pour tous les goûts. Il m’arrivait même parfois de mettre la main à la pâte et d’aider en cuisine. J’avais toujours adoré être derrière les fourneaux. Mon père m’avait tout apprit.
Je profitais de ma journée pour former une nouvelle serveuse. Je recevais beaucoup d’étudiantes et j’avais eu la chance de ne jamais avoir le moindre souci jusqu’ici. J’étais en train de lui expliquer la carte lorsque mon attention fut interrompue par la mélodie de mon piano. Je m’excusais auprès de ma petite serveuse et je m’avançais vers le piano. Un client s’y était installé et jouait. Personnellement, ça ne me dérangeait pas, bien au contraire. Il jouait divinement bien et mon piano en avait un peu besoin. Ca faisait un petit moment que personne n’était venu lui chatouiller les touches.
Je ne connaissais pas le monsieur qui était en train de jouer, mais en revanche, il jouait vraiment divinement bien. Est-ce que ça l’intéresserait de venir certains vendredi soir pour égayer un peu mon restaurant ? C’était une question que j’avais vraiment hâte de lui poser. J’attendais qu’il termine de jouer et je fermais les yeux. Je me laissais emporter par la musique. Ce morceau était vraiment un excellent choix. J’adorais le piano, ce n’était pas un hasard si j’en avais mit un au sein de mon restaurant. Mais, en ce qui me concernait je ne savais pas en jouer.
A la fin du morceau, j’applaudissais et mon personnel ainsi que le peu de clients qui se trouvaient là, applaudirent eux aussi. « C’était absolument magnifique monsieur. » Je lui tendais la main pour me présenter. « Bonjour, je suis Lexa Black, la propriétaire de cet établissement. Et vous êtes ? » J’avais vraiment hâte d’en savoir un peu plus sur ce pianiste mystère. Je voulais faire un peu plus connaissance avec lui afin de pouvoir lui demander s’il serait d’accord de venir jouer. Bien sûr, il serait gracieusement payé. Avec un talent comme le sien, il ne pouvait en être autrement.
Rien n'est plus beau qu'une mélodie dont la sonorité est parfaite.
Je terminais le morceau en sachant exactement où était le problème de ce beau piano. Je me retournais en entendant les employés ainsi que les clients présents applaudirent. Je me levais pour les saluer avec toute la prestance que j’avais. Ça faisait un sacré moment que je n’avais pas fait de vrai concert. J’avais cessé après la naissance de Kassandra pour avoir un emploi plus stable, mais je n’avais jamais cessé de jouer. Jamais. La musique était l’héritage de ma mère et j’en étais excessivement fier. Je regardais la propriétaire du restaurant s’approcher et me tendre la main. Je la serrais avec fermeté. Elle avait l’air très sympathique. Je lui faisais mon plus beau sourire avant d’aller vers ma table pour prendre une gorgée d’eau.
- Hum…
Je terminais ma gorgée avant de me tourner vers elle pour lui répondre après avoir déposé mon verre sur la table.
- Je m’appelle Aaron Watson. Je suis ravie de faire votre connaissance madame Black.
Je ne manquais pas de remarquer son alliance. Je continuais de lui sourire alors que mon assiette arrivait avec une serveuse qui me gratifiait d’un beau sourire. Je faisais signe à la propriétaire de prendre place en avant de moi même si j’avais éparpillé les copies et les partitions sur la table partout. J’avais ce petit côté désordonné lorsque je faisais des corrections.
- J’aurais sans aucun doute dut vous demandez la permission avant d’utiliser votre piano. Je n’ai pas pus résister à la tentation en le voyant. Vous avez un bel instrument, mais il manque un peu d’amour.
Peu de gens étaient habiletés à bien connaître les sons d’un piano en dehors d’un connaisseur. Je lui souriais en commençant à manger.
- Votre établissement est magnifique madame Black et votre potage du jour était absolument exquis. C’est vous qui faites les recettes?
