J'ai vu le jour dans un hôpital de Las Vegas, un soir de juin il y a cinquante-et-un an de cela. Mes parents ont eu beaucoup de mal à m'avoir, leur joie fut donc incommensurable lorsque je montrais le bout de mon nez. Mon père était chercheur pour un grand groupe pharmaceutique et ma mère était secrétaire dans un cabinet comptable. Je suis fils unique. Comme je vous le disais, mes parents ont eu du mal à m'avoir et après ma naissance, ma mère essaya pendant quelques années d'avoir un autre enfant, mais au bout de six ans de tentatives infructueuses, elle décida de renoncer. Ne pas avoir de frère ou de soeur a toujours crée une petite tristesse en moi, mais comme j'étais un enfant très sociable, je me faisais rapidement et facilement des amis, de fait, je ne me souviens pas d'avoir eu de longues périodes de solitude pendant mon enfance...ni même après d'ailleurs.

De mon enfance, il n'y a pas grand chose à en dire. Gamin gentil, rieur, un peu espiègle, j'étais entouré d'une bande d'enfants ayant quasiment le même caractère que moi. A l'école, je travaillais bien, mais je n'étais pas forcément le premier de la classe. A l'âge de quinze ans, mes parents durent partir de Las Vegas, le laboratoire pour lequel travaillait mon père déménageait ses bureaux à Los Angeles et ma mère et moi dûmes suivre mon père naturellement. Ce fut là le premier grand chagrin de ma vie. Je laissais derrière moi mes amis, mon école, oui ce fut très douloureux. Il me fallu environ une année entière pour m'adapter à ma nouvelle ville, me faire des nouveaux amis, de nouveaux repères. Ce fut également à l'âge de seize ans que je connus mes premiers émois amoureux. Deux histoires principalement, une avec une jeune fille prénommée Sarah et une autre...avec un garçon, David. Pour mon histoire avec David, ce fut un peu plus compliqué parce qu'à cette époque, une relation comme celle que nous avions n'était pas vraiment bien vue, si bien que nous passions notre temps à nous cacher. C'est sans doute ce qui a eu raison de notre histoire.

A la fin de mes études secondaires, je décidais d'entamer des études de médecine, au départ, je ne savais pas quelle spécialité prendre et puis vers la fin de ma seconde année d'études, la pédiatrie apparu comme une évidence. J'aimais travailler au contact des enfants, rien ne me faisait plus plaisir que de les voir sourire, faire tout ce qui est en mon pouvoir pour leur rendre un sourire disparu de leur visage à cause de la maladie était quelque chose qui me motivait énormément.

C'est à l'âge de dix-huit ans que je connus celle qui allait bientôt devenir ma femme. Elle se nommait Helen et avait des origines autrichiennes. Nous nous sommes connus sur les bancs de la fac. Le coup de foudre fut immédiat des deux côtés. Il ne nous fallu pas longtemps pour nous fiancer et à vingt-et-un an, je connus la grande joie d'être père. Un fils, Sean. Il était magnifique. Les premiers temps furent difficiles, nous étions jeunes parents, n'ayant pas encore finis nos études, mais heureusement mes propres parents nous aidaient énormément.

La vie s'écoula au rythme tranquille de l'évolution de notre enfant, il était notre huitième merveille du monde. Alors que j'entamais ma dernière année de médecine, avant ma spécialisation en pédiatrie, un drame terrible survint. Notre fils, notre cher Sean nous fut enlevé. J'étais en cours toute la journée ce jour là et ma femme avait laissé notre enfant en garde à une baby-sitter, mes parents ne pouvant s'en occuper exceptionnellement. Encore aujourd'hui les circonstances de son enlèvement restent floues. Tout ce dont je me rappelle, c'est de la douleur que j'ai ressenti lorsque je l'ai su, les hurlements que j'ai poussé.

Bien que je déployais toute mon énergie dans la recherche de mon fils, je n'avais pas le droit d'abandonner mes études. J'obtins mon diplôme de médecin pédiatre et commençais à exercer à l'hôpital de la ville. A l'époque nous n'avions pas les moyens informatiques que nous avions maintenant. La police, qui était sur le coup, s'intéressa à l'affaire seulement pendant les trois ans qui suivirent l'enlèvement de mon fils. Ensuite, je dû me débrouiller tout seul. Ma femme et moi avons divorcé huit ans après l'enlèvement de Sean, ensuite, je plongeais à corps perdu dans le travail et la recherche de mon enfant. Il y a dix ans environ, mes investigations m'ont mené ici, à Bleu Cove, mais plus le temps passe et plus j'ai l'impression de m'être fourvoyé. Je n'ai plus la moindre piste à son sujet. Cela fait vingt cinq ans que je recherche Sean et j'avoue que je commence à désespérer. Je continue de chercher bien sûr, ne pouvant m'empêcher de me demander si il n'est pas le jeune homme qui vient de sortir de mon cabinet, accompagné de son enfant, mais je n'ai plus la même fougue qu'à l'époque. Je n'abandonnerai cependant jamais mes recherches, jusqu'à mon dernier souffle je rechercherais mon enfant.