Saoirse a eu beaucoup moins de mal à taper le numéro de Lexie, que celui d’Alex. Pourtant, cela ne veut pas dire qu’elle n’a pas été anxieuse. Au contraire; Saoirse avait le coeur qui battait aussi fort qu’un homme amoureux aurait senti battre son coeur pour sa tendre. Mais la jeune femme ne sait tout simplement pas ce que c’est d’avoir une amie, une véritable. Elle ne sait pas comment se comporter avec les autres, et pourtant tout lui semblait si naturel avec Lexie, dans cette supérette ouverte à pas d’heure. Depuis ce jour, elle n’a cessé de demander des goûts différents pour les jus déposés à l’intérieur de sa chambre d’étudiante. S’est même vue demander à quelques reprises de ces bonbons que lui proposait toujours le gardien de nuit. Chose qu’elle avait toujours refusé jusque là. Lexie a eu une bonne influence sur Saoirse, et on pourrait peiner à croire qu’en si peu de temps quelqu’un peut faire changer une autre personne. Lexie a simplement poussé la porte ouverte d’une jeune fille qui ne rêvait secrètement que de voir le monde. Elle avait trouvé le courage d’appuyer sur l’écran tactile de son téléphone pour laisser sonner la communication qui devrait la mener directement sur la ligne de Lexie ; du moins, si ce numéro est le sien. La scientifique sursaute lorsqu’elle entend la voix de sa nouvelle amie, pense qu’elle est bien là mais se rend rapidement compte qu’elle se trouve sur la messagerie. Si un léger silence se fait d’abord entendre, elle se met à bredouiller.
“ - Lexie ?” Elle demande, comme si elle n’était pas sûre alors qu’elle en a déjà fait le constat. “ Saoirse à l'appareil… vous savez… tu sais, la fille de la supérette.” Saoirse s’explique en doutant que la jeune femme se souvienne d’elle. A cause de l’alcool ? Non, surtout parce qu’elle se pense si peu importante et marquante qu’elle comprendrait que Lexie ait fait abstraction de son existence. “ Je suis désolée d’avoir mis tant de temps pour t'appeler… mais je me demandais si tu étais toujours partante pour une sortie ?” Elle marque une pause, comme si elle attendait une réponse de la part de son interlocutrice, se met à caresser la tête de Brindille qui se pose sur ses cuisses comme si ce n’était pas un animal imposant. “ Peu importe… rappelle-moi quand tu auras du temps de libre.”
Elle aurait pu rajouter un bisous à la fin de son appel, avant de raccrocher le téléphone et de le poser sur son lit. Rare sont les week-ends où elle ne passe pas tout son temps, comme d’habitude, au laboratoire. Mais le temps ensoleillé à l’extérieur lui donne bien plus envie de sentir le vent sur son visage, la chaleur sur sa peau, que de rester enfermée avec ses éprouvettes.
Les journées se ressemblent mais pas les cas qu'elle traite et heureusement. Ce soir mon week-end commence. J'ai hâte pour passer du temps avec Sean ou même juste sortir pour profiter un peu de mon temps de repos. Une fois mon service fini je retourne dans ma chambre et retrouve avec plaisir mon téléphone que j'avais oublié. Tout en prenant une boisson aux légumes, merci Saoirse de m'avoir fait découvrir cela, j'écoute le message que j'ai sur ma messagerie. J'entends alors surprise la voix de Saoirse. Elle a l'air d'avoir du mal avec les messages vocaux. Cela me fait sourire. Et elle a également du mal avec le tutoiement. Je souris comme idiote désormais. Bien sur que je me souviens d'elle. Comment oublier cette jeune fille si adorable et si innocente. Ainsi donc elle veut qu'on sorte ? Mais oui ! Cela me fera le plus grand bien.
Je n'attends pas une seule minute. Je file à la douche et m'habille correctement et me maquille très légèrement. Peut être qu'elle voudra sortir ce soir. Et comme cela je serais tout de suite prête sinon ce n'est pas grave. Une heure après avoir écouté le message je me décide à l'appeler.