J’étais sincère. Je trouvais la décoration absolument magnifique et l’ambiance chaleureuse. Il était clair que je reviendrai avec ma femme pour un repas en tête à tête lorsque nous serions définitivement installé. Nous avions commencé à travailler directement sans prendre de pause et les boîtes n’étaient pas encore toutes ouvertes pour mon plus grand désespoir.
Rien n'est plus beau qu'une mélodie dont la sonorité est parfaite.
C’était la première fois que je voyais cet homme dans mon restaurant et très franchement, j’espérais que ce ne serait pas la dernière. La plupart de mes clients appréciaient la bonne musique et moi aussi. Tous les jours en voyant mon piano, je me disais qu’il fallait que je fasse quelque chose pour lui et puis, je passais à autre chose. Au final, il prenait la poussière et ce n’était pas bon pour lui. Il me serrait la main avec poigne et je lui faisais un joli sourire. « Je suis enchantée de faire votre connaissance monsieur Watson. »
Ce dernier alla prendre place à sa table et ma nouvelle serveuse lui apporta son assiette. Je profitais qu’elle soit là pour me commander un verre de vin blanc. J’en avais reçu une nouvelle sorte et je voulais le déguster en avant première. Je posais rapidement mon regard sur la table avant de le reporter sur le joueur de talent que j’avais en face de moi. « Oh non au contraire ! Vous avez vraiment très bien fait ! Il n’est pas assez utilisé à mon goût, mais je n’arrive pas à trouver un pianiste qui me convienne. Jusqu’à ce que je vous entende. »
La serveuse m’apporta mon verre de vin et je la remerciais avant de reprendre ma conversation avec monsieur Watson. « Je vous remercie pour se compliment. Je rêvais d’avoir un établissement comme celui-ci depuis toujours. » Je buvais une gorgée de vin en regardant autour de moi. Oui, j’étais fière de cet établissement. Je savais où je voulais aller avec lui, la décoration que je voulais, j’avais tous les plans en tête depuis que j’étais adolescente. J’avais pu réaliser mon rêve et j’étais vraiment heureuse dans ma vie. Sauf la relation avec mon fils. Mais ça…
Je reportais mon regard sur lui. « Oui, c’est exact. Ces recettes sont dans ma famille depuis plusieurs générations. Je les ai juste un peu re visitées pour qu’elles soient au goût du jour. N’hésitez pas à me dire si quelque chose ne vous convient pas. Toute critique est bonne à prendre en ce qui me concerne. Excusez mon indiscrétion, mais vous êtes professeur de piano ? » Je n’avais pas pu m’empêcher de voir les copies et les partitions sur la table. Cet homme était pleins de surprise. Il vivait de sa passion tout comme je vivais de la mienne.
Rien n'est plus beau qu'une mélodie dont la sonorité est parfaite.
La propriétaire qui s’était jointe à moi était absolument et fortement aimable. J’aimais ce genre de personne qui avait de belles valeurs encrées. Je lui souriais en mangeant mes pâtes fraîches. Un véritable délice en soit. Je prenais également une gorgée de vin blanc en lui souriant. Les recettes provenaient de sa famille et c’était une excellente chose selon moi. La famille était le centre de nos vies selon moi. Qu’il s’agisse de celle que l’on avait choisi ou pas.
- Je ne suis pas un grand gastronome, mais j’ai toujours aimé les bons plats dans les beaux endroits. Je préfère nettement payer un peu plus cher mais vivre une belle expérience plutôt que de manger rapidement un burger sans goût et saveurs. Je dois vous dire que la sauce de ces pâtes est absolument parfaite. Je n’ai pas de recommandations à vous faire en ce sens madame Black.
Je lui souriais toujours alors qu’elle me posait des questions sur mon travail. Il était vrai que ça semblait plus que flagrant. Je rigolais en peu en mettant les feuilles en paquets pour éviter qu’elles ne prennent trop de place sur la table. C’était malpoli de s’étaler ainsi alors qu’une personne se joignait à nous.
- Je suis enseignant de musique du Lycée de Blue Cove. J’enseignais également le piano en privé avant de déménager dans cette ville durant les week-end. Ça m’aidait à passer le temps un peu à la maison lorsque ma femme travaillait. Je ne joue plus sur scène depuis très longtemps. J’ai choisi la vie de famille plus stable, mais ma fille est grande maintenant et c’est une adulte. Elle n’a plus vraiment besoin que papa soit à la maison.
Il était vrai que le temps avait passé rapidement. Je me souvenais avoir jouer pour Lexie en l’assoyant sur mes genoux et idem pour Kassandra. Je jouais pendant qu’elles étudiaient ou encore après un bon repas en famille. Ça me manquait ces moments en musique tous ensemble, mais la vie était ce qu’elle était et les enfants grandissaient. Kassandra étant partie précipitamment, j’étais un peu plus couvrant avec ma cadette. Mon regard devait sans aucun doute ce perdre dans mes souvenirs. À quoi aurait ressembler Kassandra aujourd’hui? Je me posais cette question chaque jour. Aurait-elle les cheveux teints? De piercings? Des tatouages? Que ferait-elle comme travail? Aurait-elle des enfants? C’était difficile de penser à tout ça et ça le serait toujours.
Rien n'est plus beau qu'une mélodie dont la sonorité est parfaite.
Je lui faisais un joli sourire après avoir bu ma gorgée de vin. J’aimais bien parler avec mes clients de temps en temps. Je rencontrais très souvent des gens intéressants. Je gardais mon verre dans ma main tout en écoutant ce qu’il avait à dire. « Je suis vraiment ravie que cet endroit et que ma cuisine vous plaise. J’ai fait en sorte que ce soit un gastronomique mais abordable pour tout le monde. C’est important. Je ne vois pas pourquoi la cuisine raffinée ne serait réservée qu’aux riches. Alors j’ai fait deux cartes comme vous avez bu le constater. Une avec des plats traditionnels et une dont je laisse mon cuisinier jouer de son imagination. »
Il était enseignant au lycée, tiens, ça, c’était intéressant. Il avait donc certainement du avoir mes enfants en tant qu’élèves. Ma fille aimait bien la musique, mais mon fils, à part sa musique. « Oh, mais vous avez donc très certainement du avoir mes enfants dans votre classe. J’ai des jumeaux. Elena et Alexander. Est-ce que ça vous dit quelque chose ? » Il ne devait pas avoir qu’eux comme élèves, donc je me doutais bien qu’il ne pouvait pas se rappeler de tout le monde.
« Oh, détrompez-vous, nos enfants aurons toujours besoin de nous. Même s’ils n’ont pas forcément envie de le reconnaître. Monsieur Watson, j’ai une question. Je ne vais pas y aller par quatre chemins. J’aimerai savoir si, moyennant finance, vous seriez d’accord de venir jouer au sein de mon établissement le vendredi soir ? Vous n’êtes pas obligé de me répondre tout de suite. Et je me doute tout à fait qu’il faut que vous en parliez avec votre épouse au préalable. Mais je ne vous cache pas que ça me ferait vraiment plaisir que vous acceptiez. »
Et puis, tout le monde serait gagnant. Lui, pourrait combler son manque de se représenter en publique et moi, je pourrais attirer d’avantage de clientèle.
Rien n'est plus beau qu'une mélodie dont la sonorité est parfaite.
Ainsi donc, la blonde en face de moi avait des enfants. Des jumeaux plus précisément. Je tentais de chercher dans mon esprit les élèves, mais j’avais un sacré problème avec les prénoms. Je confondais les membre de ma propre famille alors de me souvenir de deux élèves sans même savoir leur nom de famille c’était un tantinet chaud. Je réfléchissais en regardant en l’air. Foutue mémoire et dire qu’il en avait toujours été ainsi au grand désespoir de mon entourage. Rose se fâchait un peu lorsque je l’appelais Kassoulet. J’ignorais exactement pourquoi.