- Saoirse ? C'est Lexie ! Je suis désolée j'avais oublié mon téléphone dans ma chambre. Je ne l'ai écoute qu'une fois mon service terminé. Tu veux sotir quand ? Ce soir ? Et tu veux aller où ?
Je suis bien trop enjouée, bien trop heureuse à l'idée de sortir avec elle. J'ai hâte de lui faire découvrir plein de choses. Elle a l'air de si peu sortir. Et voir son bonheur se dessiner sur son visage me fait un bien fou. J'aime la voir sourire et être émerveillée. Oui je dis cela alors que je ne l'ai vu qu'une seule fois mais il faut dire qu'elle m'a marquée. Elle m'a montré le monde différemment. Je ne sais pas pourquoi elle est comme cela, pourquoi on dirait qu'elle ne connait rien de ce que je connais mais je dois dire que c'est agréable de la voir s'ouvrir à moi et de voir qu'elle teste des choses qu'elle ne connaissait pas dans le passé. Oui j'ai hâte de la voir. Hâte de passer du temps avec elle et de voir aussi ce qu'elle va me proposer et me faire découvrir comme ces petites boissons dont je n'arrive plus à me passer désormais...
Le temps a passé, son coeur a ralenti grâce au stress qui s’est évacué. Saoirse avait fini par s’allonger sur son lit, regardant vers le plafond jusqu’à ce que Brindille décide de grimper sur elle comme si c’était un poids plume. Mais Saoirse a l’habitude, alors, elle a laissé l’animal s’installer pour le caresser, le gratouiller avec ses ongles. L’animal aime ça ; honnêtement, dans cette chambre d’étudiante où il n’a pas la place qu’il lui faut pour vivre, Brindille n’a rien de sauvage. Il joue avec de grosses pelotes de laines, manges des boulettes de viandes, de céréales et de légumes pour les compléments alimentaires. Mais lorsque son téléphone s’est mis à sonner, ce n’était pas sur sa pelote qu’il était en train de faire ses dents ; mais sur la main droite de Saoirse. Laissant quelques traces, sans pour autant la faire saigner, la jeune femme a eu un léger cri de surprise. Autant par les dents de l’animal que par son téléphone. Elle a eu du mal à pousser la bête pour attraper l’objet, et a répondu quelques secondes avant que Lexie ne soit renvoyée sur sa boîte vocale.
” - Blue Clove Bay, ça te convient ?”
Qu’elle demande, la jeune femme, après s’être retournée pour voir ce qui vient de faire un gros boum dans sa chambre. Brindille est en train de péter un câble ; il a besoin d’évacuer le trop plein d’énergie qu’il a dans son corps. Alors, Saoirse a sorti le nom du premier lieu qui lui vient en tête, où elle pourrait amener la bête pour qu’elle se défoule. Un sourire bête se dessine sur ses lèvres lorsqu’elle voit Brindille se redresser, prit dans vêtement qui ne lui appartient pas.
” - Je peux y être d’ici trente minutes…” Déjà, de ses petits yeux noisettes, elle cherche le tiroir où est rangé le harnais qui lui permet d’emmener Brindille au laboratoire, ou dans les sous-sols. ” Est-ce que tu sais si on y vend de quoi dîner ?
Saoirse change son téléphone d’oreille, le coince contre son épaule, et va ouvrir le tiroir pour chercher les affaires de Brindille. Car c’est l’animal qu’elle va préparer ; attacher à l’aide d’un harnais et d’une laisse comme si c’était un vulgaire chat. Ce n’est pas elle qui va prendre du temps pour se changer, pour se coiffer, ou pour se maquiller. Bien trop naturelle, surtout pour aller voir quelqu’un d’autre que le Docteur Raines, Saoirse reste elle-même jusqu’au bout des ongles.
Je suis vraiment contente que Saoirse m'ait proposé qu'on se voit. Je la trouve tellement mignonne. C'est vraiment un brin de fraîcheur et d'innocence et cela fait toujours du bien d'être avec une personne comme elle. Elle souhaite qu'on se retrouve à Blue Clove Bay. Cela me va parfaitement. Et elle désire qu'on mange ensemble. Oh oui ! Elle va peut être découvrir de nouvelles choses et nous allons sans doute comparer nos gouts comme dans l'épicerie la dernière fois.
- Oui on peut manger là bas. Il y a des petits endroits sympathiques.
On verra tout à l'heure ce dont elle a envie. Y a tellement d'endroits sympas que je connais déjà personnellement.
- Pas de souci, on se retrouve là bas dans une demie heure c'est parfait. J'ai hâte de te voir ! A tout à l'heure bisous !
Je raccroche ensuite et termine de me préparer. Je dois vouer que j'étais déjà presque prête. Je me recoiffe un coup et enfile mon manteau. Je choppe mon sac à main et vérifie que j'ai tout à l'intérieur puis je sors. Il fait assez bon aujourd'hui. J'ai hâte de retrouver ma nouvelle amie pour me changer les idées et pour voir le monde à travers ses yeux. Il faut dire qu'elle m'a laissé une très bonne impression lors de notre première rencontre. Saoirse m'intrigue réellement. Je me demande d'où elle vient, quel est son mode de vie. Je me pose tellement de questions à son sujet mais je sais que je n'oserais pas les lui poser, par respect pour sa vie privée. Mais j'espère un peu qu'elle se confiera à moi.
Je me demande également ce que nous allons faire à part dîner. Est-ce qu'elle a envie de visiter quelque chose en particulier ? Juste me balader me va parfaitement et faire les magasins également. En fait tout me va parfaitement tant que je sors de ma petite bulle de confort habituelle. Cette petite sortie brise ma routine et c'est vraiment très agréable.
Ma petite balade en tête à tête avec moi-même se termine. Je suis arrivée sur notre point de rendez-vous. J'ai vraiment hâte qu'elle arrive. Surtout que cette fois-ci je ne suis pas saoule donc je pourrais encore plus profiter de notre petite sortie à deux. Je regarde partout autour de moi pour voir si je la repère. Je me demande si elle va arriver encore une fois avec un taxi et ce monsieur si peu charmant ou si elle va venir par un autre moyen de transport.
C’est un taxi qui l’emmène à son point de rendez-vous. Et si Lexie était là, elle aurait reconnu le chauffeur qui les a ramené chez elle la dernière fois. Ce même homme qui, lorsqu’il a vu la brune arriver avec son gros félin, a failli faire un arrêt cardiaque pour l’état de sa voiture. Mais comme d’habitude, lorsqu’on aligne les billets, il se tait et laisse entrer n’importe qui dans son véhicule hors de prix. Saoirse, elle commence seulement à voir le monde tel qu’il est vraiment ; la carte qu’elle glisse pour payer fait toujours pétiller les yeux des autres. Elle se rend alors compte que l’argent mène le monde, les gens et tout ce qui va avec. Et Saoirse, elle n’est pas à l’aise. Alors, elle était bien heureuse de sortir du véhicule, quelques secondes avant son énorme boule de poils.
La bête, qui n’a pas pour habitude de sortir, et complètement paralysée. Saoirse a du la forcer à quitter l’habitacle, et depuis qu’elle est dehors, Brindille est collée à la jambe de sa maîtresse comme à un aimant. Ca fait rire Saoirse, légèrement, qui repère le moindre mouvement de ces longues oreilles qui captent le moindre bruit qui passe ; surtout celui des vagues qu’on entendant déjà d’ici. Lorsqu’enfin elle redresse son visage pour tenter d’apercevoir Lexie, elle tombe rapidement sur cette dernière qui semblait déjà l’attendre. Elles marchent l’une vers l’autre ; Brindille n’a pas le choix de suivre même s’il ralentit la plus vieille. Sans s’y attendre ou avoir vraiment calculé son coup, c’est avec une étreinte qu’elle salut Lexie ; comme si elles étaient amies depuis toujours. Saoirse, elle ne dira pas le contraire ; elle est chamboulée par ce contact. Mais maintenant, elle parvient à moins le montrer, et se contente de sourire de toutes ses dents en caressant l’animal entre ses oreilles.