- Je dois avouer que je ne suis en ville que depuis deux semaines. Je n’ai pas encore appris le nom de mes élèves pour mon plus grand désespoir. En fait, j’oublie toujours les prénoms de ces derniers et je les confonds chaque fois. J’ai la mémoire des visages cependant.
Je rigolais un peu. Une simple photo aurait suffit à raviver mon esprit. Je l’écoutais ensuite me parler et je lui faisais un petit sourire. Je savais qu’elle avait raison. Elle continuait de m’appeler monsieur et je grinçais un peu des dents. Monsieur c’était mon père, pas moi. Je n’avais pas un bâton militaire dans le cul comme lui. Sacré papounet. Il avait tout un caractère l’ancien lieutenant général du corps des marines. Je souriais un peu en coin en pensant à lui. Il faudrait que je lui téléphone pour avoir de ses nouvelles. Il devait s’ennuyer chez lui. Je ramenais mon attention sur la femme en face de moi. Elle venait de m’offrir un emploi comme pianiste les vendredi soir. J’avais une forte envie d’accepter immédiatement son offre, mais je devais effectivement en discuter avec ma femme dans un premier temps. Je ne voulais rien faire dans son dos. Elle m’en aurait profondément voulu.
- Bon d’abord, cessez de m’appeler « monsieur ». Monsieur c’est mon père. Aaron sera suffisant et vous pouvez me tutoyer. Je suis intrigué par votre offre. Je croyais qu’un établissement comme le vôtre aurait déjà son pianiste du vendredi soir. Vous me voyez surpris. On parle de combien par soirée exactement?
Je n’allais pas travailler pour des maigres dollars. J’étais un pianiste de grande expérience et je savais m’occuper des instruments. C’était une expertise qui se payait. Je le ferais surtout pour me changer les idées et éviter de broyer du noir en pensant à Kassandra. Il m’arrivait encore de déprimer sur sa disparition. On ne faisait jamais le deuil d’un enfant. Jamais. C’était tout simplement impossible.
Rien n'est plus beau qu'une mélodie dont la sonorité est parfaite.
Je ne le connaissais pas encore très bien, mais j’aimais beaucoup parler avec lui. Pendant qu’il réfléchissait, je faisais signe à ma serveuse de venir vers nous et je lui commandais un café gourmand pour lui et un café noir pour moi. Je voulais qu’il goûte les nouveaux desserts que mon chef allait mettre à la carte. Je faisais toujours déguster à mon personnel, à ma famille ou à mes amis proches les nouveautés, leur avis était quelque chose d’important pour moi. Je terminais mon verre de vin et monsieur Watson reprenait la parole. C’était tout à fait légitime qu’il ne s’en souvienne pas.
« Oh oui je comprends tout à fait ! Attendez une minute. » Je me levais pour me rendre au bar afin de prendre mon cellulaire et je revenais m’asseoir en face de lui. Je lui montrais une photo de mes enfants à l’époque où tout allait encore bien entre nous. Tout le monde pourrait croire que l’on était la petite famille parfaite sans souci. Mais il faut se méfier des apparences. Nous avions nos petits soucis comme tout le monde hélas. Mais je ne voulais pas en parler, je voulais juste oublier tout ça pour le moment.
« Voilà, ce sont eux. Très bien, alors dans ce cas, tu me tutoies aussi.» Je lui faisais un petit sourire. « Disons que je n’ai jamais réussi à trouver un pianiste qui me convenait. Eh bien je paie 200 dollars pour les répétitions et 350 dollars pour 2 heures. Mais si tu considères que ce n’est pas assez, donne moi ton prix et j’en parlerai très volontiers avec mon mari. Je me doute que les tarifs ont du changer depuis le temps. » Ma serveuse arriva avec mon café et le café gourmand pour Aaron.
« Tiens, c’est offert par la maison. Avant que tu me poses la question, non, je n’essaie pas de te soudoyer, je veux juste avoir ton avis sur mon nouveau lancement de desserts maison. J’aime bien varier ma carte de temps en temps. » Je prenais une gorgée de café et je reposais ensuite ma tasse. « Alors tu as un petit cantuccio. Tu le connais sans doute pas, parce qu’il n’est servi que dans des rares restaurants italiens, mais le cantuccio est sans doute le truc qui manquait au diable pour totalement conquérir le monde. C’est une base de tiramisu dans laquelle le café est remplacé par de la noisette et la poudre chocolatée par des amandes caramélisées. Ultra-léger et incroyable. Le meilleur truc du monde. La fameuse pana cotta C’est de la crème cuite, comme son nom l’indique, à laquelle on ajoute le coulis de son choix. C’est un peu comme un Sunday du McDo, mais en bon. Pour peu que le coulis soit maison, on a juste envie de hurler youpi.Les cannellonis siciliens sont des biscuits croustillants, aromatisés au marsala et au cacao, fourrés d’une crème de ricotta vanillée et chocolatée, le tout avec une touche d’agrume. La crostata Tarte aux fruits italienne. Une pâte toute simple, une marmelade aux fruits, et un quadrillage tout joli. Voilà, c’est la crostata. Et c’est bon. Les cantuccini sont des petits biscuits aux amandes de Toscane, idéaux pour accompagner l’heure du thé, croquants craquants tout ça. Les énormes morceaux d’amandes à l’intérieur sont monstrueusement bons. Et pour finir, un petit morceau semifreddo C’est un parfait glacé, à base de glace, de génoise et de nougatine. Un genre de bûche en meilleur et en plus italien, idéal pour affronter la chaleur de l’été ou pour se réchauffer le cœur en hiver. J’attends que tu me dises ce que tu en penses. » Je prenais une nouvelle gorgée de mon café.
Rien n'est plus beau qu'une mélodie dont la sonorité est parfaite.
La blonde était allé chercher son téléphone cellulaire. Je regardais la photo qu’elle me montrait et tout de suite je me souvenais avoir vu la tête de ces deux étudiants. Je n’avais pas fait le rapprochement qu’ils étaient jumeaux. Je n’étais pas là depuis suffisamment longtemps.
- Oui, maintenant que vous me les montrez, je les ai eu dans ma classe. Cela signifie donc que nous nous reverrons à la réunion de parent-enseignant dans quelques semaines.
Je lui rendais l’appareil avec un petit sourire. J’adorais les adolescents. Je les préférais aux tout petits. Non pas que je n’aimais pas ces derniers, simplement que je n’aimais pas faire de la discipline pour des histoires de pipi-caca. Cela arrivait avec les adolescents, mais moins souvent. J’écoutais ensuite son offre. Elle était généreuse, très généreuse. Ça aiderait pour faire le nouveau jardin de Rose et quelques babioles. Peut-être payer une session de cours à Lexie ou encore son loyer durant quelques mois. Ça me brûlait de lui dire oui. Je regardais le café gourmand et j’avais un petit sourire en coin. Ici, je serais bien traité pour mes talents d’artiste c’était plus que clair. - Nos tarifs sont raisonnables. Par contre, si des pièces sont à changer sur le piano se sera à vos frais. Souvent lorsqu’on le remet en selle, il risque de montrer des signes de mécontentement suite à une non utilisation. Pas la peine de payer un réparateur. Je suis amplement à l’aise pour le faire.
Je regardais les desserts avec un petit sourire en coin. Ainsi donc, j’aurais l’honneur d’être le goûteur de ces petits délices. Je m’installais plus confortablement. J’allais devoir mettre mes papilles en mode exploration culinaire.
- Ah mais se serait un honneur d’essayer ces fameux desserts.
Je l’écoutais avec attention me parler de toutes ces sucreries. Clairement , je ne prendrai pas de desserts ce soir. Je ne comptais pas tous les manger non plus. J’étais gourmand, mais pas à ce point. Je commençais par le cantuccio. Elle avait absolument raison. C’était délicieux. Moi qui adorait les Tiramisu de base j’étais comblé avec ça. Je passais au second qui était la Pana Cotta. J’étais moins enthousiaste. Je n’avais jamais été un grand amateur des trucs qui bougent tout seul. Je continuais avec le reste avant de m’arrêter à mi-chemin.