” - Excuse-moi d’avance, mais Brindille avait besoin de sortir…” Saoirse continue de sourire, mais cette fois, c’est à cause de l’appréhension ; est-ce que Lexie acceptera ce gros félin à quatre pattes, tout droit sorti d’une éprouvette ? ” Elle tourne vraiment en rond dans ma chambre d’étudiant, et… je me suis dis qu’avec toi, tout irait bien pour que je l’emmène.”
L’animal, il n’a pas peur de Lexie. Après tout, il connaît les êtres humains depuis sa conception, et a certainement plus confiance en eux que tout ce qu’elle pourrait voir de vivants. Alors, Brindille n’a pas peur de s’approcher de Lexie pour avoir une caresse, alors qu’elle continue de regarder tout ce qu’il y a autour, parce qu’elle non plus, ne connaît rien à la réalité du monde.
” - Ca te va terriblement bien!” Qu’elle s’exclame en attrapant une des mèches de cheveux de Lexie, où la couleur est encore un peu visible. ” Il faudra que tu me montres comment c’était, juste après les avoir coloré !”
Je vois Saoirse apparaître mais elle n'est pas seule. Un énorme félin colle sa jambe... Elle est venue avec cette bête en laisse ? J'ouvre grand les yeux. Je crois que je suis en état de choc ; c'est vraiment impressionnant à voir. Je m'approche mais à pas lents, je ne suis pas vraiment rassurée. J'oublie bien vite la présence de son animal lorsque ma nouvelle amie me prend dans ses bras. Je suis ravie qu'elle se comporte de la sorte. Cela me fait chaud au cœur. Je la regarde ensuite caresser la bête en laisse comme s'il s'agissait d'un chien de compagnie... Animal qui s'appelle Brindille. Drôle de nom pour un bête aussi grande.
- Tu... Tu vis avec Brin... Brindille ? Dans ta chambre d'étudiant ? C'est accepté ? C'est pas dangereux ?
Bon il est vrai que Brindille n'a pas l'air dangereux mais quand même quoi, c'est une bête sauvage... Qui se rapproche de moi... Je dois bien avouer que je ne sais pas trop quoi faire. On dirait qu'il veut un câlin... J'hésite quelques petites secondes mais fini par passer ma main entre ses oreilles. Mon dieu que c'est doux et chaud. C'est tellement agréable surtout qu'il ne bouge pas. Décidément Saoirse m'impressionne beaucoup. Je crois que je vais finir par m'habituer à son grand compagnon et d'ici quelques temps je n'en aurais peut être plus du tout peur.
Je me concentre à nouveau sur mon amie qui a l'air de beaucoup aimer ma couleur même s'il n'en reste presque plus. Je sors pour le coup mon téléphone pour lui montrer quelques photos.
Puis je change de sujet.
- Je ne pense pas que Brindille puisse nous accompagner dans un restaurant donc il faut qu'on cherche un petit vendeur ambulant afin de nous prendre à manger. On pourra manger en marchant au bord de la plage si tu veux.
Je n'ose pas ajouter que nous promener en ville, ou tout du moins près des humains, pourrait être un problème avec Brindille. Il va faire peur à tout le monde. Nous ne sommes pas habitués à croiser des félins tel que lui en laisse tous les jours. Je me demande où elle l'a eu... En pensant à lui je ne peux m'empêcher de me rapprocher de lui pour le caresser à nouveau car mine de rien cela fait un bien fou et cela est tellement cool. Je suis vraiment impressionnée qu'il se laisse faire de la sorte. Elle a du l'avoir tout jeune pour l'habituer à une laisse et au contact des humains. Je demanderai peut être tout à l'heure à Saoirse qu'elle me raconte l'histoire de son ami poilu.