- Bon, le bilan à mi-route. Définitivement le Cantuccio est mon favori pour le moment. Je ne suis pas un grand amateur de la Pana Cotta. Les cannellonis sont un peu trop chargé en sucre à mon goût et je trouve que l’arôme d’agrumes pourrait être un peu plus corsé pour contre balancer le tout. La costata est rafraîchissante. Je la vois bien pour les beaux jours d’été.
Je prenais une gorgée de café pour continuer mon exploration sucrée. J’adorais goûter chacun de ses petits délices. Je terminais finalement ma dégustation avec un petit sourire. Heureusement que je n’avais pris qu’une ou deux petites bouchées de chaque.
- Les Cantuccini sont plutôt lourd, un dessert plus hivernal à mon sens. Le semifreddo est vraiment divin. J’hésite à le nommer grand favori avec le Cantuccio. Navré si mon italien est horrible. J’ai toujours été un peu nul avec les langues.
J’éclatais de rire en prenant une gorgée de café.
- Dans tous les cas, ces recettes sont merveilleusement décadentes. Félicitations. J’espère que les repas seront fournis si j’accepte le contrat.
Rien n'est plus beau qu'une mélodie dont la sonorité est parfaite.
Je laissais mon cellulaire sur la table après lui avoir montré la photo de mes enfants. Oui, nous serions amené à nous revoir et à mon avis, ce ne serait pas très positif. Car je savais que ma fille était une très bonne élève et qu’elle se donnait à fond dans ce qu’elle faisait, mais ce n’était pas du tout la même chose en ce qui concernait mon fils. Ma fille était passionnée par la musique mais mon fils s’en fichait. La seule chose qui le passionnait en ce moment, c’était le rap et le métal et ça, ce n’était pas de la musique pour moi.
« Oh ça oui, je n’en doute pas une seconde. Je sais que mon fils n’est pas un élève très discipliné et j’en ai tout à fait conscience. Mais nous ne sommes pas ici pour parler de ça. » Je lui faisais un petit sourire. Je n’avais clairement pas envie de parler du cas de mon fils au milieu de mon établissement. Il s’agissait de ma vie privée et je ne voulais pas que des oreilles indiscrètes entendent ce qu’il se passait au sein de ma famille. Nous aurions tout le loisir d’en reparler plus tard.
« Je suis heureuse que les tarif que je vous ai proposé vous convienne. Oh mais ça me paraît évident ! Gardez juste bien la facture avec vous et je m’occuperais de vous le rembourser. Je ne serai pas surprise que la facture soit salée, il a été négligé depuis pas mal de temps. Je joue un peu mais je n’ai clairement pas le niveau de jouer en publique. » L’idée d’essayer mes desserts le tentait bien et c’était tant mieux. Je sortais mon petit carnet afin de noter toutes les critiques qu’il allait me faire pour les redire à mon cuisinier.
Je prenais soin de noter tout ce qu’il me disait au fur et à mesure de ses remarques. Je savais que mon chef cuisinier ne les prendrait pas mal. Il avait la même mentalité que moi et c’était pour ça que j’adorais travailler avec lui. « Bien, c’est noté, je vous remercie d’avoir accepté de jouer les cobayes. » Je terminais mon café. « Et pour vous répondre, oui, les repas sont fourni. Je ne vais pas vous faire payer ça ni vous faire mourir de faim. Donc tout est comprit. Juste pas d’alcool pendant le service. » Je lui faisais un petit sourire. Pour moi, ça, c’était la règle numéro un pour tout le monde.
Rien n'est plus beau qu'une mélodie dont la sonorité est parfaite.
La chance semblait enfin s’ouvrir à moi dans un certain sens. J’avais l’impression que la vie s’acharnais sur notre famille depuis la disparition de notre précieuse Kassandra. Un jour, je raconterai peut-être cette histoire à Lexa. Un jour. Pas maintenant. Je lui faisais un sourire lorsqu’elle parla des repas. Je n’avais jamais été un grand buveur d’alcool et les fois que je buvais… C’était l’enfer. Je buvais surtout le même jour chaque année. Celui de la disparition de ma fille aînée. Je ne pouvais pas me retenir ce jour-là. Je ne travaillais pas et je m’enfermais à double-tour dans ma maison pour verser mes larmes en silence et en buvant. Rien d’autre. J’avais eu la chance de ne pas sombrer dans l’alcool. Une chance inouïe. J’aurais pus aller dans les vices multiples, mais je ne l’avais pas fait. Je ne pouvais pas faire ça à Rose. Je me devais d’être le pilier de ma famille.
- Je ne bois jamais lorsque je me produis sur scène. L’alcool et la musique ne font pas bon ménage dans mon cas. Je m’en abstiendrai donc.
Mon repas tirait à sa fin et cette délicieuse rencontre également. J’étais heureux d’avoir croisé Lexa. Ce piano m’avait redonné un peu de foi en l’humanité. Une lueur d’espoir pour avoir des jours nouveaux. Je me ramassais mes copies pour les mettre dans mon porte-document avec les partitions. Je regardais la propriétaire avec le sourire et je calculais mentalement le prix de mon repas. Je sortais mon porte-feuille pour lui tendre deux billets de 20 dollars. C’était plus que suffisant dans ce cas-ci.
- Pour vos excellents services madame Black. Je vous donne une réponse d’ici samedi. Je repasserai vous voir après la fin des cours vendredi ou dans la matinée de samedi au plus tard.
Je me levais et le lui tendais la main. Elle m’offrait une chance de rédemption. Elle n’avait pas idée à quel point. Je lui serrais la main fermement avant de partir avec une certaine légèreté et pour la première fois depuis de nombreuses années, je mettais du Jean-Sébastien Bach dans la voiture sur le chemin du retour.
Rien n'est plus beau qu'une mélodie dont la sonorité est parfaite.
« Je suis heureuse de vous l’entendre dire Aaron. Je suis certaine que nous allons très bien nous entendre. J’espère avoir le plaisir de vous revoir manger ici en famille. »
Je lui faisais un joli sourire. Il paya directement à table. Je n’avais pas le temps d’appeler ma serveuse qu’il avait décidé de me laisser un très généreux pourboire. C’était vraiment très gentil de sa part. Le courant passait bien entre nous et je trouvais que c’était quelque chose d’important. J’aimais bien m’entendre avec les personnes qui travaillaient pour moi. Je préférais une ambiance chaleureuse au reste. J’étais aussi ravie qu’il m’est donné son avis sur les desserts. Je me levais à mon tour.
« Ce fut un plaisir ! Merci de m’avoir donné votre avis sur les desserts. Je vais les suivre à la lettre croyez moi. Oh oui ne vous inquiétez pas, ça ne presse pas à la minutes. »
Je serrais sa main. « Saluez votre famille pour moi. » Ce dernier s’en alla et je débarrassais la table. J’avais le sourire. J’étais ravie de cette rencontre et j’espérais vraiment qu’il allait accepter. Une fois ma table débarrassée et redressée, je prenais congé et je rentrais chez moi. Je me reposais tout le temps avant le service du soir. Je me devais d’être en forme car il y avait toujours plus de monde le soir et les clients aimaient bien quand le propriétaire était présent. J’étais fière de tout ce que j’avais accompli. Même si j’avais quand même une ombre noire au tableau, celle de mon fils qui faisait n’importe quoi depuis un an. Il fallait vraiment que j’en parle sérieusement avec mon mari. Au début, j’avais pensé que ce n’était qu’une mauvaise passe mais ça persistait. Je rentrais chez moi en espérant pouvoir me reposer.
